Paix et Justice au Moyen-Orient
STRASBOURG, le 04 septembre 2010
Israël- Palestine : les comptines de Barack Obama
Pour les États-Unis, le «remodelage» du Moyen-Orient (sa soumission) est toujours à l’ordre du jour
«La rencontre prévue entre M. Obama, M. Netanyahou et Mahmoud Abbas, le président palestinien, aurait bien lieu mardi 22 septembre en marge de l’Assemblée générale des Nations unies». Il s’agit, bien entendu, du 22 septembre 2009 ! (1) Et la journaliste de rajouter «Barack Obama ne désespère pas d’obtenir du premier ministre israélien des concessions, afin de montrer que ses efforts pour relancer le processus de paix ne sont pas totalement vains.»
Un an après, rebelote. «Benyamin Netanyahou et Mahmoud Abbas ont accepté, vendredi 20 août, l’invitation de Hillary Clinton, la secrétaire d’Etat américaine, à renouer le dialogue direct, interrompu depuis deux ans. Une séance de travail se tiendra le 1er septembre à Washington.» (2) Il s’agit, cette fois-ci, du 1er septembre 2010.
Après Madrid (1991-1993), Oslo (1993- 2000), Annapolis (2008), New York (2009), Washington (2010), les prochaines rencontres auront-elles lieu en 2012, 2013, 2014,…, 3000,…,4000,… ?
Dans un article très intéressant, Benjamin Barthe, journaliste au quotidien Le Monde, résume en une phrase l’impasse des soi-disant négociations : «… Les termes de ce nouveau round de négociations, flous et lacunaires, perpétuent un rapport de forces que les analystes jugent asymétriques entre Israéliens et Palestiniens, sur lequel tous les précédents processus ont achoppé.»(3)
Tout réside dans ce «rapport de forces asymétriques» militaires et politiques sur lequel achoppent les soi-disant processus de paix. Car, depuis que les États existent, les rapports entre eux sont régis ainsi : ce qui a été pris par la force militaire, ne sera rendu que par la force militaire. Or, sur les plans militaire et diplomatique, que vaut l’«autorité autonome palestinienne»? Rien, face à la machine de guerre d’Israël et son soutien inconditionnel, les États-Unis ! Israël reçoit chaque année trois milliards de dollars d’aides militaires américaines qui représentent plus de la moitié de la totalité de l’aide militaire internationale des États-Unis, et maintiennent, coûte que coûte, la supériorité militaire qualitative d’Israël.
La Palestine n’est qu’un morceau du grand puzzle, s’étendant des frontières chinoises jusqu’en Afrique. Aux yeux des empires occidentaux, au même titre que l’Irak, l’Afghanistan, le Liban, la Syrie et les pays arabes du Golfe persique, la Palestine n’est qu’un territoire et ne peut (et ne doit) disposer d’un État indépendant, digne de ce nom.
Déjà, l’existence des États indépendants syrien et libanais relève du miracle. Après le renversement des États irakien et afghan, c’était au tour des États syrien et libanais indépendants d’être renversés par l’armée israélienne. Mais l’échec américain en Irak, la paralysie des armées occidentales en Afghanistan et la crise économique ont retardé- nous disons bien retardé- le projet occidental. Pour l’Occident, mené par les États-Unis, le «remodelage» du Moyen-Orient (sa soumission) est toujours à l’ordre du jour.
Face à la machine de guerre américano-israélienne, les Palestiniens, seuls, ne sont pas en mesure de modifier les rapports de force en leur faveur. L’avenir de la Palestine dépend donc de l’évolution des rapports de force militaire et diplomatique, au Moyen-Orient, en Asie centrale et en Afrique.
Une étude historique montre que la guerre de l’Occident en Orient lointain dure depuis 1809 (201 ans). Anthony Cordesman, «expert indiscuté des affaires militaires au Centre américain des études stratégiques et internationales» a dit à propos de l’Irak : la guerre d’Irak «n’est ni terminée ni gagnée»(4). Ce qui est vrai pour l’Irak, l’est pour l’Orient : la guerre de l’Occident contre l’Orient «n’est ni terminée, ni gagnée».
S’il y a paralysie en Irak et en Afghanistan, la guerre anticolonialiste peut être gagnée par la résistance somalienne dont l’adversaire principal, regroupé au sein du «Gouvernement Fédéral de Transition» (TFG), est corrompu et incompétent. Divergences entre commandants, désertions, soldes détournées par les responsables minent les force pro-TFG.(5)
Sans le soutien des armées africaines (Ouganda, Guinée, Djibouti) et l’appui des Etats-Unis, de la France, de Éthiopie, etc., le TFG aurait depuis longtemps disparu.
Concernant l’Irak, ce qui compte pour les États-Unis, c’est un État irakien à leur solde. Avec la ralliement des tribus sunnites, les États-Unis ont atteint leur objectif. Mais l’Irak, est un pays difficile à gérer. Depuis le début de son existence, ce pays a connu plus d’une cinquantaine de coups d’état et de tuerie multiples. D’autres coups d’état nationalistes et massacres surviendront et les États-Unis agiront en conséquence.
Faut-il rappeler qu’aujourd’hui, les États-Unis ont perdu beaucoup de leur puissance. Il arrivera un jour où les nationalistes irakiens finiront par libérer définitivement leur pays. C’est une autre histoire qui demande du temps.
L’Afghanistan est différent. Les Afghans, un peuple montagnard, n’ont jamais accepté de chef d’état inféodé à une puissance étrangère, qualifiée de «despote des plaines». D’autant plus que l’Afghanistan est un champ de bataille des puissances régionales. La combinaison de ces facteurs rend encore plus difficile la victoire, voire le retrait américain, sous les conditions actuelles. Le remplacement d’Hamid Karzaï par une personnalité politique d’apparence nationaliste, dont les liens avec le «despote des plaines» ne sont pas connus du grand public, pourrait donner le signal d’un changement en Afghanistan.
La Cisjordanie devra attendre sa libération. La seule parcelle de Palestine ayant retrouvé sa souveraineté, c’est la bande de Gaza, encerclée et asphyxiée.
La bande de Gaza, le Liban et la Syrie sont les prochaines cibles de l’armée israélienne et c’est sous cet angle qu’il faut analyser la relance des «négociations de paix», patronnées par les États-Unis, dont l’objectif est la neutralisation de l’autorité palestinienne et l’assoupissement de la population arabo-musulmane, avec la complicité des pays arabes «amis» (Égypte, la Jordanie, l’Arabie saoudite).
(1) Corine Lesnes- Le Monde du 22 septembre 2009
(2) Benjamin Barthe- Le Monde du 22-23 août 2010
(3) Benjamin Barthe- Le Monde du 22-23 août 2010
(4) Patrice Claude- Le Monde du 24 août 2010
(5) Jean-Philippe Rémy- Le Monde du 26 août 2010