Paix et Justice au Moyen-Orient
STRASBOURG, le
5 mai 2014
Le
sort polonais de l'Ukraine
Au
cours de l'histoire, les frontières des pays européens n'ont jamais cessé de
bouger. Des puissances continentales se sont formées, puis décomposées;
puissances qui partageaient des territoires et des peuples en fonction des
rapports de force entre elles.
Après la première guerre mondiale, la Tchécoslovaquie, la Hongrie, la Pologne, les Pays baltes sont créés en Europe centrale,
au nom du principe des nationalités et en particulier du fait du démembrement
de l’empire austro-hongrois. Lesdites nouvelles nations intégraient des régions
peuplées majoritairement de minorités linguistes ou ethniques qui, plus tard,
ont servi d'alibi à de futures interventions militaires.
Un seul exemple: Les 29
et 30 septembre 1938, Hitler, poursuivant
ses objectifs pangermanistes et se
faisant alors le champion du principe des nationalités, déclare vouloir
« libérer les Allemands des Sudètes » de l'« oppression »
tchécoslovaque.(1)
Suite aux accords de Yalta après la
seconde guerre mondiale et à la naissance de deux pôles de puissances
mondiales, américaine et soviétique, une fragile stabilité a vu le jour aux
frontières des Etats européens, habitués à convoiter les territoires des
voisins hébergeant une minorité de même langue ou culture que la leur.
A l'époque, les soviétiques et leurs
alliés communistes avaient le vent en poupe. Les dictatures d'Amérique Latine
et d'Asie étaient soutenues par le camp occidental, dirigé par les Etats-Unis,
empêtré dans des guerre colonialistes en Algérie, en Indochine, en particulier
au Vietnam. Les révolutionnaires anticolonialistes s'appuyaient sur l'Union
soviétique, grand vainqueur du nazisme.
La défaite du colonialisme Français
en Algérie suivie de celle des Etats-Unis au Vietnam entraina le changement de
tactique des puissances occidentales: celles-ci optèrent pour la "défense
des Droits de l'Homme" afin de contrer l'ascension fulgurante du camp
soviétique qui jouissait de la sympathie des peuples opprimés et qui grignotait
du terrain en Afrique au détriment des puissances occidentales. Moscou s'est
même offert l'Afghanistan, pays qui devait pourtant servir de tampon afin de
séparer les forces occidentales et russes.
L'effacement de l'Union soviétique,
suite à son effondrement, ouvrit un boulevard devant les Etats-Unis et ses
alliés (Britanniques, Français, Allemands) qui ont saisi l'occasion pour
remettre en cause les frontières géographique et politique de l'Europe,
provoquant une période d'instabilité qui a cours jusqu'à nos jours. Et ce au
nom de la "défense des Droits de l'Homme", perçue favorablement par
les peuples et nations qui ont longtemps souffert - et certains continuent à
souffrir encore - de l'arbitraire des gouvernants.
Il est à souligner que la "défense
des Droits de l'Homme" n'a jamais empêché les puissances occidentales de
continuer à agir sur la scène internationale comme elles le faisaient
auparavant. L'invasion violente de l'Afghanistan, propagation de mensonges à
propos d'armes de destruction massive du régime dictatorial de Saddam Hussein
puis l'invasion sans mandat des Nations-Unies de l'Irak et son cortège de
violence colonialiste sur le sol irakien - la torture et les mauvais
traitements dans la prison d'Abou Ghraib - le soutien aux régimes dictatoriaux
comme ceux des pays arabes du Golfe Persique, du Yémen, de l'Egypte, les
provocations de certaines ethnies des pays Moyen-Orientaux contre le pouvoir
central, l'intrusion dans l'espace aérien des pays souverains afin de commettre
des assassinats ciblés, le soutien indéfectible à Israël qui ne respecte pas le
droit international, se poursuivent comme avant.
Ainsi, "au delà des conflits
officiels en Afghanistan et en Irak, la guerre américaine est "une guerre planétaire en secret et en toute
liberté" (...) "le
programme de capture et d'assassinat du gouvernement américain est en pleine
expansion" depuis l'élection de Barack Obama"(2) Prix
Nobel de la Paix!!! Qu'aurait fait le commun des mortels si on décernait le
Prix Nobel de la paix à Vladimir Poutine?
Jeremy Scahill, journaliste de The Nation s'attaque, dans Dirty Wars. Le nouvel art de la guerre (en librairie le 6 mai), au cœur du
pouvoir de la première puissance du monde. Selon lui: "Chaque mardi, le
président américain décide, sur la base de listes établies par le JSOC [Joint
Special Operations Command] et la CIA, quels individus sur la planète seront
assassinés. Pour être désigné comme "cible",
nul besoin d'avoir attaqué ni menacé les Etats-Unis. Il suffit d'être "présumé terroriste", ou militant
d'une organisation jugée "ennemie".
A Washington, certains ont baptisé ces réunions les "mardis de la terreur". Le Maison Blanche "agit à la fois comme procureur, juge et jury"
écrit Scahill. Outre l'Afghanistan, où l'armée américaine est toujours
officiellement déployée, trois pays sont particulièrement visés: le Pakistan,
le Yémen et la Somalie (...) Une pluie de missiles tirés par des drones de
combat s'est abattue sur ces pays, tuant aussi des milliers de civils*, amplifiant la haine de l'Amérique...(2)
Pourtant, la "défense des Droits
de l'homme" prônée par les puissances occidentales, met la Russie et ses
alliés, dont l'Iran, sur une position défensive. Que propose la Russie? Rien
qu'un régime autoritaire où les Droits de l'Homme sont bafoués au vu et au su
de tout le monde. Que propose l'Iran? Un régime théocratique moyenâgeux,
rétrograde et misogyne. Les atrocités commises par les "djihadistes"
bornés et obscurantistes ont fini par ternir à jamais l'image d'un Orient,
incapable de faire des propositions alternatives attrayantes et crédibles à
l'aune du vingt et unième siècle. Les Lumières tardent à rayonner en Orient.
Les peuples et nations opprimés du
monde sont attirés par l'Occident opulent, maître des finances mondiales et ses
promesses de respect des Droit de l'Homme - même s'il ne s'agit que de
promesses - plutôt que l'Orient antioccidental qui promet l'enfer autoritaire.
Les puissances occidentales et
orientales s'affrontent soit militairement (Syrie, Irak, Afghanistan, ...) soit
par ONG [Organisation Non Gouvernementale] interposées.
C'est le cas des clashs en Géorgie ou
en Ukraine où les ONG occidentales ou russes s'affrontent sans pitiés, en
mobilisant la population. Les unes s'appuient sur la "défense des Droits
de l'Homme", tandis que les autres mettent en avant la défense de la
langue et culture russes ou la lutte "antifasciste".
Tout porte à croire que l'instabilité
créée suite à l'effondrement de l'Union soviétique se poursuivra jusqu'à la
création d'un nouvel équilibre des forces. Actuellement, la Russie est à
l'offensive. L'Iran, qui représente un système politique islamique plus modéré,
voir même moderne, par rapport au régime saoudien complètement médiéval, est
également à l'offensive au Moyen-Orient. Les bases américaines et celles de
l'OTAN en Europe orientale et en Asie centrale représentent une sérieuse menace
pour la sécurité du territoire et des régimes russe et iranien. Leur
démantèlement suite au recul de l'influence occidentale dans le pré carré russe
devrait faire partie d'un nouveau marchandage, une sorte de Yalta II, dans un
avenir lointain.
En attendant, la poussée vers l'Est
des puissances occidentales - menées par les Etats-Unis - sur l'Ukraine est
contrebalancée par la poussée vers l'Ouest des Russes. Cela rappelle le partage
de la Pologne suite au pacte germano-soviétique, signé le 23 août 1939 entre le
IIIe Reich et l'Union soviétique. Les forces soviétiques envahirent
l'Est de la Pologne en septembre 1939. Y a-t-il un accord tacite de partage de
l'Ukraine entre les Etats-Unis et la Russie? La progression des
"pro-russes" dans l'est de l'Ukraine nous dira davantage sur le
contenu du pacte américano-russe de partition de l'Ukraine.
(1) Wikipedia.
(2) Rémy Ourdan - Le Monde des livres du 02 mai 2014.
*Phrase en gras par nous.
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