2.8.07

Communiqué 46

Paix et Justice au Moyen-Orient
STRASBOURG, le 03 août 2007

cpjmo@yahoo.fr

Le pétrole, l’uranium, l’«ingérence humanitaire»

et la campagne d’évangélisation


Pour s’implanter durablement, les colonialistes tentent d’ «évangéliser» les Afghans et les Irakiens.


Depuis la naissance des sociétés bourgeoises en Occident, la recherche des matières premières a conduit les pays industrialisés d’Europe à l’aventure coloniale. Tour à tour, le continent africain, le Moyen-Orient, les Indes, la Chine, l’Océanie et l’Amérique ont été colonisés, certaines îles furent annexées, des régions entières vassalisées, des populations autochtones brutalisées, voire massacrées et les ressources minières pillées.

Accompagné d’une cohorte de missionnaires évangéliques, le colonialisme a opéré sous un couvert idéologique, dans le but d’apporter l’«éducation et la civilisation». Au mépris de la vie culturelle des hommes, combattant les coutumes locales et commettant des «génocides culturels», le colonialisme a imposé sa langue et sa culture aux différents pays et régions du monde. Ces temps honteux pour l’humanité sont-ils révolus? La réponse est affirmative pour Nicolas Sarkozy, en quelque sorte héritier de la mémoire colonial française. Lors de son intervention à Dakar à l’université Cheikh Anta Dio, jeudi 26 juillet, fustigea les colonialistes dans des termes peu amènes : «Ils ont cru qu’ils étaient la civilisation (…). Ils ont abîmé une sagesse ancestrale. (…) Le colonisateur a pris, s’est servi, il a exploité, il a pillé des ressources (…) Ils ont eu tort» (Le Monde du 2807/07).

Pourtant, les besoins en matières premières des pays industrialisés restent immenses. De plus, la concurrence fait rage entre les puissances économiques, politiques et militaires et tous les coups sont permis pour éliminer les concurrents. L’intervention américaine en Irak a permis d’éliminer les Russes et les Français. Par rapport au passé la seule chose qui a changé, ce sont les motifs invoqués pour justifier l’intervention militaire colonialiste. Désormais, celle-ci se fait au nom des «droits de l’homme», afin de faciliter les «activités humanitaires» et «mettre fin aux souffrances des populations».

Actuellement, l’Afrique, plus particulièrement ses zones riches en pétrole et en uranium, intéresse l’Occident. Signe des temps, les Etats-Unis donnent naissance à un nouveau commandement militaire –unique- sur le continent africain appelé «Africom» qui sera opérationnel en 2008. Afin de protéger leurs intérêts stratégiques, les Etats-Unis s’activent du golfe de Guinée, zone riche en pétrole à l’Ouest, jusqu’en Somalie et à Djibouti à l’Est de l’Afrique où ils maintiennent 1800 soldats.

Les colonialistes s’allient avec les notables locaux généralement corrompus qui, pour se maintenir au pouvoir, sont prêts à sacrifier les richesses nationales sur l’autel des puissances occidentales. Vivant dans des conditions misérables, sans éducation, sans eau courante, sans électricité, sans routes digne de ce nom, les populations autochtones se révoltent souvent contre les potentats locaux et leurs soutiens étrangers. Elles demandent un partage équitable des richesses extraites du sous sol. C’est le cas du Niger, pays voisin de la Libye, du Tchad, du Nigeria et du Mali. Le sous sol nigérien est riche en uranium (3e producteur mondial) et en pétrole. Or, les Nigériens vivent dans la misère et la révolte contre le pouvoir central est menée par le «Mouvement des Nigériens pour la justice» (MNJ), un groupe rebelle dirigé par des Touareg. Consciente des rapports de force et prévoyante, la France tente de «négocier» aussi bien avec le pouvoir central qu’avec les insurgés. Chose inacceptable par le pouvoir central qui a expulsé du Niger le responsable des activités d’Areva, le groupe spécialisé dans le nucléaire (LM du 28/07/07).

Concernant l’Afrique, tout indique que la France est sur la même longueur d’onde que les Etats-Unis. La présence à Djibouti des militaires américains en témoigne. D’ailleurs le choix de Bernard Kouchner comme ministre des affaires étrangères n’est pas fortuit. Gouverneur du Kosovo, donc homme de confiance de Washington, le «french doctor», adepte des «couloirs humanitaires», un des représentants des milieux atlantistes français, symbolise le rapprochement fronco-américain. En ce moment, la France et les Etats-Unis agissent de concert sur le Soudan et le Darfour. L’envoi d’une force militaire européenne, à dominante française, dans l’Est du Tchad et le Nord-Est de la république Centrafricaine (première étape de l’«ingérence humanitaire» au Darfour?) ne pouvait pas se faire sans l’assentiment des Américains qui, guignant le pétrole soudanais, comptent faire passer la part africaine de leurs importations pétrolières de 15% à 25% à l’horizon 2015 (LM du 19/07/07).

Hormis des enjeux énergétiques (pétrole et uranium), le rapprochement hâtif de la France avec la Libye, est-il le signe de l’intérêt grandissant de la France à utiliser ce pays comme base arrière dans ses nouvelles aventures africaines? En effet, cinq accords, dont un militaire, ont été paraphés entre la France et la Libye. Connaîtra-t-on un jour les clauses secrètes de ces accords? A ce sujet, l’éditorial du Monde du 27 juillet, qui ne cache pas ses penchants atlantistes, est éloquent : «Le colonel Kadhafi peut être un interlocuteur central dans les conflits qui ensanglantent l’Afrique de l’Est, au Darfour notamment.» D’autant plus qu’en proposant de construire une centrale nucléaire en Libye, la France sait comment, en cas de besoin, faire pression sur ce pays! «Il existe, en cas de crise, «un système permettant de désactiver une centrale nucléaire depuis l’extérieur » (LM du 28/07/07). CQFD!

Quoique le colonialisme à l’ancienne est répudié par les colonisateurs, ces derniers n’en utilisent les anciennes méthodes pour asservir un pays: expédition armées, destruction des pays agressés, massacre des populations civiles, pillage des ressources, «évangélisation», etc., sont pratiques courantes. L’Irak et l’Afghanistan sont deux exemples évidents de la persistance de l’esprit colonialiste en Occident. Kidnappés par la résistance afghane, les «évangélistes» Sud- coréens avaient accompagné les troupes occidentales. Mais, les colonialistes ont confondu l’Afrique noire, continent peu développé, et le Moyen-Orient, région riche d’une civilisation millénaire. Pour faciliter le pillage des richesses du sous-sol, cette fois-ci, l’«évangélisation» ne marchera probablement ni en Afghanistan ni en Irak.

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