Paix et Justice au Moyen-Orient
STRASBOURG, le 19 février 2014
L'Occident et l'Orient s'affrontent
en Syrie et en Ukraine
A qui profite la balkanisation du Moyen-Orient?
Quel rapport entre la Syrie et l'Ukraine? Rien à
priori. Pourtant, lesdits pays sont des champs de bataille, opposant les
puissances occidentales (Etats-Unis, Royaume-Unis, France et Allemagne) aux
puissances orientales (Russie, Iran, Chine).
En Syrie, le conflit a pris un tournant avec
l'entrée en action de l'"Etat
Islamique en Irak et au Levant" (EIIL), groupe djihadiste violent et
adepte de la guerre de religion. L'histoire de ces dernières années montre que
les groupes qui prônent la guerre de religion (sunnites contre chiites ou
contre chrétiens ou juifs) sont des bras armées de l'Arabie saoudite - le
bailleur de fonds numéro un des insurgés [syriens] (1) - qui travaillent en étroite collaboration avec
les services américains.
Ce fut le cas en Afghanistan et, actuellement,
c'est le cas en Irak et en Syrie. Lesdits groupes cherchent à opposer les
communautés religieuses et ethniques les unes contre les autres dans le but de
décomposer les pays de la région, de créer des pays ethno-religieux du type
israélien ou kurde; bref de balkaniser
le Moyen-Orient. C'est le prolongement du plan de Georges W. Bush qui
s'appelait autrefois le "chaos
constructif" (constructif pour qui?). Ce plan avait pour rôle
d'affaiblir les Etats-nations et les puissance régionales, pour la création du
"Grand Moyen-Orient".
ces derniers temps, les attentats commis au Liban
dans les quartiers peuplés majoritairement de Libanais de confession chiite,
ainsi que le "soulèvement armé" d'un groupuscule djihadiste sunnite à
Tripoli, devaient exacerber les tension confessionnelles dans un Liban
multiconfessionnel. Peine perdue. Au Liban il y des quartiers à majorité
confessionnelle où le poids d'une confession est plus important que celui des
autres. Mais, il n'y a pas de ghettos où les communautés vivraient complètement
coupées les unes des autres.
Il est à souligner que le groupe politique du
"14 mars" de Saad Hariri est soutenu essentiellement par l'Occident
et l'Arabie saoudite pour affronter l'opposition multiethnique et
multiconfessionnelle au sein de laquelle le Hezbollah constitue un poids lourd.
Face aux conséquences néfastes pour l'unité du Liban de cette guerre de
religion imposée de l'extérieur et face au danger de décomposition du pays qui
en résulterait, les groupes politiques libanais ont formé d'urgence un
gouvernement d'union nationale.
Le quotidien Le Monde du 16-17 février 2014 donne
un exemple concret d'un Liban où musulmans et chrétiens travaillent main dans
la main pour préserver l'unité nationale. On y lit qu'un ancien "policier de 43 ans, Toufik a rejoint le
groupe d'autodéfense mis sur pied à Ras Baalbek par Rifaat Nasrallah, un entrepreneur chrétien, partisan du Hezbollah
chiite". On y lit également que "des hommes patrouillent à Fakiha, localité mixte sunnite-chrétienne
voisine de Ras Baalbek."
Les risques de décomposition de la Syrie ont poussé
les insurgés syriens à se retourner contre l'EIIL. Le dialogue, même
infructueux, engagé entre le gouvernement syrien et une fraction des rebelles
aurait-il été provoqué par le soucis de préserver l'unité nationale? La
question mérite d'être posée.
L'entrée en action de l'EIIL montre bien que le
plan macabre de balkanisation du Moyen-Orient, par le truchement de guerre de
religion, continue à faire couler le sang. Ce qui contredit
l'"analyse" de ceux qui prétendent que les Etats-Unis se
"désintéressent" et souhaitent se "désengager" du
Moyen-Orient!
Les tensions sont également très vives en Ukraine
où l'opposition défie la légitimité du pouvoir en occupant Maïdan, place centrale de Kiev, la capitale. Et les autorités
n'hésitent pas à massacrer les opposants. Cela donne un argument à l'Occident
(les Etats-Unis, la France, l'Allemagne,...) qui, sous le prétexte de défendre
les "droits de l'homme", soutient l'opposition et reçoit même ses
chefs - Vitali Klitschko et Arseni Iatseniouk (du parti de l'opposante
emprisonnée Ioulia Timochenko) - le 1er février à la conférence de
Munich sur la sécurité. Ils avaient alors notamment rencontré John Kerry, le
secrétaire d'Etat américain, Frank Walter Steinmeier, ministre allemand des
affaire étrangères et Laurent Fabius, ministre français des affaires
étrangères.(2) Du jamais vu.
Après l'effondrement de l'Union soviétique,
l'Occident à récupéré l'ancien "camp socialiste". Mais l'Ukraine et
la Biélorussie manquent à son tableau de chasse. L'Ukraine, aussi grand que la
France, pays industrialisé et traversé par des gazoducs russes, est un pays
d'importance géopolitique. Profitant des tensions sociales, l'Occident essaie
de déstabiliser le pouvoir central et son allié russe. L'opposition est très
bien choyée par les Occidentaux. Vitali Klitschko, l'un de ses chefs, tient
depuis le début de la crise, une tribune quotidienne dans un journal allemand, Bild. Début septembre, pour manifester
son soutien à l'opposition, Guido Westerwelle, ancien ministre allemand des
affaires étrangères, s'était rendu sur place Maïdan.(2)
Mais, l'Occident avance doucement en Ukraine, étant
conscient que le cas ukrainien représente un casus belli pour la Russie qui
dispose encore d'atouts non négligeables pour contrer l'offensive occidentale
en Ukraine et en Syrie.
Le véto aux Nations-Unies et, surtout la force de
frappe nucléaire de la Corée du Nord, représentent les Jokers de la Russie et
de la Chine dans leur bras de fer face à l'Occident affaibli, mais toujours
offensif. Aussi ces jours-ci la presse occidentale s'en prend violemment à la
Corée du Nord, l'accusant de "crime contre l'humanité".
La Syrie, l'Ukraine et la Corée du Nord: un trio
explosif qui empêche l'Occident de mettre la main, pour l'instant, sur le globe
tout entier.
Les négociations entre l'Iran et l'Occident sont
fortement influencées par la partie d'échecs qui se joue actuellement devant
nos yeux entre les puissances occidentales et orientales sur l'échiquier
mondial.
1- Benjamin Barthe - Le Monde du12 février 2014.
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