Paix et Justice au Moyen-Orient
STRASBOURG, le 15 avril 2007
Loin du Détroit d’Ormuz
La contestation se développe au «Grand Moyen-Orient» : l’après Bush se profile à l’horizon !
Avec l’Iran, les Etats-Unis poursuivent deux objectifs : garantir la circulation des marchandises et surtout du pétrole (14 millions de barils par jour) par le Détroit d’Ormuz. Le pétrole, source d’énergie et de richesse, est une «marchandise» hautement stratégique. Pour son développement, l’Iran a besoin de vendre son pétrole, tandis que l’Occident, pour sa consommation énergétique, a besoin du pétrole en provenance du Golfe persique. Sur cette base, un accord tacite existe entre l’Iran, les Etats-Unis et les pays gros consommateurs de pétrole (l’Union européenne, le Japon, la Chine,…).
Dans le passé, l’Iran et l’Occident avaient coopéré dans d’autres domaines stratégiques. Avant l’invasion de l’Afghanistan, Jack Straw, ministre des affaires étrangères de Grande-Bretagne, s’était rendu en Iran pour s’assurer du soutien de ce pays. Afin de permettre l’acheminement des troupes en Asie centrale ou pour des manœuvres militaires, l’Iran avait mis un couloir de son espace aérien à la disposition de l’aviation américaine.
Afin d’assurer leur suprématie planétaire, les Etats-Unis veulent dominer politiquement l’Iran, comme ils l’ont fait avec tous les pays du Moyen-Orient, mis à part la Syrie.
Cependant, pour des raisons militaires et économiques, une attaque militaire contre l’Iran paraît actuellement fort improbable.
Militairement, l’armée américaine s’enlise chaque jour davantage en Irak, où elle est attaquée dans son fief ultra protégé de la «zone verte» au cœur de Bagdad, et rien ne permet de prévoir une «sortie heureuse» du bourbier irakien. La situation n’est pas meilleure en Afghanistan où attentas-suicides, enlèvements de citoyens occidentaux, embuscades contre les troupes étrangères, exécution d’otages se succèdent. A tel point que l’éditorialiste du journal Le Monde s’alarme : «Les nouvelles en provenance de Kaboul sont mauvaises» (Le Monde du 10/04/07). Mauvaises pour qui? Sûrement pas pour les patriotes, les nationalistes, les communistes, les laïcs et autres «djihadistes» afghans, colportant une idéologie d’un autre âge, qui défendent leur pays contre l’invasion étrangère.
Faut-il rappeler qu’aucune cause, si louable soit-elle, ne peut justifier des attentats contre des civils innocents.
Suite au fiasco américain en Irak et en Afghanistan, la contestation se développe au «Grand Moyen-orient». Vassalisée par l’armée éthiopienne, soutenue par les Etats-Unis, la Somalie qui occupe une position hautement stratégique dans la Corne de l’Afrique et au bord du Détroit de Bâb al Mândab, voit sa situation empirer. L’agitation, accompagnée d’attentats-suicides, gagne désormais certains pays arabo-musulmans comme le Maroc, une des rives du Détroit de Gibraltar, considéré jadis comme un «îlot de paix» pour les touristes américains et européens.
Malgré les censures imposées aux médias, la situation n’a jamais été calme en Algérie, pays qui vient de subir un attentat à la voiture piégée devant l’entrée, pourtant ultra-sécurisée du «Palais du gouvernement» à Alger. Ceci, au moment même où se déroule une opération militaire d’envergure en Kabylie.
«Les monarchies de Jordanie et d’Arabie saoudite, alliées des Etats-Unis, sont menacées de déstabilisation par une idéologie salafiste et anti-occidentale, qui gagne toute la région» écrit Patrice Claude, dans Le Monde du 11/04/07.
Irak, Afghanistan, Somalie, Maroc, Algérie,…l’après Bush se profile déjà au «Grand Moyen-Orient» ! Tout porte à croire que le mouvement de résistance à la «Pax americana» se développera et touchera tous les pays dont les gouvernements corrompus ont sacrifié leur souveraineté politique sur l’autel des puissances occidentales, menées par les Etats-Unis.
De son côté, le conflit entre l’administration de G.W.Bush et le Congrès américain, à majorité démocrate, sur le financement des troupes en Irak, dure depuis plus de deux mois. C’est James Baker, après avait proposé le retrait d’Irak, qui est intervenu en conciliateur et a plaidé pour un rapprochement entre la Maison Blanche et le Congrès. (Le Monde du 10/04/07).
Dans un tel contexte de mécontentement, de résistance, d’enlisement grandissant au «Grand Moyen-Orient» et d’impasse diplomatique, quels seraient l’intérêt et la marge de manœuvre des Etats-Unis pour intervenir en Iran? En parlant des missiles surface-surface super soniques, du SS-N-22 ou des SS-NX-26 Yakhont, dont dispose la marine iranienne, Mark Gaffney, Information Clearing House, Californie (cité par «Courrier international» du 4 au 11 mai 2005) écrit : «Et le Golfe devint un champ de mort». Il poursuit : «Si les Etats-Unis attaquaient l’Iran, leur flotte pourrait subir le plus grave revers de son histoire.» De son côté, Patrice Claude, écrit à juste titre dans Le Monde du 11 avril 2007: «La guerre en Irak (…) a «fixé» 160000 soldats à portée des canons iraniens.»
Sans vouloir comparer les puissances militaires des États-Unis et de l’Iran ou compter le nombre de missiles et leurs performances respectives, force est de constater qu’une attaque de l’Iran demanderait un autre «climat politique», d’autres dispositifs et, par ailleurs, comporte d’autres risques, beaucoup plus importants, que ceux qui ont conduit à l’invasion de l’Irak. D’autant plus que pendant la durée de l’affrontement, il faudrait se passer du Détroit d’Ormuz, que l’Iran, en l’occurrence, ne manquerait pas de bloquer.
Les milieux pétroliers, financiers et industriels, sont-ils prêts à accepter un tel risque? L’étude des guerres au Moyen-Orient depuis 1991, montre que ces guerres avaient eu lieu loin du «Détroit d’Ormuz» : à savoir la première guerre d’Irak, la guerre d’Afghanistan, la deuxième guerre d’Irak et la guerre du Liban de juillet-août 2006.
«Assurer l’ouverture du Détroit d’Ormuz», soutenir les «régimes arabes amis» et contenir la «menace iranienne», sont autant de motifs avancés par l’armée américaine pour justifier sa présence dans le Golfe persique.
Ceci n’empêchera pas les Américains de fomenter des complots contre la souveraineté iranienne par l’intermédiaire des «fronts de libération» azéri, kurde, baloutche bidons, aux quatre coins de l’Iran.
La pression exercée par les Etats-Unis sur le programme nucléaire de l’Iran est une autre tentative pour faire plier l’Iran. Or le programme nucléaire est considéré par l’Iran comme une prérogative de sa souveraineté, alors qu’il est entouré de têtes nucléaires «amies» des Etats-Unis. De son côté, l’Iran vient d’annoncer la mise en place de plusieurs milliers de centrifugeuses. Une chose est sûre : la pression extérieure aura pour conséquence de radicaliser l’Iran et ceci indépendamment de la nature de son gouvernement. Face à l’agressivité des puissances occidentales qui se croient les maîtres du monde, un gouvernement iranien qu’il soit laïc, communiste ou nationaliste adopterait la même attitude.
Le chant du cygne de l’unilatéralisme sera-t-il celui du colonialiste américain?
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