Paix et Justice au Moyen-Orient
STRASBOURG, le 08 juin 2008
Sale temps pour Bush- Olmert
Que penser de Barack Obama, adepte du "changement" ?
Voici ce que nous avons écrit dans le communiqué 35: "Moyen-Orient, Palestine: le vent tourne", datée du 22 mai 2007:
"Les Etats-Unis ne font plus peur. Selon l’ancien ministre israélien Yossi Beilin: «L’aggravation du conflit au Moyen-Orient est le symbole éclatant de l’affaiblissement de la puissance américaine». Les rapports de force évoluent lentement, mais sûrement, en faveur des forces anticolonialistes."
L'évolution de la situation en faveur du mouvement anticolonialiste au Moyen-Orient nous a conduit à rédiger l'analyse 10, du 13 avril 2008, dans laquelle on peut lire:
"L'unité d'action des anticolonialistes porte ses fruits. En effet, depuis l'été 2006, les Américano- israéliens ne sont victorieux dans aucun conflit. Après son échec au Liban, l'armée israélienne n'a pas atteint son objectif d'éradiquer le Hamas en Palestine. Les "négociations de paix" sont factices. Les Américano- israéliens ne sont plus en position de force..."
Parallèlement à l'affaiblissement des positions américaines au Moyen-Orient, les mouvements de résistance ont gagné en autorité. La situation de "ni paix, ni guerre", reflétant l'équilibre des forces, ne pouvait pas durer. Il était temps que les anticolonialistes passent à l'offensive. Mais, contre toute attente, ce sont les amis libanais des Etats-unis qui ont pris l'initiative. En provoquant le Hezbollah, ils ont perdu.
En effet, le "jeu" était particulièrement cristallisé autour de la présidence vacante de la République et du problème de la minorité de blocage au gouvernement, revendiquée depuis dix-huit mois par l'opposition. Le 14 décembre 2007, Nicolas Sarkozy estimait que le 17 décembre [2007], date prévue pour l'élection du président de la République par le parlement libanais, sera "le jour de la dernière chance" (Le Monde du 16-17/12/08). C'est que la France se considérait encore comme un acteur majeur de la scène politique libanaise, alors que "le vent" venait de tourner en faveur de la résistance.
Nicolas Sarkozy n'est pas le seul à avoir mal évalué l'évolution des rapports de force au Moyen-Orient. Dans un article intéressant publié dans "Le Monde Diplomatique" de juin 2008, Alain Gresh se pose la question:"Pourquoi le gouvernement a pris ces deux décrets? Pourquoi les Etats-unis et l'Union européenne ne sont-ils pas intervenus?" Voici la réponse d'un "analyste de la majorité", rapportée par le journaliste: M. Walid Joumblatt et M. Saad Hariri "ont fait de mauvais calculs, ils n'ont pas cru que le Hezbollah riposterait par les armes (...) Ils n'ont mesuré ni leur propre impuissance ni l'affaiblissement des Etats-Unis dans la région".
Concernant l'intervention des Américano- israéliens, selon M. K. Bhadrakumar, journaliste d'Asia Times Online [cité par http://www.info-palestine.net], qui rapporte la lettre d'information de Counter Punch- dont le siège se trouve à Washington- une intervention israélienne planifiée (avec l'approbation des Etats-Unis) durant les derniers combats au Liban a dû être annulée à la dernière minute sur la base d'informations selon lesquelles le Hezbollah riposterait massivement. Selon ces renseignements, Tel Aviv serait la cible "d'approximativement 600 missiles du Hezbollah dans les premières 24 heures, en représailles".
On connaît la suite: ce qu'elle n'avait pas pu obtenir pacifiquement, l'opposition l'a eu après la démonstration de force, à savoir: la minorité de blocage au sein du futur gouvernement et un nouveau découpage des circonscriptions électorales. Une fois de plus, une modification du rapport des forces a du s'accompagner d'une sorte de "clash" entre les protagonistes.
Il faut souligner que la résistance libanaise, bien entraînée, aguerrie, équipée de moyens de communication autonomes et de matériels de guerre modernes comme des missiles sol-sol, sol- mer, est devenue une puissance capable de défendre la souveraineté du Liban et d'affronter la puissante armée israélienne. Dépendant des équipements occidentaux, l'armée libanaise, par contre, comme les armées des pays arabes de la région, est toujours en état d'infériorité par rapport à l'armée israélienne.
Les conséquences de la victoire de l'opposition libanaise sont multiples: pourparler "secret" entre la Syrie et Israël, l'échange de prisonniers contre les dépouilles des soldats israéliens morts au Liban pendant la guerre de l'été 2006; contact direct entre Nicolas Sarkozy et Bachar El-Assad; contact entre la France et le Hamas; etc.
Par ailleurs, Olmert est poursuivi pour une affaire de corruption, affaire aggravée par ses échecs politiques et militaires. Suite au fiasco militaire et politique de la clique Bush- Olmert, il va sans dire que l'accord de Doha du 21 mai, conclut entre la "majorité" pro-occidentale et l'opposition libanaise, n'est qu'une trêve et d'autres victoires attendent les anticolonialistes du Moyen-Orient.
Le changement de rapports de force au Moyen-Orient n'épargne pas Washington. D'aucuns pensent que le duel Hillary Clinton- Barack Obama est simplement celui de deux candidats du même bord, puisque du même parti, à la recherche d'investiture. De fait, la différence entre ces deux candidats représente celle de deux lignes politiques différentes. En effet, l'administration Bush, dominée par les néoconservateurs, ne pouvait pas se lancer dans une nouvelle aventure colonialiste à l'échelle planétaire sans l'assentiment de la majorité de la bourgeoisie américaine. L'unité fut donc réalisée grâce au ralliement d'une fraction du parti démocrate menée par le couple Clinton.
Bien que consciente du caractère illégitime de la guerre d'Irak, Hillary Clinton vota en faveur de l'invasion, allant jusqu'à rendre visite aux militaires américains en Irak. Même pendant la campagne pour l'investiture démocrate, ses spots publicitaires centrés sur la peur, autant que son ton martial visant le bombardement de l'Iran, trahissaient sa proximité avec les néoconservateurs.
Le recentrage de la diplomatie américaine et celui du parti démocrate ont conduit à la marginalisation des partisans de l'actuelle diplomatie américaine au sein du parti démocrate, menés par le couple Clinton.
Par ailleurs, que penser de Barack Obama, adepte du "changement"? Une fois élu, il sera le représentant du plus puissant pays colonialiste du monde. Les opprimés et les anticolonialistes ne peuvent se faire d'illusions à son sujet et devraient se préparer à l'affronter comme ils l'ont fait avec Bush.
Après les échecs répétés de la politique des néoconservateurs, Barack Obama (s'il respecte ses engagements) offrira pourtant un nouveau visage des Etats-Unis et sera amené à tenir compte des rapports de force en matière militaire et diplomatique.
Il n'est un secret pour personne, avec ou sans Obama, que la libération totale du Moyen-Orient est encore loin et nécessitera beaucoup de sacrifices.
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