Paix et Justice au Moyen-Orient
STRASBOURG, le 11
mai 2013
L’avenir du monde en 2030 se joue-t-il
en Syrie ?
Le forcing de l’Occident mené par les Etats-Unis va-t-il
aboutir ?
La
Syrie subit l’encerclement de ses voisins ennemis : Israël, la Turquie, la
Jordanie, l’Arabie saoudite, elle-même appuyée par le Qatar. Aucun de ces
voisins ne ménage ses forces et ses ressources financières pour venir à bout du
régime de Bachar Al-Assad, par « rébellion » interposée.
Nous
mettons rébellion entre guillemets ; car, sans nier le caractère
dictatorial du régime syrien, ni sous estimer le martyre du peuple syrien, une
grande partie de la « rébellion » syrienne revêt le caractère d’une
cinquième colonne de forces étrangères, liguées contre un Etat souverain,
membre des Nations-Unies.
La
dernière intervention en Syrie a été le bombardement, dimanche 5 mai, de la
banlieue de Damas et de ses environs par l’aviation israélienne. Tout porte à
croire que l’attaque de l’aviation israélienne était bien calculée comme
soutien des « rebelles », dans le but d’affaiblir le pouvoir syrien,
dont le sort sera négocié entre les « grandes puissances » lors de la
prochaine conférence internationale. L’attaque israélienne a eu lieu au moment
où, selon Laurent Zecchini du Monde, le pouvoir syrien a « lancé
une offensive d’envergure pour sécuriser son « territoire utile »,
allant de Damas, la capitale, à Lattaquié, au nord de la côte méditerranéenne,
en passant par Homs et Qusai, tout en tenant de contenir la poussée rebelle au
sud, dans la région de Deraa » (Le Monde du 7 mai).
L’encerclement
ne concerne pas que le pouvoir syrien. De son côté, l’Iran, soutien du pouvoir
syrien, est confronté au pire blocus économique et militaire de son histoire.
En vue de bloquer les capitaux iraniens, estimés entre 60 et 100 milliards de
dollars, placés dans des pays amis de l’Iran, le Sénat américain compte exercer
des pressions sur lesdits pays. Militairement, l’Iran est encerclé par une
centaine des bases américaines et les Etats-Unis prévoient installer 9 bases
militaires permanentes en Afghanistan, dont 3 se trouvent déjà près de Hérat,
ville persanophone d’Afghanistan, à l’Est de Meched.
La
pression militaire et financière sur la Syrie, l’Iran, la Russie, voire même la
Chine, est énorme. Les bases américaines en Asie centrale et en Afghanistan
visent à contrôler les pays limitrophes de l’Afghanistan : l’Iran, la
Russie et la Chine. Ces trois pays devront immobiliser une grande partie de
leurs forces armées pour faire face aux velléités d’agression américaine. Le
renforcement du potentiel militaire des pays satellites des Etats-Unis dans la
région a comme conséquence d’accroître encore la pression militaire sur les
puissances régionales opposées à l’hégémonie des Etats-Unis.
Il
est à souligner qu’une guerre sans merci se livre en Syrie, sans tenir compte
du Conseil de sécurité des Nations-Unies. Cette guerre fait partie de ce que
les anticolonialistes qualifient de « lutte pour le partage des zones
d’influence ». Ce partage risque de coûter très cher aux puissances
orientales si elles n’arrivent pas à contenir la poussée américaine.
Malgré
la pression militaire et financière, « les Russes ne mollissent pas »
relève Corine Lesnes, dans Le Monde du 7 mai. Pourquoi « molliraient
»-ils si, en position de force, ils parviennent à négocier sur la Syrie avec
les Etats-Unis? En effet, suite aux menaces nord coréennes, qui semblent avoir
réussi à contrebalancer les pressions américaines sur la Syrie, le secrétaire
d’Etat américain John Kerry, était les 8 et 9 mai, en Russie pour parler du
problème syrien et évoquer la tenue d’une conférence internationale. John Kerry
a reconnu explicitement que les deux puissances ont des « intérêts
communs » en Syrie. Face aux Américains, les Russes semblent avoir
marqué un point non négligeable.
De
son côté, la « République islamique ne cède pas » relève Alain
Frachon, dans Le Monde du 12 avril. Le chroniqueur vise, bien sûr, le « dossier
nucléaire » iranien. Mais il faut être naïf pour ne pas voir derrière
le dit dossier un contentieux d’ordre géopolitique entre les Etats-Unis et
l’Iran, prêt à « perdre une province » plutôt que de « perdre
la Syrie », selon les aveux d’une haute autorité iranienne. Selon la
même autorité : « si, aujourd’hui, les Etats-Unis mettaient la
main sur Damas, demain ils se retrouveraient à Téhéran ».
Les
soutiens de l’Iran ne manquent pas. « Pékin et Moscou ont dit qu’ils ne
voteraient pas de nouvelles [sanctions]. En mars, le sommet des BRICS (Brésil,
Russie, Inde, Chine, Afrique du Sud) a réaffirmé son opposition « aux
menaces militaires et aux sanctions unilatérales », et le groupe
considère que les mesures commerciales les plus dures contre l’Iran, celles
décidées par les Etats-Unis et l’Europe, sont « unilatérales »».
(Alain Frachon- Le Monde du 12 avril 2013). Exit l’ONU ; vive la loi du
plus fort (Etats-Unis et Europe) : la loi de la jungle.
Tout
porte à croire que l’enjeu de la « bataille de Syrie » dépasse
largement le cadre d’un pays ou d’une région. En effet, selon l’un des
« quatre scénarios de la CIA pour 2030 » (1), la centrale
américaine prévoit une bipolarisation du monde en 2030, autour de deux
« superpuissances » : les Etats-Unis et la Chine.
En
cas de victoire des Etats-Unis dans la « bataille de Syrie », les
Américains arriveraient à resserrer leur étau autour de la Chine, incapable,
dans une telle situation, de jouer son rôle de
« superpuissance » ; et le « monde unipolaire » se trouverait
sous les fourches caudines des Etats-Unis.
Nous
n’en sommes pas encore là. Mais, l’épée de Damoclès des Etats-Unis menace
l’humanité de la domination sans partage du monde.
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