22.4.09

Analyse 8 (2009)

Paix et justice au Moyen-Orient

STRASBOURG, le 22 avril 2009

cpjmo@yahoo.fr


Des démocraties racistes et colonialistes?


Que révèle la conférence de Durban II ?


La conférence de l’ONU sur le racisme, organisée à partir du 20 avril, à Durban en Suisse, révèle l’énorme fossé qui sépare toujours l’Orient le sud, de l’Occident le nord. L’éditorial du journal Le Monde du 21 avril 2009 est, à cet égard, édifiant. Pour l’éditorialiste, l’absence de quelques pays occidentaux dont les Etats-Unis, le Canada, l’Australie, la Nouvelle-Zélande et Israël, affublés du titre, oh combien glorieux, de «démocraties», «constitue un succès pour les dictatures intégristes de tous horizons qui s’emploient, méthodiquement, à instrumentaliser les droits de l’homme pour mieux en contester les obligations de s’en exonérer- au nom du respect des cultures ou des religions.»


Si nous comprenons bien, les pays occidentaux, ou assimilés, absents à Durban, n’ont jamais «instrumentalisé les droits de l’homme pour mieux en contester les obligations de s’en exonérer», à quelque titre que ce soit !


Parlons de démocratie. A qui appartiennent les médias (la presse écrite, la radio et les chaînes de télévision), manipulateurs des pensées et faiseurs de rois des pays dits démocratiques? N’est-ce pas à l’oligarchie dominante, de type Berlusconi, Lagardère et autres Dassault? S’il est vrai qu’il y a un duel entre différentes tendances de l’oligarchie pour départager le pouvoir dans un pays, le droit d’exister des masses populaires a été arraché suite à de longues luttes syndicales et sociales. Rappelons-nous le combat des ouvriers qui, poussés par la crise et face à l’indifférence du pouvoir politique au service de l’oligarchie financière (le paquet fiscal), sont obligés de séquestrer les patrons pour se faire entendre.


Seule la présence permanente de la société civile sur la scène de la lutte sociale permet à cette dernière de ranimer l’Etat de droit, un acquis oh combien fragile. Même la presse aux ordres se fait l’écho des menaces permanentes qui visent les libertés démocratiques. «La LDH dénonce un recul de droits et libertés»»(1). L’article L 622-1 du code du séjour des étrangers constitue, à lui seul, une grave atteinte à l’Etat de droit. L’article stipule que «Toute personne qui aura, par aide directe ou indirecte, facilité ou tenté de faciliter l’entrée, la circulation ou le séjour irrégulier d’un étranger en France sera punie d’un emprisonnement de cinq ans et d’une amende de 30 000 euros»(2). Imaginons-nous un instant sous le régime de Vichy et remplaçons l’«étranger» par le «juif» et nous saisirons davantage toute l’horreur dudit article. Rien que dans le Pas-de-Calais, 9 bénévoles ont été mis en cause en six ans pour avoir aidé des migrants clandestins.


Qui plus que les «démocraties» emblématiques de l’Occident, comme la Grande Bretagne, la France ou les Etats-Unis manipulent les droits de l’homme, à toute fins confondues? Faut-il rappeler que l’invasion de l’Irak et de l’Afghanistan, l’envoi de troupes dans les Balkans et en Afrique se sont réalisés au nom de la défense des droits de l’homme et de la femme? Répandre la démocratie dans le monde est une autre supercherie américaine qui coûta (et coûte encore) la vie à plus de 600 000 Irakiens? Personne ne peut douter du fait que derrière la défense des droits de l’homme claironnée par l’Occident se profilent des visées expansionnistes de pillage des ressources et de contrôle des voies de communication.


La Palestine est un autre exemple de duplicité occidentale: celle-ci, au nom de la démocratie, laisse les mains libres à l’Etat d’Israël qui, depuis sa création, enfreint toutes les lois internationales. Pendant ce temps là, l’épuration ethnique progresse à Jérusalem-est. Le régime d’apartheid, l’humiliation des Palestiniens, les check-points et la colonisation, décrétée illégale par la «communauté internationale», se développent en Cisjordanie et, avec la bénédiction tacite de l’Occident, les Palestiniens, hommes, femmes et enfants, tombent sous les balles de Tsahal, incontrôlable. Qu’ont-elles fait, les «démocraties occidentales» lors du dernier massacre des Gazaouis par l’armée israélienne, utilisant des bombes au phosphore et à l’uranium appauvri?


En Afrique du Sud, l’apartheid était qualifié de racisme. Comment qualifier autrement l’apartheid en Palestine?


L’étude de la pratique en vigueur en Occident montre qu’à partir du moment où un pays est qualifié de «démocratie», comme c’est le cas des Etats-Unis, de la Grande Bretagne, de la France ou de l’Allemagne, il lui est permis de mentir, de torturer, de massacrer des populations civiles, d’utiliser des armes interdites ou de coloniser un pays souverain.


Prenons le cas de Guantanamo, une prison gérée hors conventions de Genève, prison où la torture était pratiquée sous administration Bush qui a menti face au monde (armes de destruction massive en Irak) lors de l’invasion illégale de l’Irak. Faut-il rappeler que la même administration avait mis les citoyens américains sur écoute et que la loi sécuritaire «Patriot act» ressemble à une loi fasciste? L’invasion de l’Afghanistan, effectuée soi-disant pour permettre la construction d’une société afghane basée sur des principes démocratiques, respectant les droits de l’homme et de la femme, est un autre mensonge. Que penser de la prison de Bagram, le Guantanamo afghan, tenue par les Américains, où des prisonniers afghans sont morts sous la torture? Que penser de l’Etat afghan, le premier narco-Etat mis en place par l’OTAN? Faut-il rappeler la corruption généralisée en Afghanistan dont les premiers bénéficiaires sont les entreprises, les ONG et autres rapatriés américains? Que dire des bases militaires américaines, construites aux quatre coins de l’Afghanistan, aux frontières de la Russie, de l’Iran, de la Chine et de l’Inde? Comment qualifier l’armée américaine qui sème abondamment la mort à l’uranium appauvri en Afghanistan et en Irak? Pourquoi la «presse démocratique» occidentale garde-t-elle le silence sur les crimes de guerre commis par les pays occidentaux et leur allié israélien au Moyen-Orient et en Asie centrale?


L’Irak, l’Afghanistan, la Palestine sont autant d’exemples qui révèlent que, de l’Atlantique à l’Hindou-Kouch, en passant par le Moyen-Orient, les mensonges, tortures, destructions, les pillages des ressources et le colonialisme façonnent la diplomatie occidentale «démocratique»!


L’absence de certains pays «démocratiques» à Durban II est un signe de faiblesse des pays absents, révélant que les rapports de force évoluent lentement en faveur de l’Orient le sud.


(1) Dernières Nouvelles d’Alsace (DNA) du 10/04/09.

(2) Le Monde du 09/04/09.