22.9.14

Analyse 18 (2014): Les djihadistes, force de frappe des américano-saoudiens

Paix et Justice au Moyen-Orient

STRASBOURG, le 22 septembre 2014

                                  
                                           
Les djihadistes, force de frappe des américano-saoudiens

  • L'Arabie saoudite est le pays formateur et fournisseur officiel des troupes de tueurs djihadistes dans le monde !

Vers les années 1980 -2000, on les appelait djihadistes arabes, apparus en péninsule arabique, au Yémen, arrivés en Afghanistan dans le "sac à dos" de Ben Laden, lieutenant wahhabite, le djihadiste en chef, formé dans les écoles coraniques militarisées saoudiennes qui transformèrent le wahhabisme en théologie de consolidation d'un pouvoir obscurantiste et moyenâgeux en Arabie saoudite, puis en instrument de reconquête territoriale au service des Etats-Unis d'Amérique.

L'Afghanistan, passé sous contrôle de l'Union soviétique, "empire du mal", selon Ronald Reagan, ancien président américain, était la cible. La reconquête commença avec l'aide des talibans, "étudiants" formés également dans les écoles coraniques militarisées pakistanaises, "écoles" subventionnées par l'Arabie saoudite. Les Etats-Unis ont armé généreusement lesdits "écoliers".

Caractéristiques particulières des djihadistes arabes et afghans, formés par les mollahs wahhabites ? Ils étaient - et sont toujours - nihilistes, obscurantistes, moyenâgeux et violents. Pour les djihadistes, la mort est un visa d'entrée au paradis. Surprise: après la reconquête de l'Afghanistan, les djihadistes arabes et talibans se sont retournés contre leurs créateurs, qualifiés également d' "impies".

Qu'importe. Les djihadistes wahhabites - moins organisés et moins puissants que les soviétiques - caractérisés par les médias de monstres incontrôlables, furent vite délogés d'Afghanistan par les Etats-Unis et ses alliés qui occupent toujours l'Afghanistan, pays charnière, frontalier des puissances rivales des Etats-Unis. Ce qu'on appelle, en économie, "retour sur l'investissement". En effet, la formation et l'entretien des djihadistes ont un coût, "amorti" lors de la récupération de l'Afghanistan !

Depuis, l'amitié djihadiste scellée entre les Etats-Unis et l'Arabie saoudite continue à fonctionner. Car la réaction obscurantiste moyen orientale, djihadiste ou pas, convient bien aux puissances occidentales en général et aux Américains en particulier.

Lorsqu'un nouveau front s'est ouvert en Syrie, les puissances occidentales s'y sont engouffrées et, fortes de l'expérience afghane, y ont répandu le poison djihadiste. Avec cette différence qu'il y avait, cette fois-ci, deux courants djihadistes: le front Al- Nosra, affilié à Al Qaida, bête noire de l'Occident, et l'Etat Islamique en Irak et au Levant (EIIL), transformé en Etat islamique (EI), le nouveau né sorti des laboratoires des pays du Golfe Persique dont l'Arabie saoudite et le Qatar, et de la Turquie.

Avec le soutien des puissances occidentales, la Turquie acheminait par cars entiers, escortés par l'armée turque, des milliers de djihadistes - endoctrinés, venus du monde entier, en particulier de l'Arabie saoudite et de la Turquie - vers la frontière turco-syrienne.

Al-Nosra n'a pas la côte auprès des monarchies du Golfe Persique, qui l'ont soutenu, mais pas autant que sa rivale l'EIIL. En effet, Al-Nosra est resté un groupuscule sans envergure. L'EIIL, par contre, profita des financements, armements et logistiques de ses amis saoudiens, qataris et turcs.

En plus de son entreprise multinationale de fabrication et d'exportation de tueurs djihadistes, l'Arabie saoudite a même créé un "luxueux centre où Riyad "soigne" ses djihadistes". Spa, piscine olympique, sport et prières, endoctrinement permanent, sont au menu des stages de "déradicalisation" [recyclage ?], écrit Benjamin Barth, dans Le Monde du 6 septembre 2014. Selon le général Mansour Al-Turki, porte-parole de la police, "sur trois mille ex-terroristes [sortis des stages de "déradicalisation"], nous n'avons eu que 10% de rechute".

La reconquête d'un tiers du territoire de l'Irak par les djihadistes de l'EI, et le projet américain d'étendre ses opérations militaires en Syrie, montrent que l'usine saoudienne de fabrication de djihadistes tourne à plein régime et que la liste d'attente d'accès à la piscine olympique, spa, sport et prière, où Riyad "soigne" ses djihadistes", risque d'être longue.

En effet, "les Saoudiens se sont engagés à former et à entrainer des milliers de rebelles syriens, à l'instar de la Jordanie qui abrite un programme clandestin mené par les Américains."(1)

Des milliers de "rebelles syriens", qualifiés de "modérés", vont donc transiter par les écoles coraniques militarisées saoudiennes qui les transformeront en tueurs djihadistes au service des projets américains d'asservir la Syrie. Ce "miracle" permettra également de ressusciter la "moribonde Armée syrienne libre (ASL)."(2)

Dernière minute : Le plan de Barack Obama pour armer les rebelles syriens a reçu un premier feu vert, mercredi 17 septembre, au Congrès américain (...) La Chambre des représentants, dominée par les républicains, a approuvé en un temps record un plan d'équipement et d'entrainement de rebelles syriens modérés (...) M. Obama a confirmé que l'Arabie saoudite avait accepté d'entrainer sur son sol des troupes de l'opposition syrienne."(3)

C'est l'aveu que l'Arabie saoudite, alliée indéfectible des Etats-Unis, est le pays formateur et fournisseur officiel des troupes de tueurs à gage djihadistes dans le monde ! Créée au début pour combattre la dictature de Bachar El-Assad, la rébellion syrienne "modérée" s'est transformée en suppôt des Etats-Unis et de l'Arabie saoudite.

Les propos d'Alain Frachon, chroniqueur au quotidien Le Monde, pèsent de tout leur poids: "L'Arabie saoudite pratique, cultive et exporte une version de l'islam sunnite dont le modèle salafo-djihadiste, celui de l'EI, est une excroissance piquée aux hormones stéroïdes." (4)

Barack Obama, Prix Nobel de la Paix, appliquera-t-il le droit international ? Bien sûr que non. Le président américain compte élargir le champ d'action de l'armée américaine en Syrie, "sans demander l'aval du président syrien"(5). Ce qui a suscité l'ire de Moscou.

Que cherchent les Etats-Unis ? Récupérer les territoires conquis par l'EI en Irak et en Syrie pour y installer, comme en Afghanistan, un pouvoir sunnite(6) "modéré", soumis ?

C'est le principe économique de "retour sur investissement" qui dicte ses lois. En effet, la formation, l'organisation, le transport, l'armement, le financement des djihadistes bornés de l'EI par les Américains, les Saoudiens, les Qataris, les Turques, etc., ont un coût qu'il faudra amortir.

Contrairement à l'Afghanistan, en Irak et en Syrie il faudra compter avec l'appétit d'adversaires coriaces : la Russie et l'Iran ! Des turbulences en perspective. Et la mort ne chôme pas...


1)    Hélène Sallon - Le Monde du 13 septembre 2014.
2)    Service International - Le Monde du 12 septembre 2014.
3)    AFP - Rapporté par Le Monde du 19 septembre 2014.
4)    Le Monde du 5 septembre 2014.
5)    Hélène Sallon - Le Monde du 13 septembre 2014.
6)    Bagdad est prêt à accepter la décomposition du pays. "Si les provinces sunnites veulent créer leur propre territoire, elles peuvent au regard de la Constitution" a indiqué le président irakien Fouad Massoum à Paris. Hélène Sallon - Le Monde du 17 septembre 2014.



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