29.12.07

C.67- La poudrière du Moyen-Orient

Paix et Justice au Moyen-Orient

STRASBOURG, le 30 décembre 2007

cpjmo@yahoo.fr

La poudrière du Moyen-Orient


L’horrible assassinat de Benazir Bhutto marque l’échec total de la politique Bush au Moyen-Orient. C’est le signe que toute solution entre le gouvernement de Pervez Musharraf et les «nationalisto-islamistes» est désormais exclue.


Au moment où l’année 2007 touche à sa fin, quel est le bilan de l’action des Etats-Unis au Proche et Moyen-orient? Par où commencer? Par la Palestine et le Liban? Par l’Irak, le Kurdistan irakien et l’Afghanistan? Ou par le Pakistan, où, le 27 décembre, un attentat a coûté la vie à Benazir Bhutto, chef de l’opposition, soutenue par les Etats-Unis?

A l’origine, l’intervention militaire américaine au Moyen-orient et en Asie centrale devait créer une vaste zone de sécurité, source d’énergie et carrefour stratégique pour le transport du pétrole et du gaz, indispensables au monde en général et à l’Occident en particulier.

Loin de ces objectifs, la situation s’est dégradée, devenant vite incontrôlable en Irak et en Afghanistan. Ce n’est plus un secret pour personne qu’en Irak l’armée américaine, la plus puissante du monde, s’est enlisée; tandis que la résistance afghane s’oppose à l’OTAN, première alliance militaire du monde, comme elle l’a fait avec les Britanniques aux XIXe siècle, puis avec les Soviétique dans les années 1980.

Pire, contrairement aux plans et souhaits des Etats-Unis, deux nouveaux fronts se sont ouverts au Kurdistan irakien et au Pakistan. L’allié turc impose son agenda, même si les Kurdes d’Irak ont adopté un profil bas. Signe de la faiblesse croissante des positions américaines en Irak, les Turcs ne comptent pas en rester là et vont probablement intensifier les opérations militaires, jusqu’à pousser le «Kurdistan autonome» à s’impliquer militairement. Ce sera le début de la fin du «gouvernement kurde», si cher aux néoconservateurs qui comptaient créer une vaste base militaire américaine (centre d’écoute, base de lancement de missiles, etc.) en plein cœur du Moyen-Orient, à la frontière iranienne et turque. Et là aussi, ce sont malheureusement les populations kurdes qui vont trinquer.

Si les colonialistes ont changé de discours et interviennent militairement pour défendre les «droits de l’homme», ils n’ont pas vraiment changé de méthode. Ce sont toujours les vieilles recettes, maintes fois expérimentées, généralement sans succès, qui sont appliquées maintenant en Irak et en Afghanistan. Dans ce dernier pays, les Américains ont fini par comprendre qu’on ne peut gagner les cœurs et les esprits à coup de porte-avions et de bombardements. Deux instruments ont été mis en place: les OMLT, équipes militaires chargées de l’instruction des forces afghanes, et les PRT, «équipes provinciales de reconstruction» (Laurent ZECCHINI- Le Monde du 21/12/07). Or, écrit le journaliste, c’est une approche directement inspirée de celle du programme «Cords», appliqué par les Etats-Unis au Sud-Vietnam dans les années 1970. Pourtant la situation s’envenime, à tel point que Nicola Sarkozy intervient pour encourager les troupes françaises démoralisées et prétendre que: «l’échec n’est pas une option.» C’est la même rengaine que pendant la guerre d’Algérie.

Dans le communiqué 44 daté du 22 juillet 2007, intitulé «la myopie des colonialistes», nous avions comparé la situation en Afghanistan et au Pakistan à celle qui prévalait en Iran des années 1950. Voici des extraits de ce communiqué: A peine 5 ans après la conquête relativement facile de l’Irak et de l’Afghanistan, «l’incendie afghan déborde les frontières et se propage au Pakistan, où, pour asseoir son autorité, le général- président Pervez Musharraf, se détournant de l’opposition laïque, signait le 5 septembre 2006 un «accord de paix» avec ses islamistes.

Il n’en fallait pas plus pour que les talibans afghans et pakistanais se renforcent, étendant leurs tentacules de part et d’autre de la frontière. Il en a fallu des dizaines de militaires occidentaux, tués dans des attentats en Afghanistan, puis le retour des talibans, pour que l’administration Bush impose un changement de stratégie à Pervez Musharraf. L’écrasement de la révolte de la «mosquée Rouge» marque le virage pris par le gouvernement pakistanais, qui se tourne en même temps vers son ex-ennemi, le Parti du peuple pakistanais (PPP), l’opposition laïque conduite par Benazir Bhutto.

Il est à souligner que la politique de complaisance vis à vis des islamistes, avait eu l’assentiment de l’administration Bush qui «comprenait» les contraintes stratégiques du gouvernement pakistanais. Suite à l’échec patent de ladite politique, voici la nouvelle position de l’équipe Bush envers Pervez Musharraf: «Nous le pressons d’aller plus loin et nous apportons notre plein soutien à ce qu’il envisage» (Stephen Hadley, conseiller à la sécurité nationale de Bush- Le Monde du 17/07/07). Une remarque: Qui dirige la politique pakistanaise: Bush ou Musharraf?

La nouvelle politique devrait sauver du naufrage le gouvernement Musharraf, éviter la «talibanisation» du Pakistan et maintenir ce dernier sous la férule des Etats-Unis. Pourquoi la nouvelle politique sera-t-elle plus favorable au couple Bush- Musharraf que la première? N’est-il pas déjà trop tard? » L’assassinat de Benazir Bhutto montre que c’est déjà trop tard.

«Souvenons-nous de l’intervention américaine en Iran de 1953: elle nous fournit un exemple éclatant de la myopie des colonialistes en politique étrangère. En écrasant le mouvement nationaliste et laïc du Dr. Mossadegh, les Etats-Unis n’ont-ils pas favorisé l’émergence, en 1979, des islamistes iraniens menés par Khomeiny? En 2007, en neutralisant puis en discréditant le Fatah de Mahmoud Abbas, les américano- israéliens déroulent un tapis rouge devant le Hamas en Palestine.»

L’horrible assassinat de Benazir Bhutto marque l’échec total de la politique de l’administration Bush au Moyen-Orient. C’est le signe qu’il n’y a plus d’autre solution entre le gouvernement de Pervez Musharraf et les «nationalisto-islamistes». Comme en Afghanistan, la lutte pour le pouvoir sera acharnée et longue, entre un pouvoir discrédité et affaibli, mais soutenu par l’occident et une résistance animée de sentiments nationalistes et religieux. L’éditorial du 28 décembre des Dernières Nouvelles d’Alsace (DNA), résume la situation: «Le dernier «domino» pro-occidental tenu à bout de bras par Washington, malgré les errements de Pervez Musharraf, tombera tôt ou tard ou se désagrégera dans la guerre civile

Ce qui est vrai pour le Pakistan, l’est pour le monde musulman, gagné par le nationalisme teinté de religion. Le désespoir en Palestine ainsi que la mainmise des Etats-Unis sur les gouvernements dictatoriaux égyptien, saoudien ou jordanien, ne peuvent pas durer éternellement. Tôt ou tard, les mouvements de désobéissance d’inspiration nationalisto-religieuse s’intensifieront.

23.12.07

C.66- Les deux Palestine

Paix et Justice au Moyen-Orient

STRASBOURG, le 23 décembre 2007

cpjmo@yahoo.fr

Les deux Palestine


Depuis sa création, Israël a montré qu’il ne tolère pas l’existence d’Etats souverains à ses frontières


Selon le «Le Petit Robert», la guerre froide se caractérise par un état de tension, d’hostilité entre États, comme ce fut le cas entre l’URSS et les États-Unis. Cette définition, tout en reflétant une part de vérité, manque de pertinence. En effet, derrière les tensions entre l’URSS et les États-Unis, se profilaient les oppositions séculaires entre l’Occident oppresseur et l’Orient oppressé.

La puissance militaire, morale et économique du camp socialiste était d’un grand soutien pour les mouvements de libération nationale qui défiaient l’hégémonie mondiale de l’Occident. Menaçant l’URSS de bombardement atomique, les Etats-Unis mirent tout en œuvre pour défendre leur suprématie. Leur acharnement leur permit de maintenir la Corée du Sud, Taiwan et le Sud Vietnam (ce dernier pour une courte durée) dans le camp occidental. Situation qui perdure sous forme de deux Etats coréens et deux Etats chinois.

Après l’effondrement de l’URSS, le colonialisme occidental, drapé d’une enveloppe humanitaire, est reparti de plus belle, étendant sa terreur des Balkans à l’Asie centrale. Les invasions militaires, les bombardements, les destructions dans les pays du Moyen-Orient ont créé un immense champ de bataille où s’affrontent désormais les armées occidentales et les peuples et nations de la région. Les pressions exercées par Israël, le bras armé de l’Occident, ont conduit à l’éclatement des mouvements de résistance palestiniens et, comme durant la guerre froide, à la création de deux entités palestiniennes. Celle de Mahmoud Abbas, dans le camp occidental, et celle du Hamas, qui continue son combat anticolonialiste. L’objectif déclaré des deux camps étant la création d’un Etat palestinien.

La quasi absorption du Fatah de Mahmoud Abbas par Israël est conforme aux rêves des sionistes de créer le «Grand Israël». Cette absorption n’a pas encore modifié la situation du peuple palestinien qui survit grâce à son patriotisme, à sa capacité exceptionnelle de résistance, à son courage et... à l’aumône internationale. Même la promesse de 7,4 milliards de dollars d’«aide», le 17 décembre à Paris, n’a pas dissipé les craintes d’un fiasco du «plan de paix» Bush- Olmert. Selon la Banque Mondiale: «l’aide internationale sans la liberté de mouvement reste impuissante à relever l’économie palestinienne». Et selon le constat de Salam Fayyad, premier ministre de Mahmoud Abbas: «le conflit n’est pas économique mais politique».

Depuis sa création, Israël a montré qu’il ne tolère pas l’existence d’Etats souverains à ses frontières. Ses multiples tentatives (agression et annexion territoriale, assassinats de personnalités notamment libanaises, sabotages) pour déstabiliser les États voisins en témoignent. Pourquoi serait-il disposé à accepter la création d’un Etat souverain palestinien en Cisjordanie et dans la bande de Gaza?

Le conflit israélo-palestinien fait partie des conflits qui s’imbriquent les uns dans les autres: Afghanistan, Irak, Liban, Syrie, Iran. La division du mouvement palestinien offre aux colonialistes un répit qu’ils mettront à profit pour consolider leurs positions, on ne peut plus critiques, sur d’autres fronts. Le «plan de paix» Bush- Olmert, un leurre, consiste à financer l’occupation israélienne par la «communauté internationale», complice de crime contre un peuple en danger de liquidation. Pendant ce temps, la construction du mur, de nouvelles colonies, de nouveaux «check- points» ainsi que l’arrestation et l’assassinat systématique de Palestiniens continuent au vu et au su du «monde civilisé».

L’«autre» Palestine, qui ne joue pas comme Mahmoud Abbas la carte trompeuse du «plan de paix», resserre ses rangs, menacée d’une agression prochaine. Cependant, lors de la cérémonie organisée à la mémoire des victimes palestiniennes des «assassinats ciblés», «l’on voit côte à côte, les drapeaux et les membres du Mouvement de la résistance islamique (Hamas) et du Fath» (LM du 20/12/07).

En pleine euphorie, après la disparition de l’URSS, le colonialisme occidental a eu «les yeux plus grands que le ventre» mais maintenant peine à supporter le poids militaire, humain et financier d’un conflit qui s’étend de la frontière chinoise à la Corne de l’Afrique. Signe révélateur : Comme ses collègues américains et britanniques, le président français est arrivé en catimini en Afghanistan. C’est que, malgré leur puissante aviation, les forces occidentales ne sont pas en sécurité en Afghanistan. Pourtant, à entendre les «doctes chefs militaires» du quartier général de l’ISAF: «les talibans ne représentent plus une «réelle menace militaire»». Selon Laurent ZECCHIANI, envoyé spécial du Monde : «le rapport des forces est facile à établir: sans l’aide des 52700 soldats occidentaux, dont 1200 Français, les forces gouvernementales (environ 57000 soldats et 71000 policiers) seraient balayées par les talibans» (LM du 21/12/07). Le journaliste nous apprend également que «l’année 2007 aura été la plus sanglante depuis 2001 en Afghanistan (…) Kaboul n’est plus une enclave de paix.»

Face à l’enlisement de l’OTAN, les militaires français s’interrogent sur la stratégie de la coalition : «Que veut-on faire en Afghanistan» (Dernière Nouvelles d’Alsace- 23/12/07). C’est la démoralisation, prélude à un échec qui ne tardera pas à venir. Situation bien formulée par un conseiller politique de l’OTAN : «Les insurgés n’ont pas besoin de vaincre, il leur suffit de ne pas perdre » (LM du 21/12/07). Ce qui est vrai pour l’Afghanistan, l’est également pour la Palestine. Comme l’édifice planétaire de l’Empire britannique d’autrefois, sous les coups de boutoir de la résistance palestinienne, celui des colonialistes israéliens finira par s’écrouler.

16.12.07

C.65- Du "chaos constructif" aux assassinats ciblés

Paix et Justice au Moyen-Orient

STRASBOURG, le 16 décembre 2007

cpjmo@yahoo.fr

Du «chaos constructif» aux assassinats ciblés


Qui a intérêt à empêcher la constitution d’un Etat souverain au nord d’Israël ?


Le 12 décembre, l’assassinat du général libanais, François el-Hajj, a fourni l’occasion aux médias américano- occidentaux de désigner, sans preuve, la Syrie comme le commanditaire du forfait. Dans leur édition du jeudi 13 décembre, les «Dernières Nouvelles d’Alsace» (DNA) rapportent que, dans un entretien au « Nouvelle observateur », Nicolas Sarkozy se dit «prêt à aller à Damas s’il y a «une élection de consensus au Liban» et «si les assassinats s’arrêtent». C’est une allusion accusatrice de la Syrie comme cerveau des attentats au Liban.

Question: qui se trouve derrière la déstabilisation du Moyen-Orient en général et du Liban en particulier? Il faut se rappeler que l’ingérence des colonialistes dans les affaires intérieures des pays étrangers et notamment du Moyen-Orient, suivie de troubles, de coups d’état et d’assassinats politiques ne date pas d’aujourd’hui. Dans un dossier baptisé «bijoux de famille», la CIA a révélé avoir «comploté en vue de l’assassinat de dirigeants étrangers» dont Fidel Castro (LM du 24-25/06/2007).

Le 17 avril 2000, le New York Times (NYT) a publié une copie de l’histoire secrète du coup d’état en Iran, écrite en mars 1954, par Donald Wilber, l’un des principaux planificateurs du renversement, en 1953, du premier ministre iranien, Mohamad Mossadegh. Selon Madeleine Albright, la secrétaire d’état de Clinton, «le coup [de 1953] a clairement retardé le développement de l’Iran et il est aisé de comprendre pourquoi tant d’Iraniens continuent d’en vouloir à cette ingérence américaine dans leurs affaires intérieures.» Le pétrole était l’enjeu du coup de 1953, rappelle le NYT (Le Monde du 18/04/200).

Certains coups d’état d’inspiration américaine ont mis les pays de l’Amérique latine (Chili, Argentine, Brésil, Nicaragua, Guatemala, Colombie) à feu et à sang. A l’instigation de la société de télécommunication américaine ITT, l’armée chilienne, sous la direction du général Pinochet, renversa le gouvernement légal de Salvador Allende, instaurant une dictature de type fasciste. En 1976, et sous le prétexte de «lutter contre le communisme», le gouvernement d’Isabel Perón fut renversé par une junte militaire, menée par le général Videla, soutenue par les Etats-Unis. Comme au Chili, un gouvernement de type fasciste a été installé en Argentine et les séquelles de cette période sanglante ne sont toujours pas cicatrisées.

Fidèle à la politique de l’ingérence planétaire de l’Oncle Sam, George Bush a vu encore plus grand que ses prédécesseurs. Après son intervention militaire en Afghanistan et en Irak, il a rêvé d’une conquête s’étendant des frontières chinoises à l’Atlantique. Partant d’une analyse juste (la somme des produits intérieurs bruts des vingt-deux pays de la Ligue arabe est inférieure au PIB de l’Espagne (Le monde du 11-12/05/2003)), George Bush avança une nouvelle «théorie» interventionniste consistant à créer un «Grand Moyen-Orient», une vaste zone de «libre échange» soumise, ouverte aux produits et aux capitaux occidentaux, englobant des pays, allant du Pakistan, frontalier de la chine, au Maroc, au bord de l’Atlantique. Pour George Bush, «le Proche-Orient présente beaucoup d’obstacles à l’avancée de la liberté» (la même source). Il va sans dire qu’il s’agit de «la liberté», telle qu’elle est perçue par Bush et son équipe de va-t-en-guerre.

Le «Grand Moyen-Orient» fut ressenti par les pays arabes «amis» des Etats-Unis comme un «modèle» plus ou moins imposé par Washington. Appelé également «chaos constructif», la plan américain avait pour objectif essentiel de changer le statut quo des pays de la région. Après la conquête brutale de l’Afghanistan et de l’Irak, l’heure était-elle venue d’imposer un modèle de société dont le contrôle échapperait aux pays «amis» des Etats-Unis? Les dits pays ont reçu l’assurance que la dictature convenait parfaitement à la philosophie de Bush et de son équipe de néo-conservateurs.

Il y a plusieurs obstacles à la réalisation du projet américain de «chaos constructif». Ce sont des pays souverains comme l’Iran, la Syrie ainsi que des mouvements de résistance anticolonialiste, bêtes noires des Etats-Unis et d’Israël. Pour la secrétaire d’Etat américaine, Condoleezza Rice, l’Iran est «peut-être le plus grand défi pour les intérêts américains au Proche-Orient et dans le monde» (LM du 26/10/07).

Dès lors, des menaces et des mesures d’intimidation fusent à l’encontre de l’Iran et de la Syrie. A plusieurs reprises, George Bush déclara avoir alloué des millions de dollars à la déstabilisation des régimes iranien et syrien. Les Américains n’ont jamais caché d’avoir envoyé leurs forces spéciales en Iran même pour repérer des cibles stratégiques et créer des troubles à la frontière iranienne. Pendant longtemps, la Syrie fut «isolée» par la France et les Etats-Unis, et les contacts n’ont été repris qu’après la défaite de George Bush aux élections à mi-mandat de novembre 2006.

Vu la montée du prestige du camp anticolonialiste au Moyen-Orient, tout l’Occident se mobilise contre la Syrie et l’Iran. «Paris milite pour une pression accrue sur l’Iran» (LM du 15/12/07). En Azerbaïdjan, au nord de l’Iran, les Américains ont achevé de moderniser et de remettre en parfait état de fonctionnement sept aérodromes (voire plus selon certaines sources). Manifestement, dans sa stratégie, Washington considère l’Azerbaïdjan comme une base avancée bien pratique pour porter des attaques aériennes contre l’Iran» (Courrier international du 13 au 19/12/07).

Provoquer le chaos, déstabiliser les régimes anticolonialistes, organiser des attentats et des assassinats sont des moyens employées également par Israël à l’égard de la Syrie, du Liban et des mouvements de libération nationale régionaux (Hezbollah et Hamas). Des Palestiniens et des Libanais sont enlevés régulièrement par l’armée et les agents sionistes. Les personnes enlevées, mises sous pression, sont transformées ensuite en agents guidant les hélicoptères d’attaque israélien vers les cibles choisies, souvent des combattants anti-israéliens. Il s’agit de véritables assassinats. D’autres plans consistant à semer le chaos en Palestine et au Liban sont exécutés par des agents libanais et palestiniens du Mossad. L’assassinat de Rafic Hariri en est un exemple éclatant. L’Occident unanime avait accusé la Syrie. Detlev Mehlis, juge allemand, avait été désigné pour cela. Il avait construit son enquête sur le témoignage de deux individus qui se sont révélés être des agents proches de la famille Hariri, qualifiée de pro-occidentale. Suite à l’échec de sa mission, Mehlis a quitté précipitamment la région.

L’assassinat du général libanais, François el-Hajj, fait partie du plan consistant à semer le chaos en provoquant la déstabilisation au Liban et, par ricochet, dans toute la région. Cet assassinat sème la suspicion et empêche la concertation des libanais de différentes tendances en vue de créer, au nord d’Israël, un Etat stable, souverain et capable de défendre ses frontières. Un autre objectif de cet assassinat est de provoquer la guerre civile au Liban. Fort heureusement la maturité des Libanais met en échec les tentatives des adeptes du «chaos constructif» et des assassinats ciblés.

9.12.07

C.64- George Bush, un président sous tutelle

Paix et Justice au Moyen-Orient

STRASBOURG, le 09 décembre 2007

cpjmo@yahoo.fr

George Bush, un président sous tutelle


L’équipe Bush est la fraction la plus réactionnaire, voire fasciste, de la haute bourgeoisie militariste américaine.


A son arrivée au pouvoir il y sept ans, George Bush et les va-t-en-guerre de son équipe avaient tout misé sur une «économie de guerre», une économie qui devait mobiliser la richesse nationale américaine (économie colossale, comportant 25% de la richesse produite dans le monde) au service de la conquête territoriale (Afghanistan, Irak, Moyen-orient, et plus). Il s’agissait d’imposer la présence inconditionnelle des forces militaires américaines aux carrefours stratégiques du monde.

Il faut reconnaître que, suite à l’effondrement de l’URSS, George Bush et son équipe ont gagné partiellement leur pari. Partiellement ; car la conquête projetée s’est enlisée en Irak, épuisant et démoralisant la plus puissante armée du monde. L’impasse est totale en Afghanistan où l’OTAN est sur la défensive. De son côté, l’allié israélien n’a pas réussi à liquider une petite organisation comme le Hezbollah libanais qui, pendant un mois et demi, a tenu tête à la puissante armée israélienne.

Le doute, voire la peur, se sont installés dans le camp des colonialistes qui se posent des questions sur leur capacité à affronter le Hamas dans la bande de Gaza, à poursuivre le combat avec le Hezbollah, à défier l’armée iranienne qui nargue les armées colonialistes dans le Golfe persique.

La mobilisation de la richesse nationale au service da la guerre a certes enrichi le complexe militaro-industriel, avec l’ensemble de ses sociétés ainsi que les entreprises liées directement à la haute bourgeoise militariste. Mais, du même coup, la société civile a été privée des subventions de l’Etat, tandis que l’entretien ou l’aménagement de vastes zones du territoire américain ont été délaissés. Economie de guerre oblige.

Dans son ensemble, la société américaine a été muselée, voire terrorisée. La CIA, «protectrice» de l’Amérique, «berceau de la démocratie», s’est mise à détruire des documents compromettants sur la torture des détenus politiques étrangers. «En six ans, ce gouvernement a envahi un pays en violation de la charte des Nations Unies, justifié la torture, refusé de demander des mandats pour installer des écoutes, organisé la fuite d’informations secrètes dans des objectifs partisans, fait arrêter sans preuve des milliers d’Américains musulmans, emprisonné sans inculpation à Guantanamo des centaines d’entre eux et revendiqué son pouvoir d’ignorer des centaines de lois adoptées en bonne et due forme» (THE NATION- cité par Courrier international du4 au 10 octobre 2007).

C’est que l’équipe Bush est la fraction la plus réactionnaire, voire fasciste, de la haute bourgeoisie américaine. Toute la société américaine est désormais contaminée par les mensonges et les mesures anti-humanitaire de cette équipe, qui a érigé la loi de la guerre, la cruauté, l’humiliation de l’humanité, la barbarie, la destruction, en loi suprême. Sa «fierté»: ramener l’Irak 50 ans en arrière; ramener le Liban 15 ans en arrière; ramener l’Afghanistan à l’âge de pierre; ramener l’Iran cinq à dix à ans en arrière!

Irak, Afghanistan, Palestine, Liban riment avec ruine, prison et torture. Des centaines de milliers d’habitants des dits pays ont été massacrés, déplacés, emprisonnés, torturés, violés et continuent à l’être. Et voilà que le chef d’état-major interarmées américain, le général Richard Myers, prétend qu’«il n’y a jamais eu dans l’histoire de la guerre- et la guerre par nature est cruelle- une campagne plus humaine que celle menée par la coalition depuis le 19 mars de l’an dernier jusqu’à aujourd’hui, et cela inclut les opérations à Fallouja» (Le Monde du 17/04/04).

La cruauté n’épargne personne, même pas les donneurs d’ordre ou les exécutants. Le journaliste Sylvain CYPEL a évoqué, dans Le Monde du 16 novembre 2007, une enquête sanitaire américaine selon laquelle: «six mois après leur retour, 20,3% des militaires d’active et 42,4% des réservistes américains ont besoin d’un «traitement psychique»». Toujours selon ce journaliste, «la chaîne CBS a diffusé une enquête, mercredi d’où il ressort que 6250 américains miliaires ont mis fin à leurs jours en 2005. Ce taux de suicide est 2,3 fois plus important que la moyenne américaine. Et dans la tranche des 20-24 ans, regroupant ceux envoyés en Irak ou en Afghanistan, elle l’est 3,6 fois plus.» En moyenne, cela représente 16 suicides par jour! Force est de constater que l’équipe Bush et ses généraux n’ont pas la même idée de l’humanité que le commun des mortels.

Le 6 novembre 2006, l’élection a mi-mandat a sifflé la fin de la partie. George Bush et son équipe des va-t-en-guerre ont causé trop de dégâts. Depuis, c’est la descente aux enfers pour George Bush qui a perdu de son autorité, tandis que ses adversaires de la société civile gagnent en audience. Selon l’AFP, citée par Le Monde du 10/11/07, «Après la Chambre des représentants, le Sénat américain est passé outre à un veto du président George Bush contre un texte de loi sur l’aménagement des voies d’eau et la navigation fluviale.»

Sur le plan international, la situation n’est guère meilleure. La Turquie, pourtant allié solide et de longue date des Etats-Unis, mécontente de la politique américaine au Kurdistan irakien, a réussi à imposer son agenda aux Etats-Unis de G. Bush. Sous la pression de la Turquie, la consultation sur le statut de Kirkuk (ville pétrolière) a été reportée en 2008. Ce qui empêcherait le Kurdistan irakien, «région autonome», d’accéder à l’autonomie financière.

Vu la faiblesse du dollar et l’inflation concomitante, les pays arabes du Golfe Persique ont décidé de créer une monnaie commune. Ces pays n’hésitent plus à s’approcher de l’Iran, invitant, pour la première fois, le président iranien à la dernière réunion du Conseil de coopération du Golfe (CCG).

Le coup de grâce à la politique belliciste de George Bush a été donné par le dernier rapport de la direction du Renseignement national américain qui regroupe seize principales agences d’espionnage des Etats-Unis. Selon ce rapport, Téhéran a gelé son programme nucléaire militaire à la fin de l’année 2003. Dès lors, des voix se lèvent aux Etats-Unis pour demander l’ouverture de pourparlers entre Washington et Téhéran. Tout cela annonce un changement stratégique de Washington vis-à-vis de l’Iran. La politique étrangère de l’après Bush se met doucement en place.

La moindre attitude rappelant la politique de George Bush est immédiatement sanctionnée par l’opinion publique américaine. Hilary Clinton, jadis favorite de l’électorat (et préférée de George Bush), chute dans les sondages.

Que reste-t-il de George Bush? Rien que l’ombre d’un ex-puissant président du plus puissant pays du monde, dorénavant réduit à un homme d’Etat sous tutelle.

2.12.07

C.63 (le 02 décembre 2007) - Le carcan colonialiste ou la liberté ?

Paix et Justice au Moyen-Orient

STRASBOURG, le 02 décembre 2007

cpjmo@yahoo.fr

Le carcan colonialiste ou la liberté?

Quel sera le jugement de l’Histoire sur Mahmoud Abbas?

La participation de la Syrie à la réunion d’Annapolis a donné lieu à d’innombrables commentaires : satisfaisants pour le camp colonialiste, inquiétants pour le camp anti-colonialiste.

Faut-il rappeler que, jusqu’en novembre 2006, date des élections à mi mandat aux Etats-Unis, la Syrie était «persona non grata» de la scène politique internationale. L’Occident avait transformé la Syrie en «peste» non fréquentable et souhaitait «résoudre» les problèmes du Proche-Orient sans la participation de la Syrie. La Syrie fut critiquée et soi-disant «isolée» hermétiquement par Chirac, «porte- parole» de la famille des Hariri, ses intimes et richissimes «amis» libanais, ainsi que par G.Bush, l’actuel président américain. Voilà pourquoi l’invitation de la Syrie à la réunion d’Annapolis est en soi une victoire du camp anti-colonialiste. C’est, une fois de plus, le signe de l’échec de la politique unilatérale occidentale qui prend le Moyen-Orient pour sa «chasse gardée». C’est le signe que «les temps ont changé» et que rien ne peut se faire sans la participation du camp anti-colonialiste, force montante de la région.

Tout en condamnant la politique répressive du gouvernement syrien, force est de constater que l’actuelle classe dirigeante syrienne tient farouchement à l’intégrité territoriale et à la souveraineté politique du pays et sa victoire est due, avant tout, à son appartenance au camp anti-colonialiste, formé de divers mouvements de résistance et de l’Iran, pays qui renforce sa puissance militaire et développe son réseau d’influence régionale.

En acceptant le carcan colonialiste, la Syrie aurait-elle une meilleure chance pour récupérer le Golan? L’expérience montre que, sur la scène diplomatique mondiale, on ne peut rien obtenir sans établir un rapport de force militaire et diplomatique.

Quant au Fatah de Mahmoud Abbas, qu’a-t-il obtenu en pliant l’échine devant les colonialistes américano-sionistes? Rien que des promesses. La constitution de l’Etat palestinien, promise pour 2005, est reportée aux calendes grecques. Tandis que la colonisation de la Cisjordanie se poursuit, rendant impossible la continuité territoriale, donc, la constitution d’un Etat palestinien viable. Une fois dans les bras du colonialiste, Mahmoud Abbas, président affaibli de l’Autorité palestinienne, sans véritable poids politique et militaire, perd son autonomie et sa personnalité, se prête à toutes les compromissions et finira par accepter un «bantoustan» qui ne sera même pas nommé «Etat palestinien». En revanche, il sera «honoré» du titre accablant d’«ami» respectable de l’Occident!

Une armée puissante représente la colonne vertébrale d’une politique indépendante et souveraine. Alors, les colonialistes commencent par désarmer l’«Autorité palestinienne». «Le général américain James Jones a été nommé, mercredi, envoyé spécial de la secrétaire d’Etat, Condoleezza Rice, pour superviser notamment la réorganisation des services de sécurité palestiniens» (Le Monde du 30/11/07). Que restera-t-il de Mahmoud Abbas, sans véritable armée et transformé en pantin, car mis sous tutelle américaine? Quel sera le jugement de l’Histoire? Patriote ou traître? A vous de juger.

Tous les pays «amis» moyen-orientaux des Etats-Unis portent le carcan colonialiste. En effet, les «experts militaires américains» sont présents à tous les échelons des armées «amies», en particulier dans les états majors. Est-ce cela que cherchent les Syriens? Pas si sûr, conscients qu’une fois acceptée le carcan américain, ils perdront, comme les Egyptiens, leur souveraineté politique.

La libération du Golan peut attendre. La discussion peut continuer en attendant le renforcement du potentiel militaire du camp anti-colonialiste qui porte chaque jour des coups mortels aux armées occidentales, sources d’insécurité, discréditées, en déliquescence, perdant du terrain en Irak, en Afghanistan et au Liban.

A en croire Oxfam, l’organisation non gouvernementale britannique, «les 55000 soldats de la Force internationale d’assistance à la sécurité (FIAS) de l’OTAN et de la coalition internationale dirigée par les Etats-Unis contribuent à l’insécurité en Afghanistan, qui s’est «nettement aggravée» depuis 2006» (LM du 25-26/11/07). Toujours selon Oxfam : «Sur 1200 civils morts, «environ la moitié ont été tués dans des opérations des forces internationales et afghanes»».

La résistance afghane tire profit des bombardements aveugles et de la brutalité des forces occidentales qui poussent la population dans les bras de la résistance. Le même phénomène s’observe en Irak, où l’armée américaine, démoralisée, et les mercenaires étrangers tirent sur tout ce qui bouge. Tandis qu’au Liban «les sous–munitions israéliennes continuent de tuer (…) En un peu plus d’un an, les démineurs ont désamorcé ou fait exploser plus de 130000 sous-munitions. Un chiffre énorme, mais qui apparaît dérisoire au regard d’un million de sous-munitions non explosées» (LM du 13/10/07). A quand un tribunal international pour juger les armées occidentales et israélienne pour des crimes commis contre l’humanité?

Les pays du Moyen-Orient tiennent à leur souveraineté ; la résistance à la persécution coloniale ne fait que gagner en intensité. Les jeux ne sont pas faits, ni en Palestine ni au Moyen-Orient. En difficulté, les gouvernements allemand et français se rapprochent des Etats-Unis. Camp colonialiste contre camp anti-colonialiste.

Laurent Zecchini, journaliste, révèle dans Le Monde du 29/11/07 qu’avec le missile Achoura, un missile à propulsion solide, l’Iran a fait un «saut technologique et stratégique important (…) cela lui confère un avantage dissuasif». L’«équilibre de la terreur» continue son chemin. La bataille sera longue.

25.11.07

C.62- Les enseignements des deux guerres mondiales

Paix et Justice au Moyen-Orient

STRASBOURG, le 25 novembre 2007

cpjmo@yahoo.fr

Les enseignements des deux guerres mondiales


La réunion d’Annapolis est vouée à l’échec


Avant les deux guerres mondiales, deux «superpuissances» faisaient la pluie et le beau temps sur le globe:

L’empire colonial britannique, sur lequel le Soleil ne se couchait pas, était constitué, entre autres, d’un vaste territoire de 4 millions de kilomètres carrés, et d’où sont issus quatre des Etats du monde contemporain: l’Inde, le Pakistan, le Bengladesh et la Birmanie. «Avec la seule occupation du sous-continent indien, les Anglais disposaient d’un ensemble plus étendu et plus peuplé que l’empire romain à son apogée» (Bouda Etemad, la Possession du monde, rapporté par «Le livre noir du colonialisme»).

L’empire colonial français, vaste territoire, allant de l’Indochine (Vietnam, Cambodge et Laos) à l’Afrique, comprenait l’«Afrique blanche » (Tunisie, Maroc, Algérie) et l’«Afrique Noire», ensemble d’une dizaine de pays maintenant «indépendants». Après la première guerre mondiale, cet Empire, (de 1919 à 1946) s’étendait sur 12 millions et demi de kilomètres carrés, avec une population de 70 millions d’habitants, contre seulement 550000 km2 et 42 millions d’habitants (en 1946) pour la métropole.

Que restera-t-il de ces deux empires à l’issue des deux guerre mondiales? L’un et l’autre en sont sortis exsangues, épuisés et affaiblis, ne trouvant leur salut que dans le plan Marshal des Etats-Unis qui, après la Deuxième Guerre mondiale dévastatrice, a déversé des dizaines de milliards de dollars pour leur reconstruction. A leur tour, les deux puissances colonisatrices se sont retournées contre les peuples colonisés qui, pourtant, les avaient aidé à combattre l’ennemi nazi. Il n’en fallait pas plus pour accélérer la décolonisation, encouragée par l’un des grands vainqueurs de la Deuxième Guerre mondiale: l’URSS.

Le recul inévitable de l’influence des anciens empires s’accompagna de la perte de l’hégémonie de la Grande Bretagne, au profit des Etats-Unis, puissance montante qui, grâce à sa machine militaire, s’installa sur les dépouilles de l’empire britannique, et notamment, sur la route stratégique du transport maritime, allant du détroit de Malacca à Gibraltar.

Toutes les études montrent que si la guerre enrichit l’industrie d’armement et les marchands d’armes, elle épuise la richesse nationale, appauvrit le peuple, affaiblit l’économie nationale, dont toutes les ressources sont mobilisées au service des projets guerriers. Ainsi, Georges Bush a-t-il mis son veto à l’assurance- maladie de plusieurs millions d’enfants sans couverture médicale, tout en demandant au Congrès près de 42 milliards de dollars supplémentaires pour la guerre en Irak et en Afghanistan (LM du 03/10/07).

Aux Etats-Unis dont l’armée, après six ans de guerre en Afghanistan et quatre ans en Irak, a été «déséquilibrée», le peuple s’est appauvri et l’économie- avec ses répercussions dans le monde entier- traverse une zone de turbulence sans issue véritable. Une note des analystes de la Deutsche Bank a évalué à 400 milliards de dollars (273 milliards d’euros) les pertes pour le secteur bancaire mondial, liées à l’effondrement du marché des crédits immobiliers à risque aux Etats-Unis. Par ailleurs, plus d’un million de foyers américains ont déjà fait l’objet d’une saisie depuis janvier 2007 (Le Monde du 14/11/07).

Les uns après les autres, les alliés des Etats-Unis les abandonnent. Le Japon remet en question le ravitaillement par sa marine des forces alliées engagées en Afghanistan (LM du 16/11/07). Les travaillistes australiens ont remporté les élections en promettant de se désengager en Irak.

La perte de crédit des Etats-Unis dans le monde est manifeste. Dans un article d’analyse, paru dans Le Monde du 13/11/07, Sylvie Kaufmann remarque, à juste titre: «c’est aujourd’hui vers la Chine que la communauté internationale se tourne pour faire pression sur la Birmanie, pas vers les Etats-Unis. Et en Asie du Sud- Est, c’est aussi la Chine qui comble le vide diplomatique laissé par l’administration Bush».

L’affaiblissement des Etats-Unis se répercute sur tout l’Occident, désireux de «démocratiser» (vassaliser) le monde entier. On le voit bien au Liban, où, selon M. D’Alema, premier ministre italien, les «Européens espéraient faire du Liban un pôle de stabilité et un modèle de démocratie» (LM du 24/11/07). Autrement dit, comme les Américains qui ont échoué à «démocratiser» l’Irak, les Européens ont échoué à leur tour à «démocratiser» le Liban! C’est l’impasse. Même la France, le parrain traditionnel, est discréditée et n’arrive pas à remettre en selle ses protégés.

Dans l’espoir de conserver leur hégémonie mondiale, les va-t-en-guerre américains seront-ils en mesure de déclancher une nouvelle aventure militaire contre l’Iran et la Syrie? La guerre est une partie d’échec avec des conséquences inattendues. Les guerres du Golfe (1991 et 2003) suivies de l’enlisement des Etats-Unis en Irak, ont renforcé la guérilla anti-américaine et la position régionale de l’Iran, qui, de l’aveu même des militaires américains, représente un «défi» pour l’armée américaine.

Il est indéniable que la Chine (dont les navires de guerre sillonnent déjà en mer d’Oman), la Russie, même l’Iran sortiront «grandis» d’une éventuelle guerre américaine contre l’Iran. Ce raisonnement vaut également pour Israël qui devra réfléchir sérieusement avant de s’engager dans une aventure militaire dans un environnement régional très hostile.

Il n’en reste pas moins que cette situation «ni guerre, ni paix» ne peut pas durer éternellement. Les Américains insistent sur le fait que la réunion d’Annapolis représente une «chance» de sortie de crise (due à l’agression américaine au Moyen-Orient). Afin de casser le front anti- américain, les Etats-Unis essaient d’amadouer la Syrie en l’invitant à la réunion d’Annapolis. Mais tout porte à croire que les Américano-israéliens seront incapables d’y faire des concessions substantielles. La réunion d’Annapolis sera donc vouée à l’échec. La seule «victoire» d’Annapolis sera de réunir, autour d’une même table, les régimes réactionnaires arabes et Israël, une sorte de «front uni» pour «consolider» la structure colonialiste régionale.

Comme au Liban, l’Etat palestinien et la restitution du Golan syrien devront attendre. Pour débloquer la situation, un «clash» paraît inévitable et, avec l’aide de Mahmoud Abbas, la bande de gaza reste un objectif accessible aux américano-israéliens, affaiblis et discrédités à l’échelle mondiale.

18.11.07

C.61- De la Somalie aux frontières chinoises

Paix et Justice au Moyen-Orient

STRASBOURG, le 18 novembre 2007

cpjmo@yahoo.fr

De la Somalie aux frontières chinoises


Quel est le plus grand champ de guerre depuis la Seconde Guerre Mondiale? C’est sans doute celui qui couvre une vaste région, allant du centre de l’Afrique aux frontières chinoises, en passant par le Proche, le Moyen-Orient et l’Asie centrale.


En Somalie, en Irak et en Afghanistan, les peuples affrontent directement la terreur colonialiste, alors qu’au Pakistan, depuis la reprise de la mosquée Rouge par l’armée pakistanaise en juillet 2007, la guerre larvée s’est transformée en affrontement direct entre l’armée et la résistance qui appelle à combattre les Etats-Unis et son soutien local, le dictateur Pervez Musharraf.

Parallèlement aux difficultés rencontrées par les américano- britanniques sur le terrain, les dissensions inter- colonialistes font place à l’«entente cordiale». Le rapprochement franco- américain en est un exemple.

Tout comme l’opposition française à l’intervention américaine en Irak, la nouvelle «lune de miel» franco-américaine a des raisons économiques et stratégiques. En effet, en 1991 puis en 2003, suite à leur offensive générale, les Etats-Unis ont reconquis leur position hégémonique au Moyen-Orient et la France a fini par y perdre du terrain, en particulier en Irak (où elle occupait une situation privilégiée, tandis que les Américains étaient absents), en Arabie saoudite et au Qatar, troisième réserve mondiale de gaz (9,3%). C’est, en quelque sorte, la «guerre pour des marchés» qui opposait la France aux Etats-Unis. Situation bien résumée par Claude de Kémoularia, ancien ambassadeur français aux Nations Unies : «Il existe au Qatar une sympathie du cœur envers la France… mais la France n’a pas le pouvoir. Quelles que soient nos relations proches, c’est la puissance politique, économique et militaire qui prime» (Le Monde du 11-12/05/2003).

Affaire bien entendue par Sarkozy qui accepta le rôle hégémonique des Américains, lesquels, en contrepartie, ouvrirent, quoique timidement, «leurs» marchés aux produits et entreprises français. Après la réconciliation franco- américaine, le Qatar annonça l’acquisition de 80 Airbus et, en janvier, N. Sarkozy se rend à Riyad, avec l’espoir de sceller d’importants contrats industriels (LM du 11-12/11/07). Après la pluie, le beau temps!

Sur le plan stratégique, la France, en tant que puissance colonialiste, ne peut qu’être satisfaite du retour du «colonialisme à visage humain», même si, ou surtout parce que, les Etats-Unis n’ont plus le superbe d’antan. Il serait naïf de croire qu’un seul homme (N. Sarkozy) peut décider, du jour au lendemain, de modifier la politique étrangère de la France. Le trio N. Sarkozy, B. Kouchner, H. Morin, représente l’aile militariste de la bourgeoisie française. La rupture entre François Bayrou et Hervé Morin (ministre de la Défense) consacre la rupture entre l’aile «chrétienne- démocrate» et l’aile militariste au sein de la formation centriste qu’était l’UDF. D’ailleurs, les électeurs d’extrême droite ne s’y sont pas trompés en apportant leurs voix au candidat Sarkozy.

Prêtant main- forte aux Américains, et à la grande joie du complexe militaro- industriel français, la France a l’intention d’ouvrir un nouveau front au Tchad et au Soudan. L’activisme français frappe par sa vigueur. D’aucuns suggèrent que N. Sarkozy aurait remplacé T. Blair, ancien premier ministre britannique, traité de caniche de Bush. Certains se demandent pourquoi la bourgeoisie française parie-t-elle sur les Etats-Unis, un cheval perdant?

Hormis les intérêts économiques (recherche de l’hégémonie politique et des matières premières, consommation massive d’armes,…), le soutien apporté par la France, et dans une moindre mesure par l’Allemagne, aux Etats-Unis, a pour objectif de souder le front lézardé du colonialisme occidental, en perte de vitesse et, à long terme, menacé d’effondrement par la montée en puissance des mouvements de résistance dans les pays arabo- musulmans. Il s’agit des mouvements, a effet domino, qui menacent tout l’édifice colonialiste qui s’étend des frontières chinoises jusqu’en Afrique. Ces mouvements de libération sont aussi importants que ceux des communistes du vingtième siècle qui avaient conduit à l’effondrement des Anciens régimes monarchistes, depuis l’Allemagne jusqu’en Chine.

L’enlisement en Irak de l’armée américaine et son affaiblissement, les difficultés rencontrées par l’OTAN en Afghanistan et la montée en puissance de la résistance pakistanaise encouragent la résistance dans tous les pays arabo- musulmans. Pour éteindre l’incendie révolutionnaire au Pakistan, Benazir Bhutto a été appelée à la rescousse.

En Irak, tout porte à croire que les Etats-Unis ont appelé l’Iran à l’aide. En effet, on n’entend plus parler des résistants chiites (l’armée du Mahdi) et, de son côté, «l’armée américaine a libéré, vendredi 9 novembre, neuf Iraniens arrêtés en Irak» (LM du 11-12/11/07). Cette «libération» serait-elle la partie visible de l’iceberg de la collaboration en Irak entre les deux pays? Une autre facette de cette collaboration fut dévoilée face à l’imminence de l’intervention turque au Nord de l’Irak. En effet, Washington et Téhéran ont formé un front uni face à la Turquie. Peut-on conclure, pour autant, que les Etats-Unis et l’Iran, vont finir par s’entendre sur tous les dossiers?

Pour les colonialistes, l’hégémonie politique, basée sur la force militaire, prime sur toute autre considération. Concernant l’Iran, actuellement, deux tendances coexistent aux Etats-Unis : celle des «intellectuels néoconservateurs», coupés des réalités, qui poussent à l’affrontement armé avec l’Iran et celle des militaires, conscients des limites de l’armée américaine «déstabilisée», qui freinent une aventure militaire contre l’Iran. En effet, selon le général Casy, le chef d’état- major: «l’armée de terre américaine est «déséquilibrée» après six ans de guerre en Afghanistan et quatre ans en Irak, et demeure exposée à des demandes imprévisibles dans une ère de «conflit persistant». Toujours selon le général Casy: «déséquilibrée ne signifie pas dire cassée» (LM du 10/10/07).

Face à la pression des «néoconservateurs», en perte de vitesse aux Etats-Unis, le chef des opérations militaires américaines au Moyen-Orient, l’amiral William Fallon, hausse le ton: traiter le dossier iranien représente «un défi» a reconnu l’amiral pour qui: «Et tout cela n’est pas facilité par les articles incessants qui n’en finissent pas de sortir et selon lesquels il va y avoir une nouvelle guerre d’un jour à l’autre, ce qui n’est tout simplement pas la direction que nous voulons prendre» (LM du 14/11/07).

Autrement dit, un affrontement militaire avec l’Iran risque de conduire tout simplement à «casser» ce qui reste de l’armée américaine, incapable de mener une guerre de longue durée, dans une région hostile, à 10 000 km de chez elle.

Aux néoconservateurs, il ne reste plus que l’épouvantail Dick Cheney, tandis que la caravane du changement des rapports de force au Moyen-orient continue son chemin!

11.11.07

C.60- L'économie américaine, otage du complexe militaro- industriel

Paix et Justice au Moyen-Orient

STRASBOURG, le 11 novembre 2007

cpjmo@yahoo.fr

L’économie américaine, otage

du complexe militaro- industriel


Certains journalistes ou agences de presse ont le «don» de donner un titre à un article dont le contenu contredit le titre! Si ce n’était de la désinformation volontaire destinée à propager des informations mensongères (une majorité de lecteurs ne lit que le titre), ce «don» trahirait un certain amateurisme. En voici un exemple. Le Monde du 05/06/07 titrait une dépêche de l’AFP et de Reuter : «M. Ahmadinejad évoque à nouveau la destruction d’Israël». La lecture de la dépêche nous apprend que, pour M. Ahmadinejad: «Avec l’aide de Dieu, le compte à rebours de la destruction du régime sioniste a été enclenché grâce aux enfants du Liban et de la Palestine». Il y a quand même un fossé entre «détruire un pays» et «détruire un régime»!

Le mensonge est grotesque. Il fait partie intégrante de la campagne internationale de désinformation, orchestrée par l’administration de G.W.Bush qui a conquis le pouvoir par tricherie, il y a sept ans.

Rappelons- nous des mensonges sur les «armes de destructions massives» détenues par le régime de Saddam Hussein. Orchestrée par la Maison Blanche, une mise en scène hollywoodienne aux Nations Unies du secrétaire d’état de l’époque, avait montré des flacons de substances chimiques, fabriquées par des laboratoires ambulants dont l’existence n’a jamais été prouvée. Et, pour couronner le tout, des inventions mensongères sur les liens hypothétiques entre le régime de Saddam Hussein et Al Qaida !

Soit dit en passant que la France, puissance colonialiste, n’est pas de reste. Pour préparer une intervention colonialiste au Darfour (Soudan), des mensonges ont été fabriqués sur les «orphelins» darfouris, conduisant au scandale de l’action de l’association «Arche de Zoé», instrumentalisée par les tenants de l’«ingérence humanitaire»!

Faut-il rappeler que tous ces mensonges servent à enfouir les vraies raisons des interventions colonialistes au Moyen-Orient, en Asie centrale et en Afrique: la recherche de matières premières, du pétrole, du gaz, de l’uranium, l’établissement de bases militaires, la domination des voies de communication et l’hégémonie politique.

Comme les précédentes, cette nouvelle vague colonialiste, commencée en 1978 par l’invasion de l’Afghanistan par l’Union soviétique, montre des signes d’essoufflement. Des fissures apparaissent même dans l’édifice. La Grande Bretagne se désengage totalement. Le Pakistan, pièce maîtresse de la domination américaine en Asie centrale, vacille à son tour. Selon Françoise Chipaux: «L’emprise des talibans pakistanais, soutenus par Al- Qaida, déborde des zones tribales» (Le Monde du 08/11/07). Le deuxième coup d’état du dictateur Musharraf a exacerbé les tensions de la société pakistanaise, majoritairement anti-américaine. Le mensonge grotesque des Américains consistait à faire passer Musharraf pour un démocrate. Sûrement encouragé par les Etats-Unis, le récent coup d’état montre bien que la démocratie n’a pas le même sens pour les colonialistes et pour les peuples. Sinon, pourquoi les Américano-israéliens, soutenus par l’Union européenne, ont-ils refusé la victoire du Hamas lors d’élections authentiquement démocratiques en Palestine?

Irak, Afghanistan, Pakistan: force est de constater que les Etats-Unis ont atteint la limite de leur puissance et n’arrivent plus à s’imposer comme bon leur semble. Parlant de la guerre d’Irak, Frank Rich, The New York Times, écrit : «Notre situation est plus grave qu’elle ne l’était pendant la guerre du Vietnam» (Courrier international du 20 au 26/09/2007). Actuellement, les diplomates américains refusent de servir à Bagdad. Désormais, ils seront nommés de "force".

En prenant en compte les intérêts des emprunts relatifs aux dépenses engagées pour la guerre, le coût total «officiel» des guerre en Irak et en Afghanistan s’approche de la somme colossale de 1000 milliards de dollars (plus que moitié du PNB français, cinquième puissance économique mondiale). Pour le complexe militaro- industriel américain et les «sociétés militaires privées» (Blackwater, DynCorp International et Triple Canopy), proches du parti républicain, la guerre d’Irak et d’Afghanistan, c’est du pain bénit. Selon l’audit concernant DynCorp, le «désordre» serait tel au département d’Etat que l’administration est incapable de savoir ce que cette société a «fait spécifiquement » des 1200 millions de dollars que le département d’Etat lui a alloués depuis 2004 (LM du 26/10/07). Selon le politologue Allison Stanger, du Middlebury College, «les contrats irakiens ne sont que le sommet de l’iceberg». Dans ces conditions, serait-il étonnant que la crise financière et bancaire des Etats-Unis, commencée au mois d’août, se transforme en crise économique? De nombreux experts n’excluent pas que l’économie américaine entre en récession début 2008 (LM du 03/11/07).

Les dépenses militaires, les gabegies et le pillage de l’économie par le complexe militaro- industriel, couplés aux déficits budgétaires et au développement de la pauvreté des ménages américains, sont en train de ruiner la première économie du globe. L’affaiblissement du billet vert n’est que la manifestation logique des difficultés que traverse l’économie américaine.

Se basant sur «les multiples revers enregistrés au Moyen-orient» par les Etats-Unis, D. Vernet (Le Monde du 07/11/07) observe un renforcement du «clan des « réalistes» au département d’Etat.» C’est que Washington réfléchit à changer sa stratégie diplomatique globale. Le «changement» consisterait-il à donner un rôle aux Russes et créer un directoire à trois, composé d’Américains, d’Européens et de Russes sur les affaires du Vieux Continent?

Cette analyse manque de pertinence. La bourgeoisie américaine a donné carte blanche à l’administration de G.W.Bush pour imposer l’hégémonie dictatoriale des Etats-Unis sur le globe. Un démenti rapide de l’analyse de D. Vernet vient des Russes qui ont gelé le traité sur les forces conventionnelles (FCE), qui limitait les armements sur le continent (LM du 09/11/07).

Certes, l’administration actuelle est consciente de son échec et de son affaiblissement. Mais, elle serait incapable de modifier substantiellement sa politique, basée sur l’unilatéralisme, la peur, le chantage, la menace et la guerre à tout va. Le chaos et la guerre profitent, avant tout, à l’industrie d’armement et aux sociétés militaires privées. Sont-ils profitables à l’économie et au leadership mondial américain? La réponse est, sans nul doute, négative.

L’Amérique est une puissance affaiblie et blessée. N’oublions qu’elle n’est pas encore morte.

4.11.07

C.59- Ces fauteurs de guerres, venus de très loin

Paix et Justice au Moyen-Orient

STRASBOURG, le 04 novembre 2007

cpjmo@yahoo.fr

Ces fauteurs de guerres, venus de très loin


Le deuxième coup d’état du dictateur Musharraf. L’Amérique et ses alliés en grande difficulté!


Comme nous l’avons écrit dans le communiqué 58 du 28 octobre, une fois de plus, la fièvre est montée d’un cran au Moyen-Orient. Le bruit de bottes vient, cette fois-ci, de la frontière turco- irakienne où l’armée turque a massé près de 100000 hommes. Apparemment, l’enjeu serait l’«éradication» de la guérilla kurde du PKK (Parti des travailleurs du Kurdistan) qui opère depuis le territoire irakien.

Invité par les Etats-Unis, de s’abstenir de toute intervention au Kurdistan, le premier ministre turc s’adresse à ses «amis», en termes peu amènes: «Est-ce que les gens ne se demandent pas ce que les Américains sont venus chercher en Irak, 10000 km de chez eux. Moi je suis dérangé [par le PKK]. En quoi les Américains étaient-ils dérangés par l’Irak?» (Le Monde du 27/10/07).

Il est à souligner que, depuis 2003, la base aérienne d’Incirlik en Turquie sert de plaque tournante au transit américain, aussi bien pour l’offensive contre Saddam Hussein que pour le ravitaillement des troupes en Irak et en Afghanistan. Quatre ans après l’invasion de l’Irak, la Turquie «se réveille» et sent la peau de banane que l’«ami» américain lui a glissé sous le pied. Il s’agit de la création d’un «gouvernement régional kurde autonome», première étape de la création d’un «Grand Kurdistan», menaçant l’intégrité territoriale de la Turquie et de l’Iran.

En effet, il existe une guérilla kurde, au nom fort «sympathique» de «Parti pour une vie libre au Kurdistan » (Pejak), représentant l’aile iranienne du PKK (Cécile Hennion- LM du 02/03/07).

Quel est le degré d’autonomie du Pejak? Selon Rostam Joudi, du PKK: «Objectivement, un rapprochement américain du Pejak est possible (…) Pour échapper aux pressions américaines, Téhéran s’est rapproché de la Syrie et de la Turquie (…) Les Iraniens ont déployé d’importantes forces à la frontière. Nous ne refusons pas l’aide des Américains» (Cécile Hennion- LM du 02/03/07). Et dire que l’«aide» américaine n’est jamais innocente…

Outre le Pejak, les autres composantes de la sédition kurde (le Parti Démocratique du Kurdistan Iranien (PDKI) et le Parti communiste Kurde iranien (Komala)) s’accusent mutuellement de faire le jeu américain.

Actuellement, aux frontières iraniennes de la Turquie et de l’Irak, deux camps se font face: d’un côté les Américains, désireux de décomposer la Turquie et l’Iran, en créant le «Grand Kurdistan»- deuxième Israël- au coeur du Moyen-Orient. A ce titre, la sédition kurde (si louable fut-elle à l’origine) est instrumentalisée par les Etats-unis et ses alliés (français, britanniques, …). De l’autre côté, l’Iran, la Turquie et les patriotes irakiens, opposés au dépeçage de l’Irak et hostiles à un Etat kurde à la botte des Etats-Unis.

Encouragées par les Américains, qui autorisent l’utilisation du sol irakien par les kurdes turcs et iraniens, les provocations et excursions kurdes sont fréquentes aux frontières de l’Iran et de la Turquie. A son tour, l’Iran avait lancé la menace, mercredi 28 février, d’une incursion militaire dans le Kurdistan irakien au cas où les autorités irakiennes ne se décidaient pas à expulser les groupes armés kurdes qui y ont trouvé refuge (LM du 02/03/07). A en croire Cécile Hennion: «A plusieurs reprises en 2006, l’aviation turque et l’artillerie iranienne ont pilonné, parfois de concert, les positions des rebelles de Qandil» (LM du 02/03/07).

Quelles sont les limites de l’unité d’action entre l’Iran et la Turquie? Successeurs des Empires Perse et Ottoman, puissances rivales, les deux pays ont livrés, au cours de l’Histoire, plusieurs batailles dont l’enjeu était la Mésopotamie. S’ils sont d’accord pour combattre la sédition kurde, l’Iran voit d’un mauvais œil la présence massive de l’armée turque, alliée des Etats-Unis, au Kurdistan irakien, à l’ouest de ses frontières: Où s’arrêtera l’armée turque? Qu’en sera-t-il du champ pétrolifère de Kirkuk? Se retirera-t-elle après avoir «nettoyé» le Kurdistan irakien (où l’Iran dispose certainement de réseaux d’influence)? Autant de questions qui devraient tarauder les autorités iraniennes dont certains cercles souhaiteraient, sans doute, «récupérer» la Mésopotamie, après le départ des Etats-Unis?

Vu le fiasco de leur aventure irakienne et afghane, la crise que les Etats-Unis traversent actuellement (risque de récession économique, baisse continuelle du billet vert, augmentation du prix du pétrole, baisse des stocks énergétiques stratégiques, croissance vertigineuse des dépenses militaires, etc.) et les obstacles de poids que sont l’Iran et la Turquie, incitent à croire que le plan de «remodelage» s’essouffle progressivement.

L’intervention probable de l’armée turque, suivie de la chute prévisible du «gouvernement autonome kurde», sonnera définitivement le glas des rêves de «remodelage» du Moyen-Orient. Ce, d’autant plus que, comme leur patron américain, les alliés des Etats-Unis sont en difficulté: La résistance somalienne relève la tête à Mogadiscio, la capitale, et mène la vie dure aux Ethiopiens, auxiliaires des Américains dans la Corne de l’Afrique. Au Pakistan, les attentats- suicides se succèdent et la «magie» Benazir Bhutto ne semble pas avoir agi dans le sens souhaité. Devant l’aggravation de la situation interne, Pervez Musharraf a suspendu la constitution en décrétant l’état d’urgence. Il s’agit de son deuxième coup d‘état.

Organisée à Syrte en Libye, la «conférence de paix» sur le Darfour s’est achevée par un fiasco. La «magie» Kadhafi, de son côté, ne fonctionne plus, depuis que ce dernier a plié l’échine devant la puissance de l’Occident. Par ailleurs, l’envoi de 3000 militaires de l’union Européenne au Tchad, avec une forte composante française, s’avère compliqué.

Selon le ministre australien de la défense, l’enjeu est, on ne plus clair: «Le Moyen-Orient, pas seulement l’Irak mais la région entière, est un important fournisseur d’énergie, de pétrole en particulier, pour le reste du monde (…) Et les Australiens, et nous tous, devons bien considérer ce qui arriverait en cas de retrait prématuré des troupes en Irak» (LM du 07/07/07).

Les tensions, les divisions et les guerres perdureront au Moyen-orient et en Afrique, tant que les fauteurs de guerre, ces gens réputés «civilisés», porteurs de «bonnes paroles démocratiques et humanistes» venus de très loin, n’auront pas été mis à la porte.