Paix et Justice au Moyen-Orient
STRASBOURG, le
13 août 2014
Turbulences en Irak: la désinformation bat
son plein
Pourquoi le soudain élan de
"générosité" des gouvernements américain et français pour les
Chrétiens et Kurdes d'Irak?
Nouri Al-Maliki victime de l'entente américano-iranienne.
Nouri Al-Maliki victime de l'entente américano-iranienne.
Depuis juin 2014, la milice obscurantiste,
réactionnaire et djihadiste d'EIIL
(Etat Islamique en Irak et au Levant) transformé en EI (Etat Islamique) a mis la main sur les parties désertiques de
l'ouest, du sud-ouest de l'Irak et de l'est de la Syrie. Alors que les centres
vitaux de l'Irak, depuis Tikrīt jusqu'au sud, le centre de l'Irak et ses champs
pétrolifères, ainsi que les villes d'importance économique comme Bagdad et
Bossera, sont sous contrôle de l'Etat irakien.
A lire certaine presse (Libération des 9-10 août 2014) l'Irak est "sous la botte de
l'Etat Islamique" ! Mensonge grossier, publié en une, affublé d'un autre
mensonge et publié dans le même numéro. "Pour stopper l'avancée des djihadistes, qui menacent les minorités de
"génocide", Obama a ordonné des frappes limitées."
Le premier mensonge, dont l'objectif est de faire
peur, laisse penser que l'EI
contrôlerait entièrement l'Irak. Tout porte à croire que ce mensonge grossier
ne suit qu'un seul objectif: justifier les frappes aériennes et préparer
l'opinion à une éventuelle intervention terrestre.
Le deuxième mensonge transforme Barack Obama en
défenseur des minorités et opposé à leur génocide ! Alors qu'en même temps, son
allié israélien, armé par l'industrie d'armement américaine, déverse des
milliers de tonnes de bombes sur les habitants sans défense de Gaza. L'armée
israélienne a commis, au vu et au su du monde entier, un massacre pendant
plusieurs semaines d'une population déjà emprisonnée sous blocus sur une étroite
bande de sable. Près de 2000 gazaouis, dont 430 enfants, ont perdu la vie sous
les bombes israéliennes qui ont détruit plus de 11 000 habitations, transformé
le tiers de la population en réfugiés, causant des milliards de dollars de
dégâts matériels.
Pendant l'invasion de l'Irak, commencée en 2003,
l'armée américaine elle-même a massacré des centaines de milliers d'Irakiens,
provoquant l'exode massif de millions d'Irakiens. L'infrastructure de l'Irak
moderne a été anéantie, désorganisant entièrement la société irakienne et
déroulant ainsi un tapis rouge devant les djihadiste-mercenaires de l'EI.
A son tour, "Hollande annonce que la France est prête à soutenir les Kurdes irakiens
dans leur combat"(1) Le gouvernement français s'est dit
même prêt a accueillir des chrétiens d'Irak dont un certain nombre est déjà
arrivé en France.
Pourquoi un tel élan de "générosité" de
la part des Etats-Unis et de la France, connus pour la brutalité de leur
politique colonialiste, pour "aider" les Kurdes et les chrétiens
d'Irak? Alors qu'en même temps la politique anti-immigration de la France
consiste à expulser, chaque année, près de 30000 immigrés. Les Roms, une
communauté européenne, sont traités comme des moins que rien. Personne n'est
épargné par la politique xénophobe des gouvernements français successifs.
Récemment, l'expulsion musclée et "très
contestable juridiquement", le mardi 5 août 2014, de la famille
arménienne Babayan au centre d'accueil pour demandeurs d'asile (CADA)
d'Essey-lès-Nancy (Meurthe-et-Moselle) a suscité de vives critiques des
associations.(2)
Dès le départ, nous avons dénoncé cette
milice-mercenaire obscurantiste d'EI
comme étant le bras armé et la cinquième colonne de l'Arabie saoudite et des
Etats-Unis, adeptes du remodelage du Moyen-Orient. Nous n'avons pas changé
notre position, même si les Etats-Unis ont décidé de bombarder, depuis vendredi
8 août, certaines positions des miliciens qui se sont trop rapprochés de
Kirkouk et d'Erbil, la capitale du Kurdistan d'Irak.
L'intérêt manifesté des Etats-Unis et de la France
pour le Kurdistan d'Irak est avant tout d'ordre stratégique et pétrolier; le
volet humanitaire n'est qu'un écran de fumée.
En effet, les compagnies pétrolières telles
qu'Exxon Mobil, Chevron, Gazprom et Total, y sont très actives. Profitant de la
débandade de l'armée irakienne devant l'avancée de l'EI, les Kurdes ont mis la main sur Kirkouk qui possède les plus
gros gisements de pétrole de tout le pays. "Quelques jours à peine après la prise de la ville, le ministre kurde
des ressources naturelles annonçait le raccordement du pipeline de Kirkouk à celui,
déjà existant, qui relie le Kurdistan au port turc de Ceyhan, sur la côte
méditerranéenne, où l'on charge les supertankers."(3)
Pour exister, les djihadistes de l'EI ont besoin des ressources financières
pour payer les militaires et autres fonctionnaires et l'entretien de leur
famille. La nouvelle bataille de l'EI
est surtout une bataille pour des champs pétroliers et gazier pouvant alimenter
les caisses des djihadistes obscurantistes qui risquent de manquer de
ressources. Celles-ci sont indispensables à la survie de leur califat. Ainsi,
les djihadistes de l'EI ont perdu
samedi 26 juillet 2014 le champ pétrolier d'Ai-Chaer syrien, conquis une
semaine plutôt.(4)
Les frappes militaires américaines servent
d'avertissement adressé aux djihadistes qui, en s'approchant de Kirkouk et
d'Erbil, ont franchit la ligne jaune.
Derrière les turbulences en Irak, se profile
également la rivalité américano-iranienne pour soumettre l'Etat irakien. Le
changement du premier ministre, souhaité par les puissances occidentales, en
est un exemple. Tout porte à croire que les américano-iraniens - dont les vice
ministres des affaires étrangères se sont rencontrés récemment à Genève - se
soient entendus sur le nom du nouveau premier ministre.
Comme nous l'avons écrit (Analyse 9 du 27 juin
2014), l'EI est un redoutable moyen
de pression sur l'Iran pour l'obliger à modérer ses ambitions sur l'Irak. Le
lâchage par l'Iran de son protégé Nouri Al-Maliki, l'ancien premier ministre,
serait-il une conséquence de la poussée djihadiste en Irak, téléguidée par les
Américano-saoudiens? La question mérite d'être posée.
Les turbulences en Irak sont endémiques, se
poursuivront et ne cesseront pas de sitôt.
(1) Le Monde du 09 août 2014.
(2) Elise Vincent - Le Monde
du 09 août 2014.
(3) Guillaume Perrier - Le Monde
du 07 août 2014.
(4) Libération du 28 juillet
2014.
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