18.1.07

Communiqué n° 14


Paix et Justice au Moyen- Orient
STRASBOURG le 21 janvier 2007
cpjmo@yahoo.fr



Le colonialisme «moralisateur»


Comme tout phénomène social, politique et économique, le colonialisme évolue et s’adapte à son environnement. Le colonialisme américain n’échappe pas à cette règle.

SON évolution récente comporte deux phases: la première remonte à l’époque de Jimmy Carter (1976-1980) qui, pour gommer la défaite américaine au Vietnam et contrer l’offensive de l’Union soviétiques, a mis au point une «nouvelle pratique» diplomatique: le combat pour les «droits de l’homme». C’est en son nom que le monde assista à la conquête de l’Afghanistan puis de l’Irak, pour répandre la «démocratie» et les «Droits de l’Homme» américains, avec les conséquences que l’on connaît : permanence de la violence et de la brutalité colonialistes (on parle de 650000 victimes irakiennes), scandale de la prison Abou Graïb en Irak, destruction des infrastructures irakiennes et afghanes, développement de la culture du pavot en Afghanistan, corruption galopante dans les pays conquis, guerre civile, vietnamisation de l’Irak et irakisation de l’Afghanistan, etc.

AFIN de poursuivre ses guerres colonialistes, contestées au sein même des Etats-Unis, l’administration Bush a mis au point une «nouvelle pratique»: «moraliser» l’occupation. C’est la deuxième phase de l’évolution du colonialisme américain. L’«honneur» de la «moralisation» revient au général David Petraeus, successeur du général George Casey, co-auteur du nouveau manuel antiguérilla définissant la doctrine de l’armée américaine pour combattre l’insurrection. Selon le nouveau manuel: «Une opération militaire qui tue cinq insurgés est contre- productive si les dommages collatéraux conduisent au recrutement de cinquante autres.» Ou encore: «perdre la légitimité morale revient à perdre la guerre.» En tout, 241 pages de «leçons de morale» s’adressent aux militaires américains. Reste à savoir si, même «moralisateur», le colonialisme arrivera à s’imposer à un peuple avide de son indépendance, de sa souveraineté, de sa liberté et de sa dignité? Il est certain que l’Histoire répondra, une fois de plus, par la négative.

EN plus de certains généraux de l’armée américaine, la «nouvelle stratégie» guerrière de l’administration de G.W.Bush soulève le scepticisme des milieux politiques américains et européens. L’Amérique n’a-t-elle pas déjà perdu sa légitimité morale, donc la guerre?

Tensions franco-américaines et divergences franco-allemandes


SUR le Moyen-Orient, les «leçons de morale» du nouveau commandant sur le terrain des troupes américaines en Irak n’arrivent pas à apaiser la tension entre Paris et Washington. A l’occasion des vœux du corps diplomatique, Jacques Chirac a critiqué l‘«aventure» irakienne de Washington qui a «fragilisé la stabilité de la région».

TOUT indique que la persistance du chaos en Irak et de l’instabilité au Moyen-Orient, suite à l’intervention américaine, a des conséquences sur l’unité européenne et touche désormais l’amitié franco-allemande. En effet, début janvier 2007, en visite officielle aux Etats-Unis, la chancelière allemande, Angela Merkel, sans en informer l’Elysée, a obtenu un accord de principe de G.W.Bush pour la convocation prochaine d’une réunion du Quartet sur le Proche-Orient.

DE son côté, les responsables allemands n’ont pas été consultés lors du lancement d’une «initiative commune» France-Espagne-Italie, appelant à la tenue d’une réunion internationale sur le Proche-Orient.

IL est à souligner que Paris et Berlin s’opposent également sur l’attitude à adopter à l’égard de la Syrie. Alors que Chirac boycotte le régime syrien, Berlin a envoyé à Damas, en décembre, le chef de la diplomatie allemande, Frank-Walter Steinmeier.


S’AGIT-IL d’un lâchage de Paris par Berlin qui, pour obtenir de nouvelles zones d’influence au Moyen-Orient, se serait rapproché du couple Etats-Unis-Israël, actuels maîtres des lieux ? La campagne anti-iranienne menée actuellement en Allemagne, serait-elle en rapport avec le rapprochement Allemagne-Etats-Unis- Israël?

LA «moralisation» du colonialisme est le symptôme d’une crise profonde qui secoue toute la classe politico-militaire américaine quant à la poursuite des guerres colonialistes au Moyen-Orient. Pour Ted Kennedy, sénateur démocrate, «L’Irak est le Vietnam de George Bush.» Il y a également crise en Israël où le premier ministre, rattrapé par la justice israélienne, est contesté par les siens. Il y a enfin crise au sein de la «coalition», où Britanniques et Polonais veulent réduire leurs troupes tandis que l’Australie ne les augmente pas.

LES « leçons de morale» du colonialiste américain et l’envoi de troupes supplémentaires en Irak traduisent le refus des Etats-Unis d’accepter la modification des rapports de forces qui se profile dans l’intérêt des nations du Moyen-Orient, dont la souveraineté est violée, depuis deux siècles, par les anglo-américains. Dans leur refus, les Etats-Unis iront-ils jusqu’à embraser toute la région et à étendre la guerre à l’Iran et à la Syrie?

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