31.3.07

Communiqué n° 27

Paix et Justice au Moyen- Orient
STRASBOURG le 1er avril 2007
cpjmo@yahoo.fr


Le rêve de puissance du colonialiste britannique
et l’activation du «réalignement»!

Il fut un temps où le «Soleil ne se couchait pas sur l’Empire britannique». Depuis la fin de la deuxième guerre mondiale, ce temps est révolu. Mais, l’ancienne «super puissance» mondiale, ne voulait pas y croire.
Afin de retrouver sa place d’ancienne puissance mondiale, plusieurs tentatives militaires furent entreprises, dont celle conduisant, avec la France et Israël, à l’occupation du canal de Suez en 1956, après sa nationalisation par Gamal Abdel Nasser, chef charismatique de la République égyptienne naissante. Mais les menaces conjointes des Etats-Unis et de l’URSS mirent fin à l’aventure militaire des colonialistes crépusculaires franco-britannique.

En 2003, l’invasion illégitime de l’Irak par les Etats-Unis donna une nouvelle occasion aux colonialistes britanniques de retrouver, voire de «récupérer», ne serait-ce qu’une partie, de «leur» Mésopotamie et de «leur» Golf persique. C’était oublier que les temps ont bien changé.

Les pays du Moyen-Orient ne sont plus ce qu’ils étaient: arriérés, largement féodaux, tribaux, sans infrastructures développées, non instruits mais pillés sans vergogne et maintenus en sous-développement à l’aide des régimes soumis aux puissances occidentales «civilisées». Après la deuxième guerre mondiale, le développement social, économique et scientifique, quoique encore insuffisant, a transformé les pays du Moyen-Orient. Des régimes issus des coups d’état militaires ont contribué à transformer le paysage politique, social et scientifique des pays arabes de la région. Le développement du commerce et de l’industrie a contribué au renforcement de la bourgeoisie nationale anticolonialiste. Même s’il ne reste plus rien des régimes progressistes arabes, la culture anticolonialiste prédomine largement. Avec l’invasion de l’Irak, les américano-britanniques ont sous- estimé cette culture. Dès les premiers jours de l’occupation, les envahisseurs ont du faire face à la résistance acharnée des Irakiens. A peine quatre ans après l’invasion de l’Irak, l’unilatéralisme américain est en lambeaux et la question du retrait de l’armée américaine, la plus puissante du monde, se pose avec acuité. La Chambre des représentants et le Sénat américains ont adopté un projet de loi finançant la guerre, mais exigeant le rapatriement des troupes américaines pour 2008.

De son côté, l’armée britannique, discréditée et contestée dans son propre pays, se retire en douceur. «Blair ne quitte pas l’Irak parce que la mission est accomplie . Il part parce qu’il est arrivé à la conclusion qu’elle ne peut pas l’être (…) les Britanniques ayant même dû installer leur consulat à l’aéroport parce qu’ils n’arrivent plus à le protéger à Bassora.» dit le professeur Juan Cole, l’un des principaux spécialistes de l’Irak (Le Monde du 23/02/07). Quelle issue tragique! Le colonialiste britannique n’arrive même pas à assurer la sécurité d’une ville conquise.

Les temps ont bien changé, car des puissances régionales émergent et tiennent tête aux colonialistes. La capture de 15 militaires britanniques par la marine iranienne, humiliante pour l’ancienne puissance colonialiste, est le signal de l’émergence d’une nouvelle puissance dans le Golfe. Il semble évident que les marins capturés vont servir de monnaie d’échange lors des négociations entre l’Iran et la «communauté internationale».

A lire certaine presse occidentale, «L’Iran, s’il veut retrouver sa place au sein de la communauté internationale, n’a qu’une solution : le dialogue diplomatique et le respect des règles internationales.» (éditorial du journal Le Monde du 27/03/07).

Quelle est la nature de la «place» au sein de la «communauté internationale»? S’agit-il de la même «place» que celle occupée par les régimes saoudien, jordanien, pakistanais ou égyptien? Depuis la révolution de 1979, l’Iran a montré qu’il refuse d’occuper une place de marionnette au sein de la «communauté internationale». Parler de «respect des règles internationales» alors que les Etats-Unis, la Grande- Bretagne et Israël ne les respectent pas, relève, soit de l’ignorance soit de la malhonnêteté intellectuelle. Selon quelles «règles internationales» l’Irak a-t-il été envahi par les armées occidentales? Même le roi Abdallah, pourtant l’allié sûr des Etats-Unis, qualifie l’occupation de l’Irak d’«illégitime».

Le «respect des règles internationales» par tous les états du Moyen-Orient est vivement souhaité par les peuples de la région. Pourquoi ne pas commencer par appliquer la résolution 242 du Conseil de Sécurité qui statue qu’Israël devrait se retirer de tous les territoires occupés en 1967?

Actuellement, afin de faire de l’ombre à l’Iran, une campagne mondiale se déroule pour gonfler le rôle de l’Arabie saoudite dans le jeu moyen-oriental. Le sommet de la Ligue arabe des 28 et 29 mars 2007 à Riyad, est l’occasion de mettre en selle une «Sainte Alliance» nommée «réalignement». «Le professeur» Gary Sick, ex-membre du conseil de sécurité nationale américaine donne la définition suivante : Le «réalignement» vise à créer une alliance entre Israël et les sunnites modérés. «Les Ētats-Unis, Israël et les principaux états sunnites (NDRL: l’Ēgypte ,l’Arabie saoudite,…) sont d’accord sur une chose: l’Iran devient trop fort, trop menaçant, et il faut faire quelque chose», a-t-il expliqué à la radio publique NPR (Le Monde du 28-29/01/07). Autrement dit, «réaligner» toute la réaction moyen-orientale au service des intérêts géostratégiques et financiers des Ētats-Unis (Communiqué n°17- 11 février 2007). Les «réalignés» ont commencé par réactiver le plan de paix arabe proposé en mars 2002, lors du sommet de Beyrouth. Auparavant, pour casser l’unité syro-iranienne, M. Solana avait «travaillé» les Syriens. Il a répété à Damas que la Syrie appartient à «la famille arabe et euro-méditerranéenne», et non perse (Le Monde du 16/03/07).

L’échec du sommet arabe, dont l’objectif était de consacrer l’Arabie saoudite comme «principale puissance arabe», était écrit d’avance. L’envoi de deux délégations libanaises rivales à Riyad en dit long sur la «puissance fédératrice» saoudienne. Malgré l’accueil conditionnel du plan de paix du roi Abdallah par Israël, Le Monde du 29 mars 2007 annonçait à juste titre : «L’impasse israélo-palestinienne au sommet de Riyad.»

Toutes les tentatives des Etats-Unis pour briser l’élan émancipateur de la région et imposer leur «paix» au Moyen-Orient sont vouées à l’échec. Le recul de l’influence des Etats-Unis et de son allié britannique continuera et aucune «alliance» et autre «réalignement» n’arrêteront la marche de l’Histoire.

25.3.07

Communiqué n° 26 (le 25 mars 2007). La deuxième étape d'une guerre sans fin.

Paix et Justice au Moyen- Orient STRASBOURG le 25 mars 2007 cpjmo@yahoo.fr 

                                       La deuxième étape d’une guerre sans fin

9 avril 2003: la chute de Saddam Hussein, suivie de la conquête de l’Irak par les Etats-Unis, a enterré définitivement l’ancien ordre bipolaire, issu de la deuxième guerre mondiale, et a conduit à la naissance d’un «nouvel ordre mondial» unipolaire. Selon un scénario concocté par le pouvoir américain, la conquête de l’Irak devait conduire, par le biais de «contagion démocratique», à l’extension de la suprématie américaine dans le «Grand Moyen-Orient», et à l’absorption de l’Iran et de la Syrie. Le fiasco irakien mis un terme à ces «beaux projets» néo-colonialistes américains. Le 7 novembre 2006, lors des élections de mi-mandat, le peuple américain, las de la guerre, retira sa confiance à G.W.Bush et son clan. Cependant pour un observateur attentif de ces élections, il serait naïf:

1- d’occulter le conflit opposant les représentants du complexe militaro-pétrolier aux représentants de la haute finance liée à l’industrie civile (Brzezinski, Pelosi, chef de file démocrate à la Chambre des représentants et autre J.Carter), sensibles à l’image des Etats-Unis dans le monde. 2- de croire que les démocrates sont dépourvus de visées colonialistes. Les démocrates et les républicains peuvent diverger sur la méthode, mais ils sont d’accord pour maintenir, voire renforcer, la suprématie militaire et politique américaine. Si la guerre d’Irak représente la première étape de la nouvelle politique colonialiste américaine, la deuxième étape de cette politique a commencé le 7 novembre 2006, date des élections de mi-mandat. Son objectif consiste à affronter l’Iran, ses alliés syriens, libanais et les mouvements islamistes de libération nationale, qui ont le vent en poupe au Moyen-Orient. Pour l’instant, vu l’enlisement de l’armée américaine en Irak et l’opposition croissante du mouvement anti-guerre aux Etats-Unis et en Europe, le pouvoir américain, toutes tendances confondues, souhaite un «affrontement pacifique» (sanctions économiques et politiques) avec l’Iran, sans écarter l’affrontement militaire. Ceci ressort bien du projet de loi sur le «supplément budgétaire pour l’Irak et l’Afghanistan (…) Mme Pelosi a assorti ce projet de loi de crédits spéciaux en supprimant la clause interdisant au président toute action militaire contre l’Iran» (Le Monde du 20/03/07). Même en ce qui concerne les sanctions économiques, les américains ont définitivement perdu de leur superbe et n’arrivent plus à imposer leur choix aux Européens. Dans le nouveau projet de sanctions contre l’Iran, «des clauses financières, qui visaient à réduire les soutiens étatiques au commerce avec l’Iran, ont été abandonnées, notamment sous la pression de l’Allemagne, dont beaucoup de PME s’appuient sur ces garanties de crédit pour commercer avec l’Iran» (Le Monde du 17/03/07). Selon certaines informations, les Etats-Unis auraient proposé de partager le marché du nucléaire civil mondial avec la Russie, à condition qu’elle se désengage de la centrale de Buchehr (Iran). Le retrait annoncé des russes de Buchehr et l’annonce de la construction d’une centrale nucléaire au Maroc, traditionnellement un marché occidental, (Le Monde du 20/03/07) confirme le prix que les Américains sont prêts à payer pour asphyxier l’Iran. Sans vouloir minimiser le blocus économique, même mou, de l’Iran, il est à souligner que ce pays, vu ses réseaux au Moyen-Orient, reste encore un concurrent redoutable pour les Occidentaux. En effet l’importance d’un pays ne se limite pas à ses moyens militaires. La Russie, militairement plus puissante qu’à l’époque de l’Union soviétique, n’est plus qu’une puissance moyenne, du fait qu’elle a perdu ses réseaux d’influence dans le monde. Même les Etats-Unis, puissance militaire redoutable, n’ont plus la superbe d’il y a six ans, depuis leur fiasco irakien et bientôt afghan. La BBC a consacré le 17 mars 2007 une émission en langue persane à l’«influence grandissante de l’Iran dans l’économie irakienne». Selon la BBC, qui cite le New York Times, «les boutiques irakiennes sont remplies de produits iraniens, depuis les tomates jusqu’aux climatiseurs et des Peugeot blanches (tiens, tiens, le retour français en Irak par l’Iran interposé!- NDLR) de fabrication iranienne (…) les Iraniens investissent dans le secteur énergétique et Bassora achète de l’électricité à l’Iran». Le «Courrier international du 22 au 28 février 2007» rapporte: «le fabricant automobile iranien Khodro Iran vient d’y construire la première usine de construction automobile de Syrie». L’Iran compte investir dans une cimenterie, une verrerie, des silos à grain, une exploitation laitière et un nouveau système de transports public en Syrie. Il a construit des usines de fabrication de tracteurs et de voitures au Vénézuéla et compte y investir 9 milliards de dollars. Des usines de montage de voitures ont été édifiées en Azerbaïdjan et en Biélorussie. Les entreprises iraniennes de travaux publics participent à la reconstruction des infrastructures endommagées au Liban par Israël, lors de la guerre de juillet-août 2006. En s’appuyant sur l’ONU (qui pratique deux poids et deux mesures), les Occidentaux essaient d’imposer «un embargo sur l’exportation d’armes par l’Iran» (Le Monde du 17 mars 2007). Bref, qui dit percée économique, dit percée politique. Certains milieux politiques occidentaux souhaiteraient voir dans la contestation grandissante de la société civile iranienne des signes d’affaiblissement des positions de l’Iran vis-à-vis de l’Occident. Les femmes, les étudiants, les journalistes, les poètes, les écrivains, les cinéastes et autres intellectuels iraniens, se sont toujours battus courageusement, et continuent à se battre contre l’intégrisme et les lois moyenâgeuses de la République islamique. Le combat de la société civile continuera jusqu’à la victoire. c’est la loi de l’Histoire. Mais la contestation des milieux intellectuels ne signifie pas que la société civile soit prête à sacrifier la souveraineté nationale du pays. L’arrestation des marins britanniques par la marine iranienne et l’annulation du voyage du président iranien aux Nations-Unies, sont des signes d’une victoires des «radicaux» au sein de l’Etat. La «guerre sans fin» (affirmation de N. Pelosi- Le Monde du 21/03/07), caractérisant le conflit Iran- Occident, n’est pas près de se terminer; car les puissances occidentales ne renonceront pas à leur objectif d’asservissement des pays orientaux, face à un rapport de force politico-militaires, actuellement favorable à l’Iran et aux mouvements de libération nationale.

18.3.07

Communiqué n° 25

Paix et Justice au Moyen- Orient
STRASBOURG le 18 mars 2007
cpjmo@yahoo.fr

De la guerre froide à
l’équilibre de la terreur

De quoi ont peur les Etats-Unis? Ils sont la plus grande puissance financière du monde et la plus grande puissance militaire qu’a connu l’Humanité. Le budget de la défense américaine dépasse le PIB (richesse nationale produite) russe, la deuxième puissance militaire mondiale. Par ailleurs, les Etats-Unis sont épaulés par des puissances nucléaires, technologiques et financières comme la Grande-Bretagne, la France, l’Allemagne, le Canada, l’Australie ou Israël, presque tous équipés de missiles intercontinentaux, de navires de guerre et des sous-marins lance missiles les plus modernes. A eux seuls, les Etats-Unis et ses amis nucléaires totalisent des milliers de têtes nucléaires disséminées de par le monde. Ils ont des bases militaires un peu partout aux quatre coins du monde. Et pourtant, l’Iran, sans arme atomique, sans missiles intercontinentaux, sans moyens financiers capables de rivaliser avec ceux colossaux des Etats-Unis et de ses amis; cet Iran disposant d’une technologie militaire et civile moins développée que celle de l’Occident, fait «peur» aux Etats-Unis et à leurs amis. A tel point que l’«arrogance mondiale»- comme aiment l’appeler les Iraniens- représentée par les Américains, met tout en oeuvre, y compris les Nations-Unies et son Conseil de sécurité, pour faire plier l’Iran, qui ose défier la «communauté internationale», parce qu’il continue à enrichir de l’uranium à des fins civiles.

Ce n’est, donc pas la puissance financière, militaire ou technologique de l’Iran, une naine en comparaison du colosse occidental, qui inquiète l’Occident mené par les Etats-Unis. Le problème, il est ailleurs

Ce qui inquiète l’Occident depuis 1979, date de la victoire de la Révolution iranienne, c’est la révolte et la résistance de plus en plus acharnées de tout l’Orient, des pays arabo-musulmans, des peuples opprimés d’Amérique latine et de d’Afrique qui refusent sa domination colonialiste oppressante et humiliante qui bafoue la souveraineté des pays en perpétuant sa suprématie et en imposant sa Loi aux peuples et nations opprimés. Cette résistance est, bien entendu, inspirée par l’Iran qui montre la voie. A lire les informations concernant la «Grande offensive de l’OTAN» en Afghanistan, on apprend que «des centaines de combattants du Moyen-Orient, d’Afrique et d’Asie centrale s’y seraient joints aux talibans» (DNA du 07/03/07). De leur côté, les Américains, Britanniques, Français, Allemands, Japonais, Canadiens, Néerlandais, etc., sont sur le pieds de guerre pour «défendre» l’Afghanistan, «leur» butin. Une «guerre mondiale» en quelque sorte, au cours de laquelle les civils paient, malheureusement, un lourd tribu.

Ailleurs, la situation n’est pas plus calme. La tension ne cesse de monter en Somalie, au Maghreb, au Pakistan où les partis islamistes ne désarment pas en organisant des attentats suicides. Le mobile des attentats? «La haine des Américains » selon Ghulam Mohatarem, ancien général et ministre de l’Intérieur de la province de Sindh (Courrier international du 1er au 7 mars). Pour quelle raison l’écrivain Jonathan Littell, premier Américain à obtenir le prix Goncourt en novembre 2006, obtient-il la nationalité française? «On me refusait de plus en plus de boulots à cause de mon passeport américain, comme au Pakistan» avait-il expliqué pour justifier sa demande (DNA du 10/03/07). En Orient, la politique de G.W.Bush a ravivé le racisme anti-américain.

Les pays arabes du Golfe persique se sentent menacés par la montée de la contestation intérieure. En cas de «troubles sociaux» et faute de confiance dans l’armée nationale, la «sécurité» desdits pays sera assurée par les pays occidentaux (la France, la Grande-Bretagne, les Etats-Unis).

L’agitation révolutionnaire existait déjà à l’époque où l’Union soviétique jouait un rôle positif dans l’Histoire de l’humanité, avant son effondrement en 1991. Cette agitation prend des proportions plus importantes sous l’impulsion de l’idéologie islamiste, conservatrice et à l’antipode du communisme, mais accessible à une grande partie des masses musulmanes qui sont peu cultivées. D’autant plus que la contestation est inspirée par un pays dont le régime se réclame «République islamique», tenant tête aux Etats-Unis, symbole de l’oppression mondiale.

Si la «guerre froide» caractérisait l’époque où, face à la montée du communisme, l’Occident tentait de circonscrire l’«incendie révolutionnaire», notre époque sera caractérisée par «l’équilibre de la terreur», terme cher à certains stratèges israéliens. En effet, selon Ephraim Kam, «expert réputé des questions iraniennes à l’Institut national des études stratégique (INSS) de Tel-Aviv» (Le Monde du 07/03/07), en cas d’acquisition de la bombe atomique par l’Iran, un semblable «équilibre de la terreur» pourrait s’instaurer au Proche –Orient et l’Etat hébreu devra composer. Ce, d’autant plus que «le régime iranien n’a pas fait montre d’une propension à l’aventurisme militaire» (LM du 07/03/07).

Ce qu’oublie de préciser Ephraim Kam c’est que composer avec l’Iran ne suffira pas à ramener la paix aux colonialistes. L’Iran n’est qu’un maillon de la chaîne de la résistance à la suprématie américaine. Plus que d’avoir un caractère militaire, l’«équilibre de la terreur» a un fort caractère moral. En effet, le discrédit moral des colonialistes précède la résistance militaire des opprimés ainsi que la défaite militaire des colonialistes. C’est actuellement le cas. Même le général David Petraeus, le commandant en chef des forces militaires américaines en Irak, reconnaît le discrédit moral des Etats-Unis en Irak, en déclarant, le 8 mars, qu’«il n’y a pas de solution militaire au conflit en Irak

La domination de l’Orient par l’Occident a trop duré. La résistance à la suprématie américaine s’avère de longue durée. Tout porte à croire que cette résistance ira jusqu’à son terme, jusqu’à l’instauration de régimes politiquement indépendants dans tous les pays arabo-musulmans. Chaque aventure militaire américaine contre un pays oriental ne fera que précipiter l’échéance inéluctable de la libération anti-colonialiste.

L’avenir nous dira si la tenue d’une conférence internationale destinée à discuter des moyens de garantir la stabilité politique de l’Irak est le début de la «sagesse» américaine?

11.3.07

Communiqué n° 24

Paix et Justice au Moyen- Orient
STRASBOURG le 11 mars 2007
cpjmo@yahoo.fr

Manœuvres de division des
colonialistes au Moyen-Orient

L’Iran est particulièrement visé par les manœuvres de division des colonialistes américano-israéliens.

Le Moyen-Orient est une région très riche de sa diversité, de son histoire et de sa culture millénaire. Chaque pays de cette région, au carrefour du monde, est constitué d’une multitude d’ethnies et de religions. Selon les sociologues, c’est l’extrême vitalité historique de cette région qui a donné naissance aux trois religions monothéistes.

Les tensions ont toujours existé entres les diverses ethnies et adeptes de différentes religions, sans pour autant ébranler la cohésion millénaire de certaines contrées, caractérisées par une langue, une culture et une histoire communes, qui ont conduit, plus tard, à la formation de nations, au sens moderne du terme, comme la Turquie, l’Afghanistan, la Syrie ou le Liban.

L’apparition de la Grande- Bretagne en Asie centrale depuis 1809, a bouleversé la cohésion millénaire et pourtant fragile de cette région. Avant de quitter le sous-continent indien, la Grande- Bretagne avait encouragé la formation de deux pays sur une base purement religieuse, l’Inde et le Pakistan, ce dernier constitué en fait de deux pays, le Pakistan actuel et le Bangladesh, distants de deux milles kilomètres et unis simplement par l’islam. Faut-il rappeler que le Pakistan regroupe tous les «Indiens» de religion musulmane qui vouent une haine indescriptible aux indiens «impurs», donc non musulmans? Une haine et une division exacerbées et savamment encouragées par les colonialistes britanniques adeptes de la devise «diviser pour mieux régner»?

L’Histoire montre cependant que la politique colonialiste ne suit pas toujours la même logique.
Si l’intérêt des Britanniques a conduit au dépeçage du sous-continent indien en trois pays distincts (l’Inde, le Pakistan et le Bengladesh), une autre logique a conduit la Grande Bretagne à dessiner des pays comme l’Irak, le Koweït, l’Arabie saoudite, etc. dans les bureaux du Foreign office. L’Irak est, à ce titre, emblématique de la politique colonialiste qui avait réuni une mosaïque d’ethnies et de religions seulement grâce à la continuité territoriale. Avant de quitter l’Irak, les Britanniques avaient cédé le pouvoir aux sunnites arabes qui ne représentent que 20% de la population, alors que les chiites, ethniquement et politiquement hétérogènes, en constituent 60%.

Créé en 1747 et malgré ses multitudes d’ethnies, l’Afghanistan forme un pays avec toutes les caractéristiques qui lui sont propres: continuité territoriale, culture commune et langues de même origine indo-iranienne (Dari, persan, pachtoune, etc.). C’est en exacerbant les tensions interethniques que les Etats-Unis ont conquis l’Afghanistan dressant les Tadjiks, Ouzbeks et Hazaras contre les Pachtounes, ethnie majoritaire, formant traditionnellement la colonne vertébrale de l’Etat afghan. Ce qui a conduit les colonialistes américains à placer un Pachtoune servile, Hamid Karzai, à la tête de l’Etat afghan.

L’Iran, le plus vieux système politique du monde, n’est pas épargné par les tentatives de division des colonialistes. Pays centralisé depuis sa naissance il y a 25 siècles, l’Iran est constitué d’une multitude d’ethnies de mêmes origine, langue et culture. Contrairement à certains pays de la région, le pouvoir central en Iran n’est pas accaparé par une seule ethnie. Mais comme tout pays, il existe des régions qui sont moins développées (Kurdistan, Baloutchistan) que les autres. Ces régions, maillons faibles de l’Iran, sont visées par des manœuvres de déstabilisation américaines, britanniques et israéliennes. Lors de sa conférence du 25 février au Caire, Seymour Hersh, le célèbre journaliste du journal «The New Yorker» a révélé l’existence d’« opérations clandestines américaines menées en Iran mais aussi au Liban et en Syrie visant à déstabiliser l’Iran et à affaiblir le Hezbollah».

En Iran, les poètes, savants et héros originaires de Fars, d’Ispahan, de Khorasan et d’Azerbaïdjan constituent le ciment qui lie tout un peuple. Ils sont adulés et respectés par l’ensemble de la nation. Les héros nationaux modernes des Iraniens sont deux Azéris appelés Sattar Khan et Bagher Khan qui ont conduit la révolution constitutionnelle de 1906 à la victoire. Ils se sont battus contre la monarchie absolutiste de la dynastie des Kadjar, par ailleurs originaire d’Azerbaïdjan. Le mathématicien et poète qui a marqué l’Iran moderne est un autre Azéri appelé Professeur Hachtroudi. Les Azéris sont connus pour leur amour du pays et forment l’essentiel de l’armée nationale. Malgré toutes ces évidences, les colonialistes n’hésitent pas à opposer Perses et Azéris en créant de multiples «fronts de libération» azéris dont l’objectif serait la «libération» de l’Azerbaïdjan du «colonialisme» persan. Au dix-neuvième siècle la Russie tsariste, désireuse d’accéder aux «mers chaudes», avait réussi à arracher une partie de l’Azerbaïdjan iranien et l’Union soviétique avait essayé de parfaire l’œuvre des tsars en créant des «républiques soviétiques azéri et kurde» serviles, une espèce de «couloir» rapprochant la Russie du Golfe persique. La vigilance nationale et les conditions internationales aidant, les manœuvres de partition de l’Iran ont échoué.

Pour affaiblir le front intérieur iranien afin de faciliter la réussite d’une agression colonialiste en projet contre l’Iran qui leur résiste, les colonialistes américano-britanniques et israéliens reviennent à la charge et créent de toutes pièces des «fronts de libération» d’Ahwaz (chef lieu du Khouzistan, région pétrolifère), d’Azerbaïdjan ou du Kurdistan.

Il est à remarquer que les colonialistes et l’extrême droite européenne ont ceci de commun qu’ils «ethnicisent» les problèmes politiques: Français (patrons, ouvriers, salariés, commerçants,…) contre étrangers ; Alsaciens contre Parisiens; catholiques contre musulmans; chiites contre sunnites; indous contre musulmans, etc.

Sans vouloir minimiser les injustices sociales, les problèmes existentiels ou politiques dans un pays vaste comme l’Iran, il est important que les anti-colonialistes restent vigilants, ressoudent leurs rangs et ne se laissent pas entraîner, au nom des droits de l’homme amplement exploités par les colonialistes, dans des manœuvres de divisions ethniques ou religieuses qui favorisent les plans de domination américano-israéliens.

4.3.07

Communiqué n° 23

Paix et Justice au Moyen-Orient
STRASBOURG, le 4 mars 2007
cpjmo@yahoo.fr

Le chant du cygne de l’unilatéralisme

Quatre mois après les élections à mi-mandat (aux Etats-Unis) et à la surprise générale de tous les observateurs, la secrétaire d’Etat américaine, Condoleezza Rice a annoncé mardi 27 février la tenue d’une conférence internationale destinée à discuter des moyens de garantir la stabilité politique de l’Irak. L’Iran et la Syrie seront, en quelque sorte, les vedettes de cette conférence.

Premier constat: l’unilatéralisme a conduit les Etats-Unis et Israël dans l’impasse. La tenue de la conférence sur la stabilité en Irak c’est l’aveu implicite des Etats-Unis du fait que l’administration de G.W.Bush est source de chaos, d’insécurité, d’instabilité et qu’elle menace la paix mondiale en général et la paix du Moyen-Orient en particulier.

Deuxième constat et non des moindres : la reconnaissance explicite du rôle des acteurs régionaux, l’Iran et la Syrie, quant à leur capacité de garantir la stabilité et la sécurité du Moyen-Orient, surtout dans les zones les plus déstabilisées par l’intervention des américano-israéliens, la Palestine, le Liban et l’Irak. Cette conférence met en évidence le reflux de l’influence occidentale en général et américaine en particulier, au Moyen-Orient.

Ce début de virage est synonyme de victoire pour l’Iran qui, malgré les pressions de la «communauté internationale», au premier chef les Etats-Unis et l’Union européenne, a toujours refusé l’attitude «néocoloniale» et hautaine des occidentaux qui ne voulaient pas discuter avec l’Iran de la sécurité régionale avant la suspension de l’enrichissement de l’uranium. En effet, l’Iran participera à cette conférence sans avoir au préalable suspendu l’enrichissement.

Cette conférence est également la victoire de la Syrie qui se retrouve autour d’une table avec la France, l’ancien «gendarme» du Liban et qui l’avait boycottée. C’est également la victoire de la Russie qui, depuis longtemps, avait proposé en vain la tenue d’une conférence internationale sur l’Irak et le Moyen-Orient.

Finalement, ce virage confirme la montée en puissance de l’Orient et la naissance ou la renaissance de nouvelles puissances régionales et mondiales : la Russie, l’Iran et la Syrie.

Condoleezza Rice et son patron G.W.Bush ont appris à leurs dépens («on» leur a fait comprendre?) que leur obstination à ne pas reconnaître le changement de rapports de force qui est en cours au Moyen-Orient a conduit tout l’Occident et ses alliés dans une impasse. En effet, l’ère de l’unilatéralisme est révolue depuis longtemps et le monde multipolaire frappe à la porte. Selon le sénateur Harry Reid : «L’administration a raison de changer d’avis (…) Nous aurions dû faire cela il y a des années». Condoleezza Rice arrivera-t-elle à redresser la barre?

Il est à souligner que la «nouvelle initiative diplomatique» annoncée le mardi 27 février est une conséquence des marchandages et de l’évolution des rapports de force à Washington. Quelle sera l’ampleur du virage pris par l’administration de G.W.Bush? En effet, Condoleezza Rice est intervenue devant la commission des appropriations du Sénat pour défendre le supplément budgétaire de 3,2 milliards de dollars demandé pour l’Irak et l’Afghanistan (Le Monde du 1er mars 2007). Il s’agit sûrement d’un donnant-donnant qui régit les rapports entre le Congrès à majorité démocrate et la Maison Blanche. L’avenir dira si la «nouvelle initiative diplomatique» est un vrai changement de cap ou un simple effet d’annonce, un de plus pour satisfaire la base électorale du parti démocrate, majoritaire au congrès?

Quoi qu’il en soit, l’annonce même de la «nouvelle initiative diplomatique» et la convocation d’une conférence internationale le 10 mars en Irak sont, en elles-mêmes, un grand événement.

Il serait naïf de croire que les «choses» vont se régler rapidement. L’encerclement de la Russie suit son cours. Les porte-avions, sous marins nucléaires et autres navires de guerre américains sont toujours présents dans le Golfe persique et rien n’indique leur retrait. Par contre, afin d’exercer des pressions supplémentaires sur l’Iran et restreindre ses velléités de grande puissance régionale, les Etats-Unis risquent de renforcer leur potentiel militaire dans le Golfe. La répression des Palestiniens par l’armée israélienne continuera et d’autres colonies seront intégrées au territoire israélien. Le danger d’une grande guerre régionale reste toujours d’actualité. A leur tour l’Iran et la Syrie continueront de renforcer leur potentiel militaire. Même affaibli, le bras de fer de l’administration de G.W.Bush-Olmert avec le reste du monde continuera. La confiance fait cruellement défaut au Moyen-orient, car Bush et Olmert ont montré que le seul langage qu’ils comprennent est celui de l’agression, de la guerre et de la destruction.

Faut-il rappeler et insister sur le fait que l’accession de Mahmoud Ahmadinejad, représentant de l’aile radicale, rigide et très réactionnaire du clergé chiite, à la présidence de la république islamique d’Iran, la victoire du Hamas aux élections législatives palestiniennes, le renforcement des talibans en Afghanistan, sont autant de «réactions radicales» du Moyen-Orient à l’agressivité des américano-israéliens au Moyen-Orient? La tenue de la conférence internationale sur l’Irak sera perçue comme une victoire des radicaux islamistes en général et de la ligne prônée par Mahmoud Ahmadinejad en particulier.

Seul un changement à 180 degrés et définitif de la politique américaine, changement mené par des «hommes nouveaux», ouverts au dialogue, serait en mesure d’apaiser la tension dans cette région meurtrie et de sauver les meubles de l’Occident, très mal en point, dans la région.