7.7.07

Communiqué 42

Paix et Justice au Moyen-Orient

STRASBOURG, le 8 juillet 2007

cpjmo@yahoo.fr

Bilan du nouveau partage du monde

En reconnaissant l’Etat d’Israël, le Fatah s’est privé d’un moyen de pression indispensable à la constitution d’un Etat palestinien indépendant

Depuis le 11 septembre 2001, une nouvelle vague néocolonialiste "à visage démocratique" déferle sur l’Orient. Cette vague est une conséquence de la désintégration de l’Empire soviétique, de la perte d’influence russe en Europe de l’Est, au Proche et au Moyen-Orient et en Asie centrale. Certains pays ou régions ont été carrément (re)colonisés (Kosovo, Afghanistan et Irak) par les armées occidentales, en particulier l'armée américaine. D’autres ont quitté le camp russe pour rejoindre celui de l’Occident, plus puissant.

En Europe de l’Est, au Caucase, en Asie centrale, des régions entières ont été redessinées en fonction des intérêts pétroliers et militaires des puissances colonialistes. C’est ainsi qu’à la fin des années 1990 est née l’organisation régionale GUUAM, regroupant la Géorgie, l’Ukraine, l’Ouzbékistan, l’Azerbaïdjan, la Moldavie. Une autre organisation nommée OCEMN, organisation de la coopération économique de la Mer Noire, a été créée en 1992, regroupant la Bulgarie, la Géorgie, la Roumanie, la Russie, la Turquie, l’Ukraine, à laquelle cinq autres pays sont associés (Albanie, Arménie, Azerbaïdjan, Grèce et Moldavie). Le même pays fait souvent partie de deux ou de plusieurs organisations régionales ou supra-régionales.

Ces organisations sont dirigées par les Etats-Unis qui ont façonné la vaste région eurasienne pour créer des «corridors», des «terminaux», des voies d’acheminement du gaz (gazoduc) et du pétrole (pipeline) ou des marchés, «ateliers» bon marché au service des capitaux financiers, et des bases militaires. La mer Noire n’est plus qu’un lac américain.

L’OTAN s’étend vers l’Est et des bases de missiles antimissiles seront installées en Pologne et en république Tchèque. L’étau se resserre autour de l’Empire russe, l’Asie Centrale échappe à la Russie et la Mer Caspienne ainsi que le Golfe Persique, où patrouillent des navires de guerre et des porte-avions, sont plus que jamais sous la coupe américaine.

Dans le monde arabo- musulman, la Libye «révolutionnaire», après avoir perdu le soutien de ses alliés soviétiques puis russes, a plié l’échine devant la puissance américano-britannique et, en reconnaissant l’Etat d’Israël (un piège que le Hamas a évité soigneusement), le Fatah s’est privé d’un moyen de pression, indispensable à la constitution d’un Etat palestinien indépendant dans les frontières de 1967. Promu l’«ami» de l’Occident et d’Ehoud Olmert, Mahmoud Abbas quémande actuellement les produits des taxes et des droits de douanes palestiniens, illégalement confisqués par Israël, alors que l’armée israélienne sévit impunément dans la bande de Gaza et dans «certaines villes de Cisjordanie, notamment à Naplouse et à Jénine, considérées comme des bastions de la lutte contre l’occupation» (Le Monde du 3 juillet 2007). Chaque intervention militaire se termine par une dizaine de morts palestiniens.

Cependant, depuis un an, la puissance des Etats-Unis et de ses alliés colonialistes marque le pas: la Syrie, l’Iran et le Venezuela tiennent bon. Les résistances irakienne et afghane gagnent en intensité, infligeant des pertes importantes aux armées colonialistes occidentales. A son tour, le Hezbollah libanais a infligé une bonne correction à l’armée israélienne et le Hamas porte désormais l’espoir de résistance du peuple palestinien.

A son tour, la Russie essaie de «renaître de ses cendres» et, après le sommet informel des 1er et 2 juillet Bush-Poutine à Kennebunkport aux Etats-Unis, elle menace de déployer ses missiles dans son enclave de Kaliningrad. Cette menace suffira-t-elle pour modifier le comportement des Etats-Unis? Une étude détaillée des rapports de force montre que, depuis 1991, c’est- à- dire depuis qu’elle a perdu ses réseaux d’influence en Europe Orientale et dans le monde, la Russie n’est plus en mesure d’impressionner l’Occident, et à fortiori les Etats-Unis, ou de leur imposer son point de vue. La réponse du sous-secrétaire d’Etat américain Dan Fried, est, on ne peut plus claire: «les Etats-Unis ne renonceront pas pour autant à la «défense ferme de nos principes et de nos amis», c’est- à- dire à la «protection stratégique des nouvelles libertés qui ont émergé en Europe de l’Est et en Eurasie» après la disparition de l’URSS. (Le Monde du 1er-2 juillet 2007).

En effet, le droit de veto au Conseil de sécurité, le pétrole, la technologie spatiale et nucléaire et les missiles intercontinentaux russes, ne peuvent pas rivaliser avec les réseaux et les zones d’influence. En ce sens, l’Iran, encore dépourvu de technologie nucléaire et de missiles intercontinentaux, pèse d’un poids beaucoup plus lourd que la Russie sur l’échiquier moyen-oriental. De plus, souhaitant intégrer l’Organisation mondiale du commerce (OMC) dominée par les Etats-unis, les hésitations de la Russie l’ont transformée en un allié incertain aux yeux des nations de la région.

Pour l’instant, la destruction et le massacre de civils continue au Moyen-Orient : «600 civils ont été tués depuis le début de l’année» en Afghanistan, alors qu’ «un rapport des Nations Unies publié en janvier 2007 faisait état, pour l’année 2006, de 34452 civils irakiens morts et de 36000 blessés » (Courrier international du 21 au 27 juin 2007). Il s’agit bien de civils sans défense et non pas de combattants anticolonialistes qualifiés de «terroristes» par la propagande occidentale qui ne dit mot sur la nature foncièrement colonialiste de la présence occidentale en Orient. Pendant ce temps, 7 touristes espagnols ont péri dans un attentat au Yémen; événement diffusé en boucle sur toutes les chaînes de télévision occidentales, complices des colonialistes.

Il va sans dire qu’un Iran militairement puissant, disposant d’une influence régionale suffisante, sera un soutien efficace des mouvements de libération du Moyen-Orient. Pour autant, faudra-t-il avoir peur d’un éventuel «impérialisme» persan naissant? C’est un autre débat qu’il faudra aborder lucidement le moment venu.

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