Paix et Justice au Moyen-Orient
STRASBOURG, le 11 mai 2008
L’avenir du Moyen-Orient
se joue au Liban
La résistance libanaise a un caractère révolutionnaire !
Depuis fin mars 2008, l’armée américaine est passée à l’offensive contre la résistance anticolonialiste au Moyen-Orient, d’abord en Irak, contre l’armée du Mahdi, puis au Liban début mai.
Le signal de la deuxième offensive a été donné par Walid Joumblatt, figure de la «majorité politique libanaise» et chef du «Parti socialiste progressiste» (PSP), qui, dans une déclaration réclama : «la destitution de l’officier responsable de la sécurité de l’aéroport de Beyrouth, Walid Choucair, ainsi que l’expulsion de l’ambassadeur de la République Islamique d’Iran.» (Le Monde du 06/05/08).
Afin de marquer au fer rouge la soit disante «collusion» entre le Hezbollah libanais, l’Iran et la Syrie, il est de pratique courante d’attaquer la résistance libanaise en même temps que l’Iran et la Syrie.
Faut-il voir un rapport de cause à effet entre la quinzième visite de Condoleezza Rice au Moyen-orient et l’offensive contre la résistance libanaise? En effet, l’étude de la diplomatie américaine montre que chaque visite de Condoleezza Rice ou de George Bush au Moyen-Orient se traduit par la montée des tensions régionales, voire des agressions contre les anticolonialistes.
Il est une autre pratique de la presse occidentale, celle de conférer un caractère confessionnel aux combats anticolonialistes : «Chiites et sunnites s’affrontent au Liban» (Mouna Naïm- LM du 09/05/08). Alors qu’aussi bien dans le camp de la «majorité politique libanaise» que celui de la résistance, toutes les confessions du pays sont représentées. Qu’aurait dit Mouna Naïm de l’opposition De Gaulle- Pétain? Chrétien contre chrétien? Ou un patriote contre un collaborateur de l’occupant nazi ? Pour quelle raison certains journalistes escamotent (consciemment?) le caractère anticolonialiste du combat mené par l’opposition irakienne, afghane et libanaise?
Toujours est-il que, dans l’impasse (en Irak, en Palestine, en Afghanistan) et en fin de règne, la seule logique que connaît l’administration Bush au Moyen-Orient est celle de la poursuite des affrontements armés. «Les Etats-Unis envisagent d’envoyer 7000 soldats supplémentaires, en 2009, en Afghanistan» (AFP, cité par LM du 06/05/08). La nomination du général Petraeus, homme de confiance des va-t-en-guerre, au poste de chef des forces américaines pour le Moyen-Orient et l’Asie centrale (Centcom), signifie l’intensification des combats au Moyen-Orient, qui marquera, entre autres, la fin de règne de la clique au pouvoir à Washington.
D’aucuns se demandent pourquoi, malgré tant d’échecs et de dépenses militaires (rien que 3 milliards de dollars par semaine en Irak !) l’administration Bush insiste- t-elle à s’acharner au Moyen-Orient, au prix de s’y enliser chaque jour davantage? La raison est, avant tout, d’ordre militaire. «La guerre n’abandonne jamais un espace qu’elle a conquis» (Vincent Desportes- Commandant du centre de doctrine d’emploi de forces (CDEF) du ministère de la défense- LM du 27-28/04/08).
A entendre les militaires américains, ils n’auraient pas perdu la guerre du Vietnam. Ce sont les diplomates qui l’ont perdue! La même «logique» prévaut actuellement à Washington. La clique militaro-industrielle au pouvoir aux Etats-Unis se battra jusqu’à la dernière cartouche, payée par le contribuable américain. L’administration Bush sait bien que les choses peuvent changer après les futures élections présidentielles. C’est pourquoi elle envisage de marquer un maximum de points avant de céder sa place à la prochaine équipe susceptible d’impulser un changement de cap à la diplomatie américaine au Moyen-Orient.
Parallèlement à la poursuite des combats contre l’armée du Mahdi en Irak, un nouveau front vient donc de s’ouvrir au Liban. Comme nous l’avons écrit dans l’analyse 10 : «Depuis l’été 2006, les Américano- israéliens ne sont victorieux dans aucun conflit. Après son échec au Liban, l’armée israélienne n’a pas atteint son objectif d’éradiquer le Hamas en Palestine. Les «négociations de paix» sont factices. Les Américano- israéliens ne sont plus en position de force et la tempête pourrait se transformer en ouragan». Ce qui se passe sous nos yeux au Liban, confirme notre analyse.
Contrairement à l’armée du Mahdi, qui représente une fraction de la résistance irakienne, le Hezbollah libanais a réussi à unifier l’opposition libanaise qui jouit, de ce fait, d’une aura et d’un avantage certains. Bien équipée et aguerrie, l’opposition libanaise pourrait facilement obtenir, à la suite de cet affrontement, ce qu’elle n’a pas obtenu pacifiquement: à minima, le partage du pouvoir et, à maxima, le renversement de la clique pro-occidentale au pouvoir à Beyrouth.
L’actuel affrontement au Liban montre une fois de plus la myopie des colonialistes et de leurs obligés locaux. Quoique consciente du rapport de forces favorable à la résistance, la «majorité politique libanaise», au lieu de chercher un compromis, a préféré suivre les recommandations de Bush- Condoleezza Rice et passer à l’offensive. La résistance libanaise n’en sortira que renforcée.
L’affrontement actuel au Liban revêt une importance cruciale pour tout le Moyen-Orient et pour l’humanité. En effet, depuis la révolution constitutionnelle et anticolonialiste de 1906 en Perse, la lutte anticolonialiste, pour la souveraineté politique, nationale et l’intégrité territoriale, a un caractère révolutionnaire. Nous pouvons même parler de la «Révolution libanaise» en cours.
En cas de victoire, cette révolution ne laissera pas indemne l’ensemble de la région. La Palestine en sera le premier bénéficiaire. Les régimes arabes fantoches devraient préparer leurs valises.
En attendant, l’administration Bush qui avait anticipé la déflagration, a dépêché ses navires de guerre, dont USS Cole au large du Liban (LM du 06/03/08). L’intervention des Américano- sionistes aux côtés de la «majorité politique libanaise» n’est pas à exclure. Le roulement de tambours à l’Est de la Méditerranée se fait de plus en plus pressant.
La restitution à l’armée des quartiers conquis de Beyrouth montre que, consciente des enjeux géopolitiques, la résistance libanaise calcule bien ses coups à l’avance et marche à pas feutrés.