22.6.08

Analyse 14

Paix et Justice au Moyen-Orient

STRASBOURG, le 22 juin 2008

cpjmo@yahoo.fr

Les Etats-Unis, Israël

et leurs alliés européens

bafouent le droit international


Ils mettent en danger la paix dans le monde.

Pourquoi les Etats-Unis n'ont-ils pas sombré dans une dictature de type fasciste?


A entendre les officiels américains, israéliens et leurs alliés européens, ils sont les seuls à respecter le droit international. Qu'en est-il vraiment?

Bafouant la Charte de l'ONU, Georges Bush, soutenu par Tony Blair, avait obtenu le 11 octobre 2002, sans l'aval des Nations unies, le feu vert du congrès américain, pour attaquer l'Irak. La guerre, faut-il le rappeler, s'est déroulée dans un climat de désapprobation internationale quasi générale. Bilan humain: la guerre a provoqué des centaines de milliers de morts et contraint à l'exil en Syrie et en Jordanie, 2,3 millions d'Irakiens.

L'invasion de l'Irak (qualifiée d'illégitime par Kofi Anan, secrétaire général de l'ONU en exercice) s'appuyait sur deux mensonges: l'existence d'un arsenal d'armes de destruction massive entre les mains de Saddam Hussein et la possibilité d'autofinancer la guerre, grâce aux ventes de pétrole irakien.

La guerre a accéléré la militarisation de l'économie américaine, conduisant à l'enrichissement du complexe militaro-industriel, à l'affaiblissement de l'économie, à la dégradation des infrastructures et à l'appauvrissement de la population. Il est à souligner que la guerre d'Irak coûte, chaque mois, 12 milliards de dollars au Trésor américain, incapable d'empêcher l'affaiblissement continu du dollar. Le désinvestissement public aux Etats-Unis touche tous les secteurs: routes, hôpitaux, écoles, transports. "800 ponts menacent de s'écrouler et le réseau routier est mal entretenu. Parallèlement, le transport aérien est plus dégradé que jamais et le réseau ferroviaire (est) d'une vétusté antédiluvienne" (Sylvain Cypel- Le Monde du 02/05/08).

Dans son entreprise de démolition de l'économie américaine, Georges Bush est secondé par son ami français, Nicolas Sarkozy. Participant indirectement à la guerre d'agression contre l'Irak, les gendarmes français instruisent la gendarmerie irakienne. Et, Nicolas Sarkozy vante le "dynamisme" du modèle économique (militarisé) américain. Les propos de N. Sarkozy ont provoqué l'ire de Loren Thomson, spécialiste américain de la défense et du transport aérien du Lexington Institue: "dans la soirée, il y a toujours des invités qui arrivent à la fin, quand les premiers venus commencent à partir" (id).

L'Allemagne hitlérienne et l'Italie mussolinienne ont montré qu'une économie militarisée nourrit le nazisme et le fascisme, après avoir bafoué le droit international. Le "Patriot Act" de Georges Bush représente la version américaine du fascisme. Selon l'administration Bush, la loi internationale sur la torture peut être violée (LM du 29/04/08). De fait, Georges Bush a refusé d'interdire la torture (waterboarding ou simulacre de noyade) (LM du 11/03/08). En 2005, dans la cadre du renforcement des dispositions du "Patriot Act", le FBI a obtenu le droit d'exiger des fournisseurs d'accès à Internet, et aussi des compagnies de téléphone et des bibliothèques, qu'ils lui livrent les correspondances ou requêtes de leurs clients (LM du 9-10/09/07).

Pourtant, on est en droit de se demander pourquoi les Etats-Unis n'ont-ils pas sombré dans une dictature de type fasciste? C'est peut-être grâce à la puissance du secteur non militariste de l'économie américaine. Un indice: "la Chambre des représentants a adopté, mercredi 14 mai, une loi qui accorde 290 milliards de dollars d'aides aux agriculteurs américains. Le texte a été voté par la majorité démocrate, rejointe par 100 députés républicains, qui ont ignoré les appels de Georges Bush et, par leur nombre, mis la loi à l'abri du veto annoncé par le président" (LM du 16/05/08).

Les Etats-Unis ne respectent même pas la souveraineté de leurs alliés. A plusieurs reprises, les zones frontalières du Pakistan avec l'Afghanistan, ont été bombardées par l'aviation américaine, qui a tué, mardi 10 juin, 13 soldats pakistanais (Françoise Chipaux- LM du 17/06/08). L'espace aérien du Pakistan est fréquemment violé par des avions sans pilote ou des hélicoptères américains. Hamid Karzaï, le Quisling afghan des Etats-Unis, menace même de "traquer les talibans en territoire pakistanais" (id). Il va sans dire que la violation de la souveraineté pakistanaise par l'armée afghane ne peut se faire sans le feu vert des Etats-Unis.

Dans l'art de piétiner le droit international, l'allié israélien des Etats-Unis a dépassé toutes les bornes. En effet, depuis sa création, l'Etat d'Israël ne respecte aucune de ses obligations internationales. Le 19 mars 1978, le Conseil de sécurité des Nations unies a voté la résolution 425 et ordonné à Israël de se retirer du Liban. L'occupation du Liban ne cessera que 22 ans plus tard, sous les coups de boutoir de la résistance libanaise. En 1980, la Knesset vote une loi consacrant "Jérusalem capital éternelle et indivisible de l'Etat d'Israël". En août, l'initiative est condamnée par la résolution 478 du Conseil de sécurité des Nations unies qui y voit une violation du droit international, car la partie orientale de la ville a été conquise par la force, en juin 1967.

Concernant les négociations de "paix" avec les Palestiniens, la "feuille de route"- le plan de paix international- a prévu qu'Israël devait démanteler les colonies créées sans autorisation depuis mars 2001, et geler toutes les activités de colonisation, y compris celles qui concernent la croissance naturelle des implantations. Israël ne s'est conformé à aucune de ces obligations (LM du 17/06/08). Le 27 novembre 2007, l'Etat d'Israël a annoncé que 1300 nouveaux logements allaient être mis en chantier au nord de Jérusalem, à Ramat Shlomo (Michel Bôle-Richard; LM du 17/06/08). Par ailleurs, l'Etat d'Israël compte faire du mur de séparation en construction sa frontière orientale avec les Palestiniens, alors même que cet ouvrage a été jugé illégal par la Cour international de justice de La Haye.

Pendant ce temps- là "le nombre des obstacles sur les routes de Cisjordanie est passé de 566 à 607" entre le 30 septembre 2007 et le 29 avril 2008 (LM du 25-26/06/08) et le massacre des Palestiniens continue, au vu et au su de l'Union européenne. Depuis un an, près de 800 Palestiniens ont été tués, dont plus de 500 depuis la conférence de paix d'Annapolis, aux Etats-Unis, en novembre 2007 (LM du 19/06/08).

Dans son entreprise de non respect du droit international et de massacre systématique des Palestiniens, l'Union européenne soutient l'Etat d'Israël et le "récompense" en s'engageant dans un "partenariat renforcé".

Les Etats-Unis, Israël et l'Union européenne sont les premiers à soutenir l'insécurité mondiale et à bafouer la loi internationale. Face à ce dragon à trois têtes, les peuples et nations du monde ont le devoir et le droit légitime de se protéger et de se défendre par tous les moyens adéquats.

7.6.08

Analyse 13 (le 8 juin 2008). Sale temps pour Bush-Olmert

Paix et Justice au Moyen-Orient

STRASBOURG, le 08 juin 2008

cpjmo@yahoo.fr

Sale temps pour Bush- Olmert

Que penser de Barack Obama, adepte du "changement" ?

Voici ce que nous avons écrit dans le communiqué 35: "Moyen-Orient, Palestine: le vent tourne", datée du 22 mai 2007:

"Les Etats-Unis ne font plus peur. Selon l’ancien ministre israélien Yossi Beilin: «L’aggravation du conflit au Moyen-Orient est le symbole éclatant de l’affaiblissement de la puissance américaine». Les rapports de force évoluent lentement, mais sûrement, en faveur des forces anticolonialistes."

L'évolution de la situation en faveur du mouvement anticolonialiste au Moyen-Orient nous a conduit à rédiger l'analyse 10, du 13 avril 2008, dans laquelle on peut lire:

"L'unité d'action des anticolonialistes porte ses fruits. En effet, depuis l'été 2006, les Américano- israéliens ne sont victorieux dans aucun conflit. Après son échec au Liban, l'armée israélienne n'a pas atteint son objectif d'éradiquer le Hamas en Palestine. Les "négociations de paix" sont factices. Les Américano- israéliens ne sont plus en position de force..."

Parallèlement à l'affaiblissement des positions américaines au Moyen-Orient, les mouvements de résistance ont gagné en autorité. La situation de "ni paix, ni guerre", reflétant l'équilibre des forces, ne pouvait pas durer. Il était temps que les anticolonialistes passent à l'offensive. Mais, contre toute attente, ce sont les amis libanais des Etats-unis qui ont pris l'initiative. En provoquant le Hezbollah, ils ont perdu.

En effet, le "jeu" était particulièrement cristallisé autour de la présidence vacante de la République et du problème de la minorité de blocage au gouvernement, revendiquée depuis dix-huit mois par l'opposition. Le 14 décembre 2007, Nicolas Sarkozy estimait que le 17 décembre [2007], date prévue pour l'élection du président de la République par le parlement libanais, sera "le jour de la dernière chance" (Le Monde du 16-17/12/08). C'est que la France se considérait encore comme un acteur majeur de la scène politique libanaise, alors que "le vent" venait de tourner en faveur de la résistance.

Nicolas Sarkozy n'est pas le seul à avoir mal évalué l'évolution des rapports de force au Moyen-Orient. Dans un article intéressant publié dans "Le Monde Diplomatique" de juin 2008, Alain Gresh se pose la question:"Pourquoi le gouvernement a pris ces deux décrets? Pourquoi les Etats-unis et l'Union européenne ne sont-ils pas intervenus?" Voici la réponse d'un "analyste de la majorité", rapportée par le journaliste: M. Walid Joumblatt et M. Saad Hariri "ont fait de mauvais calculs, ils n'ont pas cru que le Hezbollah riposterait par les armes (...) Ils n'ont mesuré ni leur propre impuissance ni l'affaiblissement des Etats-Unis dans la région".

Concernant l'intervention des Américano- israéliens, selon M. K. Bhadrakumar, journaliste d'Asia Times Online [cité par http://www.info-palestine.net], qui rapporte la lettre d'information de Counter Punch- dont le siège se trouve à Washington- une intervention israélienne planifiée (avec l'approbation des Etats-Unis) durant les derniers combats au Liban a dû être annulée à la dernière minute sur la base d'informations selon lesquelles le Hezbollah riposterait massivement. Selon ces renseignements, Tel Aviv serait la cible "d'approximativement 600 missiles du Hezbollah dans les premières 24 heures, en représailles".

On connaît la suite: ce qu'elle n'avait pas pu obtenir pacifiquement, l'opposition l'a eu après la démonstration de force, à savoir: la minorité de blocage au sein du futur gouvernement et un nouveau découpage des circonscriptions électorales. Une fois de plus, une modification du rapport des forces a du s'accompagner d'une sorte de "clash" entre les protagonistes.

Il faut souligner que la résistance libanaise, bien entraînée, aguerrie, équipée de moyens de communication autonomes et de matériels de guerre modernes comme des missiles sol-sol, sol- mer, est devenue une puissance capable de défendre la souveraineté du Liban et d'affronter la puissante armée israélienne. Dépendant des équipements occidentaux, l'armée libanaise, par contre, comme les armées des pays arabes de la région, est toujours en état d'infériorité par rapport à l'armée israélienne.

Les conséquences de la victoire de l'opposition libanaise sont multiples: pourparler "secret" entre la Syrie et Israël, l'échange de prisonniers contre les dépouilles des soldats israéliens morts au Liban pendant la guerre de l'été 2006; contact direct entre Nicolas Sarkozy et Bachar El-Assad; contact entre la France et le Hamas; etc.

Par ailleurs, Olmert est poursuivi pour une affaire de corruption, affaire aggravée par ses échecs politiques et militaires. Suite au fiasco militaire et politique de la clique Bush- Olmert, il va sans dire que l'accord de Doha du 21 mai, conclut entre la "majorité" pro-occidentale et l'opposition libanaise, n'est qu'une trêve et d'autres victoires attendent les anticolonialistes du Moyen-Orient.

Le changement de rapports de force au Moyen-Orient n'épargne pas Washington. D'aucuns pensent que le duel Hillary Clinton- Barack Obama est simplement celui de deux candidats du même bord, puisque du même parti, à la recherche d'investiture. De fait, la différence entre ces deux candidats représente celle de deux lignes politiques différentes. En effet, l'administration Bush, dominée par les néoconservateurs, ne pouvait pas se lancer dans une nouvelle aventure colonialiste à l'échelle planétaire sans l'assentiment de la majorité de la bourgeoisie américaine. L'unité fut donc réalisée grâce au ralliement d'une fraction du parti démocrate menée par le couple Clinton.

Bien que consciente du caractère illégitime de la guerre d'Irak, Hillary Clinton vota en faveur de l'invasion, allant jusqu'à rendre visite aux militaires américains en Irak. Même pendant la campagne pour l'investiture démocrate, ses spots publicitaires centrés sur la peur, autant que son ton martial visant le bombardement de l'Iran, trahissaient sa proximité avec les néoconservateurs.

Le recentrage de la diplomatie américaine et celui du parti démocrate ont conduit à la marginalisation des partisans de l'actuelle diplomatie américaine au sein du parti démocrate, menés par le couple Clinton.

Par ailleurs, que penser de Barack Obama, adepte du "changement"? Une fois élu, il sera le représentant du plus puissant pays colonialiste du monde. Les opprimés et les anticolonialistes ne peuvent se faire d'illusions à son sujet et devraient se préparer à l'affronter comme ils l'ont fait avec Bush.

Après les échecs répétés de la politique des néoconservateurs, Barack Obama (s'il respecte ses engagements) offrira pourtant un nouveau visage des Etats-Unis et sera amené à tenir compte des rapports de force en matière militaire et diplomatique.

Il n'est un secret pour personne, avec ou sans Obama, que la libération totale du Moyen-Orient est encore loin et nécessitera beaucoup de sacrifices.