30.11.06

Communiqué n°7

Paix et Justice au Moyen- Orient
STRASBOURG le 30 novembre 2006
cpjmo@yahoo.fr


Au Moyen-Orient, les bruits de bottes sont permanents

Quel est «cet acteur régional» qui se cache derrière l’assassin de Pierre Gemayel?

Pourquoi Israël propose-t-il un «plan de paix» aux Palestiniens ?


Le 29 novembre Nouri Al- Maliki, premier ministre irakien, s’est rendu en Jordanie pour rencontrer G.W.Bush et l’informer des pourparlers des autorités irakiennes avec leurs homologues iraniens et syriens (grands bénéficiaires des erreurs stratégiques américaines en Irak) en vue de «stabiliser» (selon la terminologie officielle) la situation chaotique en Irak. En effet, l’intervention américaine en Irak a rompu tous les équilibres politiques et socio-économiques du pays. L’instauration de nouveaux équilibres dépend de facteurs qui, actuellement, échappent aux protagonistes. Le pouvoir n’appartient plus à l‘«Etat irakien», qui n’a plus d’existence réelle, ni aux troupes étrangères retranchées dans leurs casernes. Il appartient à la rue, ou plus exactement, aux différentes milices, sunnites et chiites, liées d’une manière ou d’une autre aux pays voisins de l’Irak. Pourquoi cette rencontre en Jordanie? On est tenté de dire que le président américain n’ose plus se rendre en «Irak démocratique»! Comment en est-on arrivé là ?

A l’origine, l’Etat irakien a été créé par l’occupant britannique après l’élection, sous son égide, d’une «Assemblée constituante» en février 1924. Les chiites avaient refusé de participer au scrutin, ce qui permit aux sunnites arabes, minoritaires, mais soutenus par la couronne britannique, de s’emparer du pouvoir, avec l’objectif de défendre les intérêts stratégiques et pétroliers de l’Angleterre, superpuissance de l’époque. Sans véritable base sociale propre, s’appuyant exclusivement sur la puissance politique et militaire britannique, la monarchie des «Al- Hachémi», régna sur l’Irak d’une main de fer, pendant 34 ans.

La fin de la deuxième guerre mondiale, en sonnant le glas de l’hégémonie planétaire britannique, a favorisé la montée en puissance de l’Union soviétique, et provoqué la division du monde en deux blocs hostiles. Profitant du nouveau rapport de forces à l’échelle mondiale, les militaires nationalistes irakiens renversèrent le régime corrompu des «Al- Hachémi» le 14 juillet 1958. Le nouveau régime, anti- impérialiste, comptait principalement sur le soutien soviétique.

Une rapide étude historique de l’Irak montre que ce pays est le résultat d’un rapport de forces sur le plan mondial. Tout régime mis en place devait, pour se maintenir, s’appuyer sur une puissance étrangère capable de s’imposer à ses concurrents.

L’Union soviétique ayant disparu en 1991, la Russie n’était plus en mesure de soutenir le régime de Saddam Hussein. Celui-ci, devenu une proie facile pour les Etats- Unis, fut renversé le 9 avril 2003.

Ainsi, l’Etat irakien créé par une puissance étrangère (britannique), soutenu par une autre puissance étrangère (soviétique) a-t-il été renversé et dominé par une troisième puissance étrangère (américaine).

On est en droit de s’interroger sur l’histoire de ce vaste territoire, proclamé pays autonome depuis 81 ans, composé d’une mosaïque d’ethnies et de communautés sans lien historique ni culture commune. Au sein même de la communauté chiite, quel lien «historique» peut-il exister entre les chiites arabes et ceux d’origine persane? Quelle communauté d’intérêts lie entre eux les sunnites kurdes, tous d’origine indo-européenne, et les sunnites arabes et turcmans ? Sont-ils tous les héritiers de Babylone ou de la civilisation mésopotamienne ?

Avec l’écroulement de l’Etat autoritaire de Saddam Hussein, le nationalisme des ethnies a trouvé un terrain favorable pour s’exprimer. Une chose est certaine: la politique consistant à démembrer, décomposer, exacerber les tensions inter-ethniques ou religieuses, a été de tout temps une constante de la politique des puissances occidentales pour asseoir leur suprématie. Si le démembrement de la Yougoslavie était prémédité, la décomposition de l’Irak semble davantage une conséquence de l’intervention américaine.

L’«erreur» stratégique des Etats-Unis en Irak a permis la montée en puissance de l’Iran et de la Syrie, hostiles à la présence des Etats-Unis au Moyen-Orient, contribuant par là- même, à la naissance d’une puissante coalition de pays, allant des frontières afghanes au Liban, au bord de la Méditerranée.

Le Liban est le maillon faible de la «coalition» des pays opposés à Israël. L’assassinat de Pierre Gemayel, le 21 novembre, est-il une tentative d’exacerber les tensions inter-ethniques et religieuses de ce jeune pays, empêtrant la «coalition» dans des problèmes insolubles? Voici ce qu’a dit un haut diplomate irakien: «Si l’un des acteurs de la région cherchait à envenimer un peu plus les relations entre Washington et Damas pour entraver celles que la Syrie veut resserrer avec nous, cela ne marchera pas» (Le Monde du 23/11/06). Qui se cache derrière: «l’un des acteurs de la région» ? L’ancien ministre Soleiman Frangié a même rejeté sur la majorité la responsabilité de l’assassinat (Le Monde du 23/11/06).

A entendre les analystes de la propagande officielle, porte- paroles des intérêts des puissances colonialistes, la réponse est claire: «à qui profite le crime?». «Il profite à la Syrie (…) Mais il profite aussi à Téhéran et à tous les orphelins de la Syrie au Liban» (Antoine Sfeir- DNA du 25/11/06). Voici une «analyse» à l’emporte pièce, sans preuves, ni enquête. Actuellement, de nouveaux défis attendent la Syrie qui devra assumer le rôle important de «garant de la stabilité régionale». L’assassinat de Pierre Gemayel ressemble à un piège, tendu par les défenseurs du statut quo (partisans du chaos «constructif») qui tentent de prouver que la Syrie ne peut pas jouer un rôle de stabilisateur.

Les semaines et les mois à venir seront «chauds» . Après l’échec américain en Irak, les rapports de force évoluent rapidement au Moyen-Orient. Pour faire face à la montée en puissance de l’axe irano-syrien et pour se désengager et calmer le front palestinien, Israël vient de proposer un «plan de paix» aux Palestiniens.

Au Moyen-Orient, les bruits de bottes sont permanents et une proposition de paix peut cacher une préparation à la guerre.

25.11.06

Communiqué n°6


Paix et Justice au Moyen- Orient
STRASBOURG, le 25 novembre 2006
mailto:cpjmo@yahoo.fr


G.W.Bush : genou à terre !

De l’ère unipolaire et unilatérale…

La préparation de l’aventure irakienne des Etats-Unis devait inaugurer le passage d’un monde bipolaire à un monde unipolaire, dans lequel les Etats-Unis seraient la puissance dominante du globe.

C’est après sa victoire écrasante (!) en Afghanistan sur une poignée de talibans mal équipés et armés uniquement de leur foi que l’idée s’est installée d’une domination sans partage du monde.

Sous l’égide de Richard Perle, conseiller du secrétaire à la défense, a été lancée une campagne de dénigrement des Nations-unies, stigmatisant la «corruption» de cette institution multilatéraliste. Parallèlement, vu la réticence de la France et de l’Allemagne- contrairement à l’Angleterre- à s’engager dans l’aventure américaine, Donald Rumsfeld, secrétaire à la défense, a entrepris de se tourner vers les pays d’Europe Orientale, n’hésitant pas à afficher son mépris à l’encontre de la France et de l’Allemagne, pays appartenant-selon lui- à la «vieille Europe». Aux Etats-Unis mêmes, les produits français ont été vilipendés par la presse belliciste. Les images des manifestations anti-françaises ont fait l’objet de larges diffusions par la télévision. Bref, tout fut mis en œuvre pour une campagne militaire de grande envergure avec l’objectif d’asseoir définitivement l’hégémonie des Etats-Unis.

L’occupation de l’Irak a entraîné l’expulsion des compagnies pétrolières russes et françaises et l’installation concomitante de sociétés américaines. Haliburton et Bechtel, ainsi que Kellog Brown & ROOT (KBR), filiale d’Haliburton, ont raflé tous les contrats, depuis la remise en état des infrastructures essentielles, jusqu’à la fourniture de produits alimentaires, de vêtements et d’équipements à l’armée américaine au Koweït. «L’idée que l’Irak puisse être une sorte d’Eldorado, un gâteau que des Etats peuvent se partager… » a lancé M. de Villepin lors d’une conférence de presse commune avec ses homologues russes et allemands.

Non satisfaits des conquêtes en Afghanistan et en Irak, les Etats-Unis ont avancé leur projet d’un «Grand Moyen-Orient». Il s’agit d’«un vaste plan de remodelage d’un ensemble régional allant du Maghreb au Pakistan» (Le Monde du 27/02/04). En langage non diplomatique, entendez : conquête totale des marchés de la région, vassalisation de tous les pays, de l’Océan atlantique jusqu’aux portes de la Chine, conquête de l’Iran, du Liban et de la Syrie. «Le président américain s’est donné «dix ans» pour réaliser cet objectif» (Le Monde du 11-12/05/03). Les Etats-Unis se sentaient au faîte de leur puissance.

Pendant ce temps, la résistance irakienne, les milliers de morts et de blessés américains, les destructions et le chaos en Irak, ont porté des coups durs à la crédibilité de l’administration bushiste. Des milliards de dollars ont disparu lors de la «reconstruction». L’insécurité généralisée a miné toute velléité de domination de l’Irak. Pour James Baker, l’ex-secrétaire d’Etat américain, qui préside une commission spéciale sur l’Irak créée par le Congrès, la situation en Irak est «un sacré bazar».

Au désastre américain en Irak se sont ajoutés l’opposition de l’Iran et de la Syrie à l’hégémonie américaine au Moyen-Orient et l’échec de l’incursion israélienne de juillet 2006 au Liban, dont l’objectif était d’écraser la résistance de ce pays en y installant un gouvernement fantoche. L’échec de cette aventure sonnait définitivement la fin du rêve bushiste d’un «nouveau Moyen- Orient» à la solde des Etats-Unis !

Le mouvement anti-guerre aux Etats-Unis et dans le monde et la faillite des plans américains ont conduit au résultat des élections du 07 novembre, au cours desquelles, les républicains ont perdu la majorité au Congrès au profit des démocrates.
Une nouvelle ère s’ouvre à Washington.

...à l’ère unipolaire et multilatérale

Le 07 novembre marque un tournant de la politique américaine. Tout en restant la grande puissance planétaire, les Etats-Unis sont obligés de prendre le virage «multilatéraliste». En vue de convoquer une «conférence internationale» sur l’Irak, les contacts ont été pris avec l’Iran et la Syrie, pays voisins de l’Irak, afin de trouver les moyens de stabiliser la situation dans ce pays meurtri.

Vu l’impasse américano-israélienne en Palestine, «messieurs Chirac et Zapatero tentent de relancer le processus de paix au Proche-Orient» (Le Monde du 18/11/06).

De fait, sur la question du nucléaire iranien, la position de la France «est très proche de celle des Russes» selon l’entourage du président français. L’irritation affichée des Israéliens n’y change rien. Les manœuvres d’intimidation de l’aviation israélienne au Liban, survolant les bataillons français de la Finul II, ne peuvent pas modifier le cours de l’Histoire : l’ère «multilatéraliste» s’est installée et maintenant, il faut que les Etats-Unis apprennent à partager «le gâteau».

«Paix et Justice au Moyen-Orient» demande le retrait des troupes occidentales et la fermeture des bases militaires américaines, britanniques et françaises de l’Asie centrale et du Moyen-Orient. La fin de l’ingérence des puissances occidentales dans les affaires intérieures des pays de la Région. Le respect de la souveraineté nationale et de l’intégrité territoriale des pays de la région, par toutes les puissances, grandes ou petites.

17.11.06

Communiqué n°5

Paix et Justice au Moyen- Orient
STRASBOURG le 15 novembre 2006
cpjmo@yahoo.fr

L’«unilatéralisme» américain en phase de transition

Les élections du 07 novembre 2006 aux Etats-Unis ont sanctionné la politique agressive de G.W.Bush, connue sous le nom de «chaos constructif» ou de «lutte contre le terrorisme». Cette politique a conduit à l’invasion de l’Afghanistan et de l’Irak . Le bilan humain et financier des aventures expansionnistes américaines est très lourd: selon les chiffres officiels, plus de 2800 militaires américains tués en Irak, plus de 30000 blessés et des centaines de milliers d’Irakiens tués depuis le début de l’intervention américaine.

Dès l’annonce du résultat des élections et de la victoire sans appel des démocrates, les médias ont rapporté de «nouveaux signes d’ouverture sur l’Irak» de la part de G.W.Bush. Selon certaines sources, la question du «retrait graduel d’Irak» serait même posée. Les «cols blancs de la zone verte» de Bagdad sont persuadés que Zalmay Khalilzad, le puissant ambassadeur des Etats-Unis, prépare ses valises (Le Monde du 11/11/06).
Il semble évident que l’administration Bush ne peut pas continuer la politique qui, selon les propos du président allemand a conduit au «désastre» en Irak. Tout en restant la puissance dominante des pays occidentaux, l’Amérique est obligée d’introduire une bonne dose de «multilatéralisme» dans sa politique étrangère.
Pour stabiliser la situation, certains diplomates n’hésitent pas à évoquer le rôle que l’Iran et la Syrie ont à jouer en Irak. Du coup, les projecteurs se braquent sur ces deux pays. «La semaine passée, Téhéran a subitement donné son accord à une discussion sur les moyens de stabiliser le pays» (Le Monde du 11/11/06).
Les discussions, directes et indirectes, ont certes commencé entre l’Iran, d’une part, et l’Amérique et son allié britannique, d’autre part. Elles vont être longues, et conduiront à un nouveau rapport de forces au Moyen-Orient. Conscients de leur perte d’influence, les Américains, quoique affaiblis, n’hésitent pas, comme à l’accoutumée, à manier le bâton et la carotte. De son côté, l’Iran, conscient de la montée de son influence au Moyen-Orient, réitère sa menace de «détruire Israël».
La vocifération anti-israélienne de l’Iran semble relever plus de la rhétorique guerrière visant à manifester sa détermination que d’intentions concrètes. Il en va de même de la provocation de Mahmoud Ahmadinejad, président de la république islamique, lorsqu’il déclare vouloir doter l’Iran de 60 000 centrifugeuses. Il s’agit pour lui de placer très haut le niveau de ses exigences en vue des discussions sur l’avenir de l’Irak et du Moyen-Orient.
Quant à Israël, Ehoud Olmert s’est rendu aux Etats-Unis afin de s’informer de la nouvelle politique américaine au Moyen-Orient et de tenter de réduire l’ampleur des concessions à l’Iran et à la Syrie.
Actuellement, la diplomatie américaine est dans une phase de transition. Son évolution dépendra des propositions démocrates et des nouveaux rapports de forces qui vont s’établir à Washington.
Quoi qu’il arrive, une chose est certaine. Pour les chancelleries occidentales (américaine, française, allemande, britannique, polonaise,…) la guerre en Irak est définitivement perdue. Mais la guerre en Afghanistan serait «gagnable». D’où l’effort des Occidentaux pour renforcer leurs contingents dans ce pays, tout en se désengagent du bourbier irakien. «Varsovie renforce son contingent en Afghanistan», même si 76% des Polonais se disent opposés à l’envoi de 1010 soldats en Afghanistan et «Berlin prolonge la participation de son armée à l’opération «Liberté immuable» en Afghanistan», écrivait Le Monde du 12-13 novembre 2006.
Les Occidentaux commettront-ils les mêmes erreurs qu’en Irak? Tôt ou tard, une nouvelle «inflexion diplomatique» finira par s’imposer, également en Afghanistan. La sagesse des nations dit que «ceux qui ignorent l’histoire, sont condamnés à la revivre».

9.11.06

Communiqué n°4

Paix et Justice au Moyen- Orient
STRASBOURG le 8 novembre 2006

c
pjmo@yahoo.fr

Moyen-Orient : Esquisse d’une évolution des rapports de forces

La guerre israélo-libanaise de juillet 2006 semble annoncer un tournant dans le rapport de forces au Moyen-Orient. L’offensive israélienne s’inscrit dans le prolongement de celle qui a poussé la Syrie hors du Liban. Cette offensive constitue la deuxième étape du plan américano-israélien, dont l’objectif était de mettre la main sur le Liban, en installant un gouvernement fantoche à Beyrouth.
La résistance des Libanais à l’offensive israélienne a fait capoter le plan américain tendant à créer un «nouveau Moyen-Orient», docile et soumis. Il est certain qu’une victoire israélienne aurait fait des Etats-Unis la puissance dominante au Liban, au détriment de la France, ancienne puissance tutélaire. Alliés stratégiques, Français et Américains n’en sont pas moins des adversaires coriaces pour la conquête des zones d’influence. L’envoi de la Finul II a fourni à la France l’occasion de «s’introduire» au Liban Sud, avec un mandat de l’ONU et après avoir amplement négocié avec le Hezbollah et son soutien iranien. Loin d’avoir cédé, l’aviation israélienne continue de plus belle ses attaques, en violant la souveraineté du Liban. Une manière de signifier aux Français que rien ne leur est acquis au Liban et qu’ils devront toujours compter avec les forces américano-israéliennes, vraies maîtresses du Moyen-Orient. La provocation de l’aviation israélienne est allée jusqu’à ouvrir le feu en direction d’un navire de guerre allemand, tout en larguant des leurres infrarouges pour se protéger d’éventuels tirs de missiles. C’est dire le degré de tension qui règne dans la région entre puissances occidentales. Non seulement l’offensive israélienne n’a pas atteint ses objectifs, elle a même provoqué une modification des rapports de forces, à l’avantage de la résistance, au Liban. En effet, les «patriotes en chambre», rassemblés dans un front dit «démocratique et anti-syrien», sortent affaiblis de cette offensive. Loin de pouvoir mobiliser leurs partisans, pour défendre la souveraineté du Liban, les formations majoritaires du gouvernement libanais ont dû se satisfaire d’un soutien verbal à la résistance du Hezbollah face à l’offensive de Tsahal. Par contre, le Hezbollah sort renforcé des 34 jours de résistance, confirmant du coup son statut de mouvement patriotique, et délégitimant ceux qui se sont dérobés face à l’ennemi. L’exigence actuelle du Hezbollah de modifier la composition du gouvernement libanais, afin d’acquérir plus de poids au sein d’un gouvernement d’union nationale, ne peut qu’être approuvé par la majorité des Libanais. Le renforcement politique du Hezbollah entraîne également celui de toutes les forces régionales (syrienne, iranienne,…) opposées à la domination américano-israélienne. L’Iran s’affirme chaque jour davantage comme une grande puissance régionale, dont l’influence est difficile à ignorer en Irak, au Liban et en Afghanistan; tandis que les Etats-Unis et l’OTAN s’enlisent chaque jour davantage dans les guerres d’agression contre les peuples de la région. Le «nouveau Moyen-Orient», rêvé par l’administration de G.W.Bush, suite à sa main-mise sur le Liban, est dorénavant repoussé au calendes grecques. Les tensions entre l’Amérique et la France quant au Liban et à l’Iran ont, elles, tendance à s’exacerber. La France commence à prendre ses distances et se met à «douter de l’efficacité de la Finul II». Le nouveau congrès américain sorti des urnes le 07 novembre tiendra-t-il compte de ces changements? Ou s’entêtera-t-il, comme le précédent, dans les erreurs du passé?

8.11.06

Communiqué n°3

Paix et Justice au Moyen- Orient
STRASBOURG le 30 octobre 2006
cpjmo@yahoo.fr

De la Géorgie à la Corée du Nord :
«on se calme», «on reste souple»

Septembre et octobre ont été deux mois «chauds» pour la diplomatie mondiale : la Géorgie, pays situé dans le Caucase, et la Corée du Nord, en extrême Orient, ont occupé le devant de la scène politique mondiale.

En apparence, rien ne lie ces deux pays, très éloignés l’un de l’autre. Pourtant, une chose les réunit : ils subissent un embargo et diverses pressions. La Géorgie est sous embargo économique, aérien, maritime et postal russe, tandis que les Etats-Unis ont imposé, via l’ONU, un embargo financier et technologique accompagné de fouille de navires à la Corée du Nord.
Les bouleversements géopolitiques de ces 15 dernières années ont conduit à la disparition du «Pacte de Varsovie» et à la pénétration américaine en Europe de l’Est. Parallèlement, l’OTAN, le bras armé de l’Occident, s’est installé en Europe Orientale, remplissant le vide laissé par l’écroulement de l’Union soviétique. Actuellement, les Etats-Unis disposent de 4 bases militaires en Roumanie, des bases en Asie centrale et comptent déployer des éléments de défense antimissile en Pologne, dirigés contre la Russie. L’Ukraine n’est plus une «chasse gardée» russe. Etant «démocratique», elle est devenue le théâtre d’affrontements entre l’Occident et la Russie. Avec Mikhaïl Saakachvili, la Géorgie a basculé dans le camp occidental. La Mer Noire s’est transformé en «Mer américaine» et l’étau se resserre autour de la Russie . L’Occident ne cache plus ses intentions belliqueuses à l’égard de la Biélorussie qui est demeurée dans le camp russe.
A défaut de pouvoir phagocyter la Russie, les Etats-Unis cherchent à affaiblir et à neutraliser cette puissance euro-asiatique, aux velléités mondiales.
Le rapprochement de la Géorgie avec l’OTAN est la goutte d’eau qui a fait déborder le vase russe. Poutine, réagissant violemment à l’avancée de l’OTAN dans son pré carré caucasien, a accusé la Géorgie de vouloir provoquer un «bain de sang» dans les régions séparatistes d’Abkhazie et d’Ossétie. La menace est on ne peut plus claire.
Tout cela rappelle le «Grand Jeu» anglo-russe du dix-neuvième siècle en Asie centrale, au cours duquel, pour fixer les troupes russes en Europe, les Britanniques se livraient à des provocations à la frontière polonaise.
Sur l’échiquier mondial, l’avancement du «pion» géorgien aurait-il pu provoquer une riposte nucléaire dans la péninsule coréenne? En tout cas, le message est clair : à une modification du rapport de forces dans le Caucase, suivra une modification du rapport de forces en extrême-Orient.
Dans ce bras de fer, les Etats-Unis, déjà mal en point en Irak, ont beaucoup à perdre. En effet, l’oléoduc stratégique Bakou-Ceyhan, qui expédie le pétrole de la mer Caspienne, passe par la Géorgie.
Toujours est-il que le voyage de Condoleezza Rice, la secrétaire d’Etat américaine à Moscou, le 21 octobre, a permis d’apaiser, pour le moment, les tensions. «La rhétorique doit vraiment se calmer. Je suis particulièrement attachée à ce qu’aucun discours n’encourage une provocation militaire dans les deux conflits gelés d’Abkhazie et d’Ossétie du Sud » a déclaré Condi.Rice, à des journalistes qui l’accompagnaient entre Pékin et Moscou (LM du 24/10/06). De son côté, M.Lavrov a appelé, samedi, les Etats-Unis et la Corée du Nord à «faire preuve de souplesse» et à régler leurs «problèmes financiers».
Bref, le pétrole doit couler et rien ne doit perturber son acheminement, si indispensable à l’économie mondiale, dominée par l’Occident. Maintenant, comme l’a dit Condoleezza Rice, «on se calme». Et on reprendra la question plus tard, peut-être au Moyen- Orient !!!

6.11.06

Communiqué n°2

Paix et Justice au Moyen- Orient
STRASBOURG le 20 octobre 2006
cpjmo@yahoo.fr


Le crépuscule du «Bush-isme»

A la suite de la défaite des USA au Vietnam et le recul de leur influence dans le monde, Jimmy Carter, président des Etats-Unis (1976-1980), avait mis au point une «nouvelle pratique» diplomatique: le combat pour les «droits de l’homme». Son objectif était de circonscrire l’offensive croissante de l’Union Soviétiques qui grignota la zone d’influence américaine.

Cette offensive pour les «droits de l’homme» à l’américaine constitua pour les opposants de certains pays d’Amérique latine ou d’Asie (Nicaragua, Iran) une occasion opportune de contester des régimes dictatoriaux soutenus par les Etats-Unis. C’est ainsi que le régime despotique du Chah d’Iran a pu être renversé par la révolution de 1979. Par contre, la «nouvelle pratique» de la diplomatie américaine fut fatale au camp soviétique (déjà mal en point) ; celui-ci a fini par s’écrouler.
Le combat pour les «droits de l’homme» a été largement exploité par les gouvernements qui ont succédé à l’administration Jimmy Carter, afin de justifier les bombardements, les guerres de conquête et autres renversements de régimes dans le monde. Les guerres les plus importantes furent les guerres des Balkans, les guerres du Golfe et de l’Asie centrale qui ont conduit à l’invasion- au nom des «droits de l’homme» !!!- de l’Afghanistan et de l’Irak. En résumé, les Etats-Unis se sont servi du combat pour les «droits de l’homme» afin de «supprimer» leurs concurrents réels du moment (Soviétiques) et potentiels et asseoir leur suprématie planétaire et unilatérale.
Parmi toutes les administrations post-Carter, celle de l’administration de G.W.BUsh a poussé le «bouchon» le plus loin possible, prétendant «démocratiser» tous les régimes dictatoriaux du Moyen-Orient, à commencer par l’Afghanistan et l’Irak qui ont été recolonisés. S’appuyant sur la théorie du «chaos constructif», l’administration de G.W.Bush a créé le chaos généralisé (en particulier en Irak) dont on ne connaît pas l’issue. Après trois années de guerre meurtrière, au cours de laquelle des centaines de milliers d’Irakiens ont perdu, et perdent chaque jour la vie, le constat est sans appel. «Le pays est au bord de l’abîme», a titré le quotidien indépendant de Bagdad, Al-Bayyan Al-Jadidah. «Américains et Britanniques nous ont conduits à ce point où la pire des options est devenue acceptable (…) Tandis que le pays est au bord de l’implosion» écrit l’éditorialiste Sattar Jabbar. Pour l’analyste Daniel Vernet : «Le programme de démocratisation connu sous le nom de Grand Moyen-Orient est un fiasco» (LM du 12/09/06).
En Afghanistan, la situation n’est pas meilleure. Après l’opération «Medusa» lancée par l’OTAN, la police, l’armée afghane et l’OTAN ont lancé l’opération «Wyconda Pincer» ; tandis qu’ à l’est, environ 7000 soldats afghans et américains lançaient une autre opération, «Mountain Fury» dans la région Paktika où le gouvernement afghan a perdu toute crédibilité. Après s’être inquiétée de «l’irakisation de l’Afghanistan», la France a annoncé qu’elle envisageait de retirer les 200 soldats de ses forces spéciales d’Afghanistan (LM du 18/10/06).
Le «nouveau manuel» de l’armée américaine indique avec justesse que : «Perdre sa légitimité morale signifie perdre la guerre (…) Plus on utilise la force, moins elle est efficace» !
Face à ce déferlement de discrédit et d’échec politique, force est de constater que «la politique étrangère américaine devra être redéfinie par le prochain président. Quel qu’il soit, républicain ou démocrate, il se trouvera devant une réalité que Georges W.Bush a largement contribué à façonner…» (Daniel Vernet- LM du 12/09/06). C’est ainsi que nous avons pu entendre le général Richard Dannatt, chef de l’armée britannique, contester la stratégie de Tony Blair et prôner le retrait des troupes britannique d’Irak.
Actuellement, une «folie» anti-américaine a saisi la planète, et même les hommes politiques européens. Un changement de cap diplomatique est, d’ores et déjà, évoqué outre Atlantique. C’est le crépuscule du «Bush-isme». C’est aussi le crépuscule du combat pour les «droits de l’homme» à l’américaine, entachés de guerres d’invasion, de bombardements, de sauvagerie (Guantanamo, Abou Graïb) et de sang.
Il est à souligner que le crépuscule du «Bush-isme» n’est pas encore le crépuscule de la puissance américaine.
Qu’y aura-t-il après? Pour perpétuer sa domination planétaire, quelle sera la prochaine «nouvelle pratique» de la diplomatie américaine? Le combat d’Al Gore, l’ancien vice-président démocrate, contre le «réchauffement climatique», va-t-il remplacer la politique de J.Carter, un autre démocrate? Toujours est-il que l’ex-vice président américain juge la «civilisation menacée». Un tapage médiatique planétaire a accompagné les premiers pas du nouvel Al Gore. C’est inquiétant. Pour des «raisons écologiques», faudra-t-il s’attendre à une nouvelle période d’interventions militaires et d’autres «guerres préventives» dans le monde? Dans certains milieux on se pose d’ores et déjà la question.